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Entretien avec Patrick Ochs (Rue de la Muette) pour la sortie du titre « Octobre Rose » au profit de la Ligue contre le Cancer de Dordogne

22 Oct

 

C’est à l’occasion de la campagne de communication et de sensibilisation au dépistage du cancer du sein, Octobre Rose, qu’Alexandra Fohl et Patrick Ochs ont choisi de créer et d’enregistrer la chanson « Octobre Rose », au profit de la Ligue contre le Cancer de Dordogne, à laquelle les artistes ont laissé les droits. Le titre utilisé par la Ligue pour promouvoir sa cause et récolter des fonds est à présent en vente sur les stands de l’association ou via un contact direct avec elle [ici] ou Patrick Ochs. Le chanteur de Rue de la Muette en a écrit le texte à partir de poèmes de Valérie Chaussade, qu’il avait photographié dans le cadre d’une exposition de ses œuvres photographiques, et qui d’ailleurs pose sa voix sur la chanson, militante ardente de la sensibilisation relative à la maladie. C’est donc d’un commun concours de ces trois artistes, et avec la participation de musiciens locaux (Gilles Puyfagès, accordéoniste de Rue de la Muette, entre autres) qu’a été réalisé le single, accompagné d’un clip, et produit avec l’appui de Radio France Bleue Périgord. Il y a quelques jours, nous joignions Patrick Ochs au téléphone pour nous entretenir au sujet de cette initiative artistique généreuse et utile, où s’exprime l’art d’aborder un sujet grave et d’y intéresser les auditeurs avec l’humanité et la délicatesse que la légèreté dansante, un brin de malice tendre et l’amour de la vie savent insuffler au monde.

– Patrick, bonjour et merci de nous accorder cet entretien. Peux-tu donc parler de ce single « Octobre Rose » qui vient d’être enregistré et se distribue ?

Je partage la voix dans cette chanson avec une chanteuse de ma région, Alexandra Fohl, avec qui j’étais en train de répéter sur des textes à moi, puisqu’elle avait envie qu’on travaille ensemble. Je trouvais très intéressant la façon dont se superposaient nos voix. J’avais très peu travaillé avec des voix féminines auparavant, et c’est un projet que j’avais pour un prochain album. Elle avait été en contact avec Valérie Chaussade qui s’occupe ici d’Octobre Rose avec la Ligue contre le Cancer de Dordogne, pour écrire des chansons d’après les textes et poèmes qu’écrivait Valérie, qui était traitée pour un cancer et donc écrivait ses états d’âme sous forme de poèmes un peu au kilomètre. C’est quelqu’un de très militant et actif, et donc le contact s’est fait aussi tôt. Alexandra m’a présenté Valérie, que j’ai photographiée dans le cadre de l’exposition à laquelle je participais à l’époque. Je me suis précédemment consacré à mon exposition photographique, que je fais tourner avec mon fils, lui étant sculpteur. En région, l’expo a fait un carton ; le vernissage a bien marché. Les photos avec les tatouages qu’on voit dans le clip sont donc de moi. Et puis de fil en aiguille, Valérie m’a demandé de mettre ses textes en musique, ce qui me semblait totalement impossible, parce que mettre en musique des textes écrits au kilomètre n’est pas très facile. J’ai donc utilisé certaines idées fortes et phrases que j’ai remises en forme à ma façon, autour de cette thématique là. On a donc signé le texte ensemble, et j’ai composé la musique, que je voulais être un peu une musique évoquant les Caraïbes ou la Réunion.

– La chanson jouit en effet d’un contraste entre la légèreté et la gaité de la musique et la gravité du sujet abordé, ce qui adoucie la lourdeur. L’as-tu composée et arrangée avec les musiciens de Rue de la Muette?

J’ai composé la musique seul et l’ai arrangé avec un guitariste, qui ne fait pas partie de Rue de le Muette, mais avec qui je joue sous mon propre nom, Vincent Lamoure. Je voulais que la musique soit dansante. J’entendais des percussions légères, des choses qui fassent danser, joyeuses. Je ne souhaitais pas que ce soit lourd, pas dans le sens de la lourdeur du sentiment, mais de la gravité. Il fallait que ça donne envie de bouger les pieds, et qu’après on se rende compte que la chanson parle de goutte à goutte, de choses dures à supporter, qu’on soit une femme ou un homme, car tout le monde peut être touché par ça. Je trouvais le poème de Valérie, d’où je suis parti, poignant, intéressant ; mais j’aime bien qu’une chanson remue, et qu’ensuite on se demande de quoi ça parle, plutôt qu’avancer droit dans le vif en parlant de la mort et du cancer. Il y a une chanson formidable, « Marcia Baila » des Rita Mitzouko. Il est difficile de faire aussi bien ; après ça tu ne peux pas parler du cancer en te prenant la tête à deux mains. Pour anecdote, j’avais d’ailleurs à l’époque de ma chanson « La Muette à Drancy » pensé à Catherine Ringer, dont j’aurais bien voulu qu’elle la chante. Et avec tout ce qui nous accable dans l’actualité, on n’a pas besoin de s’en rajouter. Si on peut se retrouver dans une soirée pour danser, je trouve ça bien que cette chanson y ait sa place. Donc je voulais un peu de musique réunionnaise, qu’on ait envie de sourire ; on m’entend rire à un moment et amener de la légèreté. Et malgré tout Alexandra le porte quand même dans sa voix et le raconte que c’est une chanson qui parle quand même de la mort.

– Mais ne parle-t-elle pas aussi surtout de vie?

Dans la voix d’Alexandra, plus que dans la mienne, qui est une voix de mec qui a du mal à se réveiller le matin, on l’entend. Et le contraste entre ma voix qui est très noire et « dark » et la sienne qui est joyeuse est vraiment intéressant.  

– Comment peut-on se procurer le disque ?

La Ligue contre le Cancer 24 vend le CD pour huit euros avec une carte que j’ai réalisée aussi, et dont je leur ai laissé les droits. C’est vendu sous forme de Cd single. Les musiciens qui y ont participé sont Gilles Puyfagès (accordéon) de Rue de la Muette, Michel Trény (contrebasse) et Olivier Léani (percussions). C’est local : j’ai réalisé ça avec des gens autour de moi et l’aide de France Bleue Périgord. Tous les produits des ventes sont pour la Ligue. Comment ne pas être concerné et intéressé? Si j’avais su faire autre chose, bricoler, je l’aurais fait pour une cause. Mais je sais faire des chansons. Et pour une fois qu’on me demande des chansons pour une cause, c’est chouette. On peut me joindre ou joindre la Ligue pour se procurer le disque ; et sur ma région, il doit être distribué assez facilement. Il devait y avoir un concert pour soutenir cette jolie cause aussi, mais pour le moment et dans l’incertitude liée aux annulations de spectacle, je préfère ne pas trop m’avancer.

– L’album en préparation sera-t-il consacré aussi à cette cause ?

Je ne sais pas encore comment je vais le faire, certainement avec des musiciens de Rue de la Muette. Il ne sera sans doute pas entièrement consacré à ça. Mais ce serait bien que cette chanson y figure, car elle est sympa. Je pense que les thématiques vont beaucoup parler des femmes ; c’est la première fois que je le fais comme ça. J’ai toujours parlé de sujets assez vastes, de mes relations avec des femmes aussi. Mais je n’ai pas écrit pour des femmes, et ça fait longtemps que j’en ai envie. Il est fort possible qu’il y ait des collaborations avec Alexandra au niveau de l’écriture et la composition. On a déjà un beau répertoire. Je n’écris pas souvent, mais quand une thématique me motive, j’écris dix ou quinze titres à la fois.

 

 

Miren Funke

Photos : Patrick Ochs, Carolyn C

 

Liens : clip : https://www.youtube.com/watch?v=wGczKL27cEI&feature=share&fbclid=IwAR1Ey0LEsGnq-X8BlpmnIz_UFZZT4HD2sRpseySJf2PvkKHs_yngqElLERw

Ligue contre le Cancer Dordogne : https://www.ligue-cancer.net/cd24/journal

Site Patrick Ochs : https://www.patrickochs.com/

Facebook : https://www.facebook.com/pages/category/Musician-Band/RUE-DE-LA-MUETTE-Patrick-Ochs-77428857081/

Site Alexandra Fohl : https://www.alexfohl.fr/

Facebook : https://www.facebook.com/alexandra.fohl

 

Partenaires. Rue de la Muette.

6 Jan

 Depuis 20 ans,  Patrick Ochs et ses musiciens colportent leurs chansons, nous font partager leurs émotions, histoires banales ou fantastiques, vécues ou rêvées, où les animaux côtoient et se confondent avec les humains, univers du cirque, des fêtes foraines, nostalgie et blessures de l’enfance, où il y a toujours l’espoir d’un monde meilleur dans le désenchantement,  sur des musiques java-rock, nourries d’influences klezmer, 20 ans depuis les hangars, de cabanes en bistrots, de foyers d’accueil en prison, puis sur les scènes de France et du monde.

Quinze ans de tournées, plus de 1000 concerts en France, en Chine, en Bulgarie, en Russie,  jusqu’à Saint-Pierre et Miquelon, à l’écart des médias, mais avec un public fidèle.

Et c’est du septième album de Rue de la Muette dont il est question aujourd’hui. Un album fait en famille, entre amis, avec Gilles Puyfagès à l’accordéon, Eric Jaccard aux percussions, Vincent Mondy à la clarinette basse, clarinette Si b, au saxophone soprano, et Patrick Ochs au chant. 12 chansons parmi les plus belles choisies dans les albums précédents, mais totalement relookées, à tel point qu’on les redécouvre, autrement, plus trois nouvelles, toutes enregistrées dans les conditions du direct, avec une énergie nouvelle, chaque musicien mis en lumière, et la voix de Patrick Ochs, reconnaissable entre toute,  une voix qui vient de loin, du plus profond de l’âme, toute en nuances, douce et mélancolique, ou grave jusqu’au tragique, grondante de cris de révolte,  une voix indomptable dit-il, trop rauque, comme un vieil ours sauvage, mais toujours envoûtante, elle nous embarque et nous retient  dans son grand cirque de la vie.

Tout commence là, sur Le bout du banc, au bout du banc de la société, où un homme regarde passer les gens, des directeurs, des capitaines d’industrie, passer le temps, la vie qui va , Tu m’envoies de temps en temps de fringues et des médicaments, mais tu me laisses au bout du banc… Suis-je petit ou bien grand, assis au milieu de la nuit, sur un banc ? Chanson qui se décline, comme une comptine rythmée par les percussions et la clarinette, et l’accordéon qui soupire, la solitude face à l’agitation d’une société indifférente.

Patrick Ochs  archives  NGabriel

Suit une chanson inédite : Veuillez rester à votre place ! C‘est en Monsieur Loyal que Patrick Ochs ouvre le rideau du cabaret des animaux : Les fauves et les bêtes sauvages / Vont sortir de leur cage / Attention que rien ne dépasse / Ne bougez pas, restez en place. Des animaux sauvages ? J’ai un tigre dans ma cuisine / Qui mange du poulet, des sardines / Un vieil ours devant le frigo / Qui me suit quand j’vais au bistrot… Mais Tout n’est qu’illusion / Il faut bien que tout le monde mange…

Qu’importe Ce qu’on dit de toi / Le bien, le mal, ça me regarde pas… J’ai aimé, j’ai eu mal, mais ça m’est égal…

Et Dis moi pourquoi quelqu’un comme toi / Dis moi pourquoi ne chercherais pas sur terre son contraire / Dis moi pourquoi quelqu’un comme moi / N’aimerait pas au contraire quelqu’un comme toi… Au contraire, Deuxième chanson inédite.

Une version sans guitare de la rencontre improbable entre deux musiciens, c’est La valse de Mingus et BB King : Dans un couloir Chalie Mingus / Et le fantomne de sa contrebasse / Attendent le dernier autobus / Mais quand le bus passe pour Mingus il n’y a jamais de place / Dernière station puis terminus / Personne ne descend au bout du monde.

Mélancolie, désillusion, swing accordéon, et montée en puissance musicale de La fanfare:

Je voulais jouer dans la fanfare, comme à la Nouvelle Orléans / Laisser ma trace sur le boulevard, m’arrêter face à l’océan / Est ce que maintenant il est tard ? Est ce que tu seras sur le quai ? / Est ce que tu me tendras les bras en me disant je t’attendais ?

Dans la galerie de portraits de la grande ménagerie du cirque, c’est un mendiant d’amour désespéré qui danse La java de l’ours dans un aquarium :

Est ce que tu me diras Bas les pattes animal / Tu danses, tu danses tellement mal tellement mal / Est ce que tu me jetteras par terre / A la braderie du secours populaire / Me feras tu du bien ? Me feras tu du mal ?

Vous voulez un peu de magie, dans une boutique pleine de trucs bizarres qui sortent des trous, et aussi des placards  ? C’est en cadence swing que vous entrerez chez Madame Irma : Madame Irma reçoit des clientes / Qui viennent de loin consulter la voyante / Elle va vous guérir de toutes vos peines / Elle va vous enlever toutes vos chaînes. Et c’est la troisième chanson inédite de l’album.

Puis on retrouve une des plus célèbres chansons du répertoire de Rue de la Muette : Ma mère traîne au café, chanson dont la musique est inspirée d’une chanson  que lui chantait sa mère, Boublitchki, chanson populaire du folklore russe et juif, sous différentes versions, qui a fait le tour du monde : Ma mère traîne au café, mon père traîne au café / Dans la maison, je monte le son / De la vieille télé et quand j’entends frapper / Je dis «  il n’y a plus un rond dans la maison » /  Le soir après l’école, quand les parents picolent / Seul dans les rues, je traîne mon âme en peine. Chanson d’une actualité permanente, quand les parents boivent, ce sont les enfants qui trinquent.

Photo archives NGabriel

Dans ce grand cirque de la vie, on est tous Partenaires, comme ces vieux chiens dressés, qui dansent sur leurs pattes de derrière , et parfois on a le blues du clown triste : Partenaires, partenaires, toujours partenaires / Partenaires, logés dans des meublés pas cher / Arrête de rêver des palaces / Les règlement, c’est trop sévère / Pour les vieux clowns, les vieux cabots / Même quand ils dansent ou font les beaux / Sur leurs pattes de derrière / Alors quoi faire ? / Pas être marrant, pas différent / Bosser sa vie entière / En employé obéissant / Et puis un jour, sortez du rang / Tirez vous, y’a rien à faire / Vous rapportez plus d’argent.

Mais il faut vivre, ne pas rester sur le côté, et danser encore, c’est ce que raconte cette danse amoureuse très jazzy :

Un pas pour danser : De chaque côté de la ligne on pose les pieds / Un pas pour danser, un pas pour un pas de côté / De chaque côté de la ligne, un pas pour avancer, pour danser, pour aimer / De chaque côté de la ligne, un pas pour  pas rester sur le côté / De chaque côté de la ligne, me laisse pas tomber / Ô mon amour, je viendrai te chercher.

Retour sur la piste aux étoiles, avec La fille aux éléphants, reine sur la piste, mais sa vie a la couleur des éléphants : Laissez passer la caravane / Entre en piste dans ton corps, dans ton cœur, dans ton âme / De la couleur des éléphants.

Grise aussi la vie d’ Albert au milieu du pont, Albert qui rêve de s’envoler de l’autre côté du pont.

On a beau vouloir regarder en avant, hélas le monde ne change pas, et on a mal à l’humanité,  c’est le cri déchirant de La Muette à Drancy, qui nous atteint en plein cœur :

Avant la tombée du soir / Avant que le dernier train quitte la gare / Je traîne mon petit frère dans le métro / Pour voir les tigres du cirque Medrano / En remontant le boulevard / J’ai dans le cœur le cœur de la fanfare / Vite, sortez nous d’ici / Sortez nous tous d’ici / Loin du camp de Drancy / Sortez nous tous d’ici.

La 15 ème et dernière chanson de l’album est la fable de La vache qu’un garçon était en train de traire :  Pleurait à cause du petit veau / Qu’un boucher le matin tôt / Avait mis dans sa bétaillère/ avec une morale que n’aurait pas renié La Fontaine : Chacun mange plus petit que soi / C’est la vie, et c’est comme ça.

Découvertes ou redécouvertes autrement, ces 15 chansons qui retracent le parcours musical de Rue de la Muette,  portraits sensibles, histoires de vies, à s’indigner, à s’émouvoir, à s’étonner, parfois tragiques, mais jamais désespérées, portées par ce géant pétri d’humanité qu’est Patrick Ochs, sur des musiques voyageuses, qui se glissent subtilement et se coulent aux mots, du souffle d’accordéon qui soupire en valse lente  au rire clair de la clarinette, les sanglots de saxophone, le rythme des percussions, jazz et java copains, ça doit pouvoir se faire chantait Nougaro, et là, ça le fait.

Photo Archives NG au Zèbre de Belleville

Un huitième album de Rue de la Muette est en préparation : Les rendez-vous de novembre, titre qui fait référence au tragique 15 novembre 2015.

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                    Danièle Sala