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Robert Doisneau, Le révolté du merveilleux.

25 Oct

revolte-merveilleux

Si je devais en quelques mots raconter ce qu’est ce film docu sur Robert Doisneau, je le citerais, texto, «Bon sang, mais c’est une radiographie, vous avez regardé à l’intérieur ce qui n’est pas exposé à l’étalage... »*

Voilà ce qu’il aurait pu dire à Clémentine et Marie Deroudille, ce révolté du merveilleux. C’est à la fois un portrait intime, et un portrait « radioscopie » qui ouvre des pistes qu’on ne soupçonnait pas forcément, sauf peut-être les plus passionnés de ce poète de la photo. Dont Prévert disait: « Tu photographies à l’imparfait de l’objectif. » Un imparfait certes, mais qui ajoute à la crudité de la réalité la tendresse du regard. Comme un Pierrot malicieux, curieux, désobéissant, guetteur d’instants privilégiés, pour 3 secondes d’éternité… Il faut la patience et la discrétion d’un pêcheur à la ligne, et l’oeil aiguisé pour les fixer, ces secondes d’éternité.

Dans son œuvre très diversifiée, on trouve ce qui animait Ronis, Boubat, Izis, Sabine Weiss, Charbonnier, un groupe informel sous le label virtuel de la photographie humaniste. Le baiser de l’hôtel de ville est un arbuste qui cache une forêt foisonnante, (350 000 négatifs)  presque une imposture si on ne retient que ça de Doisneau, homme fidèle à une certaine idée de la vie fraternelle,à sa banlieue, à ses gens de peu, mais tellement attachants.

On croit que le Paris de Doisneau a disparu, c’est vrai et c’est faux. Aujourd’hui, c’est en couleurs qu’il ferait les tableaux de rue. En photos pastels ou gouaches que ce badaud émerveillé mettrait en images un autre Paris. Qui n’a plus les mêmes concierges pittoresques, les clodos sont SDF, et c’est peut-être du côté des campings sauvages de Stalingrad de La Chapelle, ou des paysages des nouvelles halles qu’il irait voir le monde d’aujourd’hui… Avec madame Sabine, ou l’ombre de Jacques… sur un air de Crolla ? C’est qu’il m’a semblé percevoir à travers ce documentaire, la vie rugueuse, parfois, et l’amour de la vie, toujours.

C’est sur ARTE+7 en replay, encore 5 jours,  cours-y vite cours-y vite le bonheur est dans la télé.. Pour une fois…

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Norbert Gabriel

  • Extrait d’une lettre de 1986 ou 87.
  • Lettre Doisneau 25-10-2016 16-01-34 3129x2476.JPG

Jean-Pierre Leloir, l’homme qui aimait les artistes

8 Nov

Livres photo spectacle AAAQue c’est beau la photographie … chantaient les Frères Jacques… Certes, mais c’est comme tout, le pire peut côtoyer le meilleur. Et parfois… Mais l’heure ne sera pas à la morosité mais à une vision plutôt positive…

Quelques livres,

  • Pierre Jamet, Fred Mella, Paul Tourenne (Temps de pause)
  • Georges Dudognon (St Germain…)
  • Robert Doisneau (La vie d’un photographe) plus le CD, « Le braconnier de l’éphémère)
  • Jean-Pierre Leloir (Portraits de la chanson française)

Jean-Pierre Leloir, l’homme qui aimait les artistes

C’est sans doute le plus grand photographe de spectacle de notre génération, essentiellement connu pour ses images dans le monde de la musique, la chanson, le jazz, et la célébrissime photo des trois grands, dont voici une autre version avec l’auteur en action:

LeloirPhotographiant

Quelques photographes contemporains ont largement illustré dans leurs albums leur amour du genre humain, dans toutes ses variations, Boubat, Denise Colomb, Doisneau, Ronis, par ordre alphabétique. Quelques paparazzi ont largement montré que l’ignominie n’a pas de limite dans la recherche de l’image choc, à n’importe quel prix. Ce qui rappelle une anecdote de Robert Doisneau, au cours d’un voyage dans les Alpes lors de la transhumance, il fait un bout de chemin avec un troupeau, et une voiture folle oublie de freiner, percute le troupeau, et voilà une dizaine de brebis tuées… Quand il raconte ça, on lui demande,

  • –  Tu as fait des photos ? 
  • – Non, j’ai consolé le berger...

En visitant des expos diverses, dont des expos de photos, il m’arrive souvent, trop souvent, de penser que j’ai envie de consoler l’artiste qui a servi de modèle, en s’exposant sur scène. Avec en fond sonore une petite voix qui chantonne:  Gardez-moi de mes amis, mes ennemis je m’en charge.

Doit-on considérer que le fait de s’exposer en scène permet à tous les voleurs d’images de se servir sans se gêner, et de disposer de cette image en propriétaire absolu qui peut se dispenser de l’autorisation du modèle ?

Sans oublier que ce libre-service s’accompagne souvent de désagréments pour le public, avec la noria devant la scène de quelques professionnels de la profession, équipés de téléobjectifs maousses; néanmoins, on se met à 2 mètres du sujet, et malgré les sonos qui tonnent, les clics-clacs du réflex se font bien entendre du public, enfin du public qui écoute vraiment, étant donné la tendance lourde des publics brandissant des smartphones ou des tablettes pour voir dans un écran de 50 ou 100 cm2, ce qui se passe sur la scène de 150 m2… Est-ce bien raisonnable ?

Les temps modernes de la photo numérique mettent à la portée d’amateurs à peine avertis des prises de vue qui demandaient une connaissance technique éprouvée au temps de l’argentique, et avec des films de 36 poses (parfois 72) il fallait réfléchir avant de cliquer. Qu’est-ce je veux montrer ? Comment je vais le montrer ? Comment ce sera perçu ? Et privilégier la perfection technique ou l’émotion?

Parfois l’excellence de la définition permet de montrer le moindre bouton sur la peau… C’est de la photo de dissection, et c’est que voulaient éviter les portraitistes des années 40, avec leurs plaques-négatifs en 30×40 parfois (Centimètres) ils mettaient un tulle pour adoucir la crudité du cliché, et garder un peu de magie dans l’image. Mais ceci est une autre histoire de temps révolus.

Une photo d’Allain Leprest, prise quelques temps avant sa mort m’a profondément choqué, ceux qui ne connaissent pas Leprest vont y voir le visage d’une sorte de zombie terrifiant, limite vampire pervers cruel, et cette image ne correspond à aucune des chansons de Leprest, à la rigueur « Je hais les gosses » prise au premier degré… Techniquement la photo est bonne, pour figurer dans un album de freaks, mais pour faire aimer Leprest, c’est le contre emploi total.

Jean-Pierre Leloir, Robert Doisneau, Georges Dudognon, Willy Ronis ont aimé les artistes qu’ils ont photographiés, même avec une photo-vérité, il émanait une tendresse dans leur approche de l’image. Le paparazzi se fiche de ces considérations, seule compte sa chasse à l’image, comme un sniper sans état d’âme, pourvu que l’image soit dans la boîte, il shoote . Et se shoote avec ses images-choc. Et avec les réseaux dits sociaux, les dommages sont plus fréquents que les hommages. C’est sans doute une idée obsolète de respecter le droit à l’image, et les accords amiables d’un(e) artiste qui a demandé « pas de photos » et qui doit le répéter pendant son spectacle aux trublions qui n’ont même pas la discrétion d’être invisibles. C’est juste une question de respect.

Puisque que Leloir est le sujet de départ, quelques images d’artistes qu’il aimait, et comment il les montrait.

jp leloir montage

Extraits du livre « Portraits de la chanson française » (2012)

Et enfin, un portrait biographique par Fred Hidalgo.

Norbert (Nicéphore)  Gabriel

Last but not least, il y a quelques années, Eric Barbara photographe jazz a exposé une superbe série d’images mettant en beauté Elisabeth Caumont et Manu DiBango lors d’une cérémonie Victoires du jazz, il avait écrit en dédicace pour l’exposition:  » Elisabeth et Manu, mon seul talent c’est vous. » Quand il m’arrive de montrer une photo de spectacle un peu réussie, j’ai toujours cette dédicace en tête.

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