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Montand et les auteurs…

29 Nov

Une discussion animée a occupé les réseaux sociaux récemment, sur l’interprétation d’une chanson dont le texte a été plus ou moins modifié et amputé . Sans l’aval de l’auteur(e).

Le fait est assez fréquent, parfois au mépris du droit moral de l’auteur, et en déformant le sens de la chanson. Par erreur ou incompréhension… Remplacer «Ma mie » par « Maman » dans « La non demande en mariage » relève peut-être d’un lapsus freudien.

 

Photos Crolla par Emile Savitry, Montand Harcourt, Prévert DR

Un des interprètes les plus connus dans le monde, Yves Montand, a souvent apporté des modifications dans les chansons qu’on lui proposait. Mais chaque fois, il en parlait avec l’auteur, et c’est uniquement avec l’aval de celui-ci qu’il enregistrait la version modifiée selon ses suggestions.

Le premier exemple c’est « La chanson des cireurs de souliers ». Prévert avait demandé à Henri Crolla de mettre une musique sur ce poème. Quelques mois après, nous sommes en 1947, Prévert et Crolla vont chez Montand, lui montrent la chanson, Montand est emballé, et adopte les cireurs. Toutefois, malgré sa timidité envers les intellos comme Prévert, il suggère une fin différente. Prévert accepte, et c’est la version Montand qui est déposée à la Sacem: «  Les cireurs de souliers de Broadway ».

On peut souligner que Montand n’a jamais revendiqué le moindre centime sur ses participations, au contraire d’une célèbre canadienne Céline D. qui demande 20% uniquement pour chanter ce qu’un autre a écrit. De même, Montand a repéré un texte de Gébé et a demandé à en faire une chanson, ce que l’auteur n’avait jamais envisagé. (Casse-Têtes, mis en musique par Philippe-Gérard, sur la demande d’Yves Montand qui avait repéré ce texte dans Charlie Hebdo )

On peut rapprocher l’attitude des auteurs avec Montand à celle de Boris Vian, quand Mouloudji lui a demandé des modifications pour « Le déserteur » réponse de Vian: « mais Moulou, tu fais ce que tu veux, c’est toi qui chantes.. »

Et non reprocher à Mouloudji d’avoir changé quelques vers… Que Vian a repris dans un de ses enregistrements de la chanson.

Pour conclure avec Montand, il a eu des intuitions fulgurantes, mais aussi raté des occasions… Toutefois, il était à l’écoute de sa garde rapprochée, Bob Castella, Henri Crolla, Simone, par ordre d’apparition dans sa vie. Quand Jacques Verrières lui a présenté « Mon pote le gitan » il était dubitatif et c’est Crolla qui l’a convaincu. Et si on peut reprocher à Montand un côté grande gueule italo-méridionale, il a toujours été d’une honnêteté scrupuleuse avec ses auteurs. Paraboschi, autre impulsif tonitruant a toujours été constant, « Montand pouvait pousser une gueulante de mauvaise foi dans le feu de l’action, mais après il venait s’excuser et reconnaître ses torts, quand il avait tort . Ce qui arrivait parfois.

Une de ses dernières interventions concerne « La bicyclette » dont le titre initial est à « à bicyclette »… Quand Pierre Barouh lui a montré la première version, une sorte de récit en deux temps, si on peut dire, il a suggéré à Barouh d’en faire un court métrage, plutôt qu’un documentaire, et en effet, l’auditeur entre d’emblée dans le film, alors que dans le documentaire, il est témoin extérieur ..

De l’ébauche d’une chanson à sa version définitive, gravée dans le marbre de la Sacem, la vie de l’artiste peut l’amener à faire des variantes, changer un mot, modifier une phrase, mais c’est toujours avec une raison précise. L’interprète qui modifie devrait avoir le scrupule d’en discuter avec l’auteur. En justifiant son point de vue.

Un des exemples les plus étonnants est l’histoire des « (..) Plaines du Far West ».   Montand a un peu plus de 20 ans, il a débuté avec un répertoire « Trechenel »  (Trenet-Chevalier-Fernandel) et il veut une chanson à lui. Il est fou de cinéma américain.  Son imprésario du moment l’envoie chez un musicien aveugle qui n’a jamais vu un western, Montand raconte, et la chanson nait ..  Co-écrite avec Maurice Vandair. Cette chanson n’a jamais quitté son répertoire, la voici dans une version très cartoon …  Les ragazzi qui l’accompagnent c’est le gang des ritals, Castella,  Balta, Paraboshi, avec Soudieux,  le trombone de Claude Gousset et Hubert Rostaing clarinette.  Crolla, qui était un des piliers du gang des ritals, était absent sur la scène, mais présent sur l’album, en scène c’est Didi Duprat qui l’a remplacé ..  and the show must go on …

Last but not least, dans « Les feuilles mortes » il y aussi une trace de Montand…

Voir ici–>

Norbert Gabriel

Montand, Edith, Marylin et Simone

18 Mai
Théâtre du Marais le 15 Mai Photo©NGabriel2016

Théâtre du Marais le 15 Mai Photo©NGabriel2016

… et Lydia qui nous confie ses secrets de famille… Lydia-Hélène, Hélène Arden qui a pris la voix de Lydia, la sœur ainée de la famille Livi pour écrire ce spectacle et raconter son petit frère chéri, le raconter avec tendresse, mais avec lucidité et sans complaisance partisane.

Elle est totalement bluffante Hélène Arden, excellente chanteuse, danseuse, comédienne, elle fait vivre tous les personnages avec un réalisme confondant. Mais comment ça a commencé ?

D’abord, dans l’écriture de cette biographie scénique de Montand, Hélène Arden a bien travaillé son sujet en profondeur, pas de caricature taillée à la hache ou de survol superficiel à effets tapageurs. Chaque trait a son éclat de lumière et s’il le faut sa part d’ombre. (Il est vraisemblable que ce spectacle a été construit sur la base de la biographie de Montand par Hamon et Rotman, un modèle du genre) Rien n’a été oublié, sachant que le sujet est centré sur les 3 femmes qui ont ‘construit’ Montand, si on peut dire.

Montand et Marylin AAA 15-05-2016 17-53-49 2556x2989Hélène Arden réussit à incarner avec autant de crédibilité, la brune Edith, la blonde Marylin, et si Lydia était là, elle se reconnaîtrait. Comme tout italien retrouve en elle les scènes de famille autour des  spaghetti alla bolognese  et des traditions incontournables, entre bel canto et débat politique..

Lydia, c’est le point d’appui de la famille Livi, elle a connu tout le monde,  est devenue l’amie autant d’Edith, qui l’a toujours vue bien après sa séparation avec Montand, que de Simone, l’ouvrière  et la bourgeoise se sont bien complétées en toute amitié pour découvrir leurs cultures respectives.

C’est un spectacle totalement réussi, pour retrouver Montand, ses chansons emblématiques, sa vie romanesque, et pour la formidable présence protéïforme d’Hélène Arden.

Ce qu’ont dit les premiers spectateurs concernés est totalement justifié. Dont, témoignage Amiel 18-05-2016 16-54-06 3634x1150

Au Théâtre du Marais le dimanche à 17 H, et le mercredi à 20h30, jusqu’au 5 juin,( puis Festival d’Avignon),

 

On réserve ICI—->Rideau rouge réservation 06-11-2015 00-48-40 635x516

 

 

Et pour quelques images de plus,

Montand Hélène Arden sel Montage 18-05-2016 17-57-13 5120x3499

 

 

Norbert Gabriel

A bicyclette sur la route de l’aculture …

22 Fév

Il y a quelques semaines, l’affaire Bruel-Barbara a déclenché de diatribes fulminantes sur l’insupportable attentat contre la chanson en général. Ces jours-ci Lambert Wilson s’est attaqué à Montand. D’une part les extraits de l’album entendus ça et là montrent une indigence d’interprétation assez effarante venant d’un comédien a priori confirmé, avec une justesse de voix très approximative, d’autre part, un des morceaux de bravoure subit deux avanies, la chanson de Pierre Barouh et Francis Lai, est titrée « La bicyclette »* au lieu de « à bicyclette », sur un album produit par Sony. De plus dans son interprétation, Wilson reprend la version enregistrée de Montand, avec l’erreur que Montand a corrigée dans tous ses concerts, ce n’est pas « être un seul instant avec Paulette » mais « être seul, un instant avec Paulette » et ne pas voir cette nuance est assez consternant plus de 40 ans après la création de la chanson. Et bien entendu, toutes les émissions de promo n’ont aucun intervenant capable de mettre les choses au point… Et ça remet quelques valeurs à leur juste place. Tiens Bruel, par exemple, c’est pas si mal …

Last but not least, dans le genre, j’ai appris la semaine dernière vers 21h30 sur France Inter que « Syracuse » était une chanson de Montand et Henri Salvador… Et on s’étonne que Dimey se soit noyé de chagrin préventif dans les réconforts vineux……

L’aculture avance à grands pas…

Une remise à niveau s’impose, il y a une école pour tous ces indigents de la chanson, le lycée qui ouvrait la page …

Le lycée Papillon

Pierre Barouh, lui, c’est là qu’il suit Paulette …

Mais le florilège de bourdes dans l’art de la reprise pourrait faire un ouvrage assez copieux  (Voir celui d’Alister) … Si vous en avez d’autres, partagez-les !

 

Norbert Gabriel

  • à noter que David Mac Neil a traduit « On bicyclette »  et pas « The bicyclette »  précision de Gilbert Laffaille qui signale aussi que la fiche Sacem indique « La bicyclette ». Sans doute parce que Bourvil chantait déjà « à bicyclette ».
  • (Mais Pierre Barouh dit toujours « à bicyclette »  dans une interview, il signale que le sens est différent, comme si on disait « le cheval » au lieu de « à cheval »…
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