Dans un moment de consternation musicale provoqué par une chose diffusée dans la plaie-liste d’une grande radio nationale, je me suis transporté toutes affaires cessantes vers mon rayon «Grande réserve», là, je peux piocher au hasard n’importe quoi dans les CD, il y en a un bon mètre, et ce que je vais extraire, c’est une écoute en boucle au moins 3 fois, dans l’ordre de la publication in extenso. Ce que je venais d’entendre dans la liste déplaisante, c’est un gloubiboulga informe de bruits divers que d’aucuns nomment « musique urbaine » parfait oxymore, il n’y a pas de musique et c’est pas urbain pour un demi sou. Donc en antidote et antidépresseur, je pioche, bingo, L’homme de la Mancha, et pour la X ème fois je m’émerveille de la grandiose Joan Diener dans Aldonza … C’est pour elle qu’un poète* a écrit: « Les chants désespérés sont les chants les plus beaux et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots. » Ici, c’est aussi un cri, une rage, un jaillissement fulminant d’une sorcière comme les autres, en pire, si j’ose dire. Après ça, m’est venue l’idée d’une introspection dans mes références de quelques grandes divas du spectacle chanson, en voici quelques unes qui à différents degrés, m’ont éclaté le cœur .. et comme Diane je me dis parfois que j’ai choisi d’habiter le monde de mon imagination… Ou plutôt, essayer … Avec ,
Joan Diener Julia Migenes Billie Holiday Diane Dufresne Elisabeth Wiener
et la vraie chanteuse de jazz, Elisabeth Caumont
Honneur à Aldonza
Puis Julia Migenes dans la « seguedilla » de Carmen
et pour la perfection vocale Maria Callas
Diane Dufresne dans 3 versions du Parc Belmont
Parc Belmont ( cirque)
Le parc belmont classique
Billie Holiday
Elisabeth Wiener, l’incestueuse frangine d’Higelin, d’abord dans « Vies à vies » puis pour l’image, et le reste, « Attentat à la pudeur ».
Tiens, je vois Francofolies sur France 2, dans le réflexe de l’âne qui se gratte, je clique France 2, avec dix minutes de retard, j’ai raté le début, et là, je vois une créature qui répète djadja en boucle, et agite son fessier généreux vers la foule qui braille… Me serais-je fourvoyé sur une chaine putassière qui réduit la chanson à des paroles d’une indigence abyssale avec une « artiste » qui met son talent dans ses fesses ? De plus, si j’étais vraiment malengroin, je dirais que ce talent est loin d’être proportionnel au volume du popotin, ce qui est assez déplacé, j’en conviens, mais est-il bien placé de représenter le plus grand festival de chanson francophone par ce genre d’artiste dont l’argument se tient dans le décolleté ou dans le mini short ?
Je viens d’un temps largement révolu où une voix, une musique dans la TSF (la version quasi paléolitique du Iphone) me mettait en transe, sans rien savoir de l’artiste, et noter ensuite le nom en phonétique pour aller chez un disquaire, un de ces métiers de l’ancien monde, chez un homme de l’art à qui on n’avait pas besoin de préciser que Michèle Bernard est une fille, et que Sylvestre s’écrit avec un « Y » (expérience vécue personnellement) … Je me vois mal faire la même chose avec ce que j’ai vu et entendu de Aya Nakamura, la description pourrait laisser croire que je m’étais égaré sur une chaine qui fait de la chanson comme on fait de la prostitution soft ..
Et pour m’achever totalement, les plans de coupe sur le public montrent une foule de jeunes femmes avec les mains levées et un smartphone au bout … On s’est donc déplacé au concert, acheté un billet pour faire des vidéos pourries au son inaudible, à part les hurlements des voisines en épectase avancée… Est-ce bien raisonnable ?
Après ça, c’est dans les 70 mn d’extraits de concerts surboostés, comme un diner dans lequel tous les plats seraient surchargés de mayonnaise, avec en dessert un gros gâteau dégoulinant de crème au beurre… ça gave, ça écoeure, ça sature, c’est gros-gras-indigeste … On est très très loin des envolées poético-oniriques d’Higelin, et des fêtes à … qui étaient des vraies rencontres, des partages et des découvertes, ou des quasi vieillards chenus et des gisquettes de 25 ans chantaient en choeur Mon amant de St Jean, aujourd’hui pour l’essentiel du public St JA, quand on cite Jean-Louis, c’est pas à Foulquier qu’ils pensent mais à Aubert … Et ce, sur l’esplanade rebaptisée Jean-Louis Foulquier…
Pour ceux qui ont oublié les grandes heures, une Fête à … c’était inviter autour d’une tête d’affiche des artistes amis plus ou moins connus mais choisis sur des critères d’affinités, pas de marketing.
Exemple, je dis n’importe quoi, Anne Sylvestre on lui offre pour sa fête, Michèle Bernard, Agnès Bihl, Christian Camerlinck, Paule-Andrée Cassidy, Céline Faucher, Yves Jamait, Bernard Joyet, Gérard Morel, Marie-Thérèse Orain, Francesca Solleville … oui, je dis n’importe quoi, mais par ordre alphabétique… Quoi que … ça a existé ce genre de fête à Anne Sysvestre, la preuve, au Quesnoy en Chanteurs
J’ai laissé la télé en fond sonore, en bouquinant, j’avais l’impression d’entendre un genre de FuNrj radio, le seul moment où ça m’a attiré l’oreille, c’est quand Bruel est revenu, c’était la fin. Si ce montage d’extraits est censé représenter la chanson d’aujourd’hui, je ne suis plus du tout en phase avec ces Francofolies… Pour faire court, deux chansons par invité, et à chaque fois la transe du public plein régime, on peut survivre à ces 90 mn d’agitations survoltées ?
Alors qu’il y avait plein de spectacles novateurs, créatifs, à La Coursive, c’est là que les « anciens » celles et ceux qui ont connu les Francos dans les années 85-2004, s’y retrouvent, c’est consternant ce que la télé a montré.
Et cerise sur le gâteau gâté, la télé fait de la pub mensongère en annonçant Bertrand Belin et Aubert, qui ne sont présent pas dans cette émission.
En 2019, les têtes d’affiche des Francofolies de La Rochelle sont Zazie, Soprano, The Blaze, Chris, Angèle, Aya Nakamura, Bertrand Belin ainsi que Jean-Louis Aubert.
On disait naguère que les Directeurs Artistiques avaient été remplacés par des directeurs de marketing, experts dans la promo des yaourts, ça semble se confirmer avec ce genre d’émission qui fait le choix délibéré de promouvoir le produit de grande consommation, au détriment de l’artisanat haute couture, et le MacDo ketpchup à la place de l’épicerie fine… Pour les découvertes, vous êtes priés de vous égarer à La Coursive totalement ignorée dans ce best of du fats foods … j’ai bien dit « fat » autant dans le sens anglais que français … Ou bien aller dans tous les festivals ignorés par la presse généraliste, c’est là qu’on trouve des pépites.
* désastritude : sentiment mélangé de désespérance et de solitude face à un désastre plus ou moins annoncé et en cours de vérification.. Exemple vécu : un ours blanc sur un fragment de banquise qui dérive inexorablement vers l’Equateur. Je me sens ours blanc en perdition.
North Bear Gabriel
Et puisque tout devrait finir par des chansons, un peu de ces choses qui (me) font du bien …
Au bal des ombres et du mystère Laissez la chanson vous guider dans des vallées imaginaires dont vous n’avez jamais rêvé.
Il se murmure que les Castafiore Bazooka pourraient reprendre la route des quatre chansons, on n’est jamais à l’abri d’une bonne nouvelle. Une piqûre de rappel s’impose.
La Manufacture Chanson le 20 Avril 2012
Elisabeth Wiener revient en Callas Nikoff, une bande de filles qui ont dû avoir sur leurs berceaux quelques bonnes fées, modèle Tex Avery mixé avec Cab Calloway dans un de ses meilleurs jours. Lesquelles fées ont été généreuses, et ont rivalisé de fantaisie débridée en dotant ces demoiselles de talents multiples façon Frégoli, déesses ou clowns, divas dingues ou sirènes enchanteresses, ça fuse dans tous les sens, mais surtout les bons sens, ceux des délires musicaux panachés de blues gospel ou slam verlan, le kaléïdoscope tourne et embarque dans le manège les passants éblouis. Totalement séduits.
Elisabeth Wiener est une récidiviste de la musique en groupes multiformes, elle a toujours eu le jeu collectif, parfois des albums solos et des compositions magistrales, et souvent des aventures en troupe protéïforme. Pour rester dans la lignée d’où vient Callas Nikoff, il y a eu le mythique Castafiore Bazooka, sextet vocal puis quintette à géométrie variable, mais toujours dans un foisonnement créatif scénique exceptionnel. Avec des partenaires qui n’ont pour seule limite que la volonté de ne pas avoir de limite.
C’est une sorte de sarabande mi Helzappopin, mi Alice au pays des merveilles, dans laquelle l’improbable est la logique normale. C’est joyeux, impertinent, percutant, car dans ce con-cert, on conjugue quelques considérations relatives à la connerie et aux cons en général, voire les con-sommateurs… Prescrivons donc à titre préventif, en cure anti-connerie et anti-morosité une soirée avec ces inter-générationnelles rebelles songs !
Cookie Demaia, Ophélia Bard, Pascale Valenta, Shaïda Kazemi, Elisabeth Wiener
Avec des compositions nouvelles spécifiques Callas Nikoff, on retrouve deux titres des Castafiore « Mec chelou » et « Kyrie beguine« , ça n’a pas vieilli, et puis cette chanson tendre et sensible d’Elisabeth Wiener « Tu me manques » (Pouëtesse)** Les jeux de lumières très élaborés dessinent à chaque scène un décor personnalisé pour un spectacle total formidablement tonique. Et les heureux spectateurs ayant assisté au concert peuvent avoir un souvenir musical, (ou deux) avec un disque « fait main »* disponible pour quelques euros à la sortie, avec le sourire des chanteuses en supplément gratuit. Autant de raisons de suivre les Callas Nikoff, c’est là: http://www.callasnikoff.com/
* pour le « fait main », 3000 privilégiés avaient eu le premier album des Castafiore Bazooka, boite entièrement faite à la main par ces dames, avec le livret « accordéon » peint par Ricardo Mosner, que voici, avec un conseil utile pour les distraits …
Norbert Gabriel
** « Pouëtesse » cette pure merveille figure sur le CD « Elisa et la Beth » avec 10 autres chansons de sa composition, et une ou deux en collaboration. Chaque album montre le talent d’auteur exceptionnel d’Elisabeth Wiener, elle passe par toutes les nuances des émotions pour chanter la vie, amoureuse, baroque, foutraque, sensible, la vie, quoi !
« Je suis une flèche sans cible mais trop sensible
le moindre souffle de vent
me fait dévier d’un but d’ailleurs inexistant
Sans cible sans but ma vie est toute nue
Et le retour de la sémillante Luna Mosner, si c’est pas une bonne nouvelle, ça …