
C’est à Volvic que débute ce septième jour des Rencontres, au Centre culturel La Source, avec une lecture théâtralisée : L’insoumise, de Robert Poudérou, pièce jouée pour la première fois en France, par la Compagnie du valet de cœur, avec Agnès Courmont, Marie-Françoise Savary, Hervé Moreul, et Jean-Yves Lenoir, lecture accompagnée au basson par Pierre-Alain Bégou, et au violoncelle par Gilles Chaldeyrou, musique qui souligne les moments sombres de cette histoire.
C’est la vie de Flora Tristan qui se déroule, Flora Tristan, militante engagée pour les droits des femmes et des ouvriers, qui a participé aux premiers pas de l’internationalisme, a eu une vie compliquée, elle note dans son livre, Pérégrinations d’une paria : Mon enfance heureuse s’acheva, à quatre ans et demi, à la mort de mon père.
Son père n’ayant pas régularisé son mariage, elle était fille illégitime, et les difficultés financières, et sa mère l’ont poussée à épouser son employeur, Antoine Chazal, graveur, chez qui elle était coloriste, à 17 ans, un homme jaloux, violent et médiocre, qui va jusqu’à lui proposer de se prostituer pour amener de l’argent au foyer. Fille rejetée, mère battue et humiliée, elle quitte le domicile conjugal, avec ses deux enfants, Antoine Chazal la harcèle alors, et va jusqu’à lui tirer une balle dans le dos qui lui perfore un poumon. Le procès se déroule, et malgré le zèle du jeune avocat qui défend Antoine Chazal, Flora Tristan garde la tête haute pour se défendre, et son mari est condamné à vingt ans de prison.
Son voyage au Pérou pour essayer de se faire reconnaître par sa famille paternelle est un échec, elle écrit alors plusieurs livre, et entame un tour de France en 1843 pour rencontrer les ouvriers pour éveiller les consciences et les pousser à se rassembler :
Ouvriers, ouvrières, comptez-vous, pris un à un, vous n’êtes rien sinon qu’un grain de poussière broyé sous la grande roue. Mais rassemblez-vous. Unissez-vous. Vous êtes 5 millions, 5 millions c’est une force. «
Flora Tristan s’est battue pour le droit au divorce et l’égalité sociale avec les hommes, elle est considérée comme une des premières féministes, elle a eu à se battre pour elle même, et a mis sa propre expérience au service des autres : Vous ne serez jamais des hommes libres tant que les femmes ne seront pas libres.

Photo Martine Fargeix
Nous arrivons à la fabuleuse soirée carte blanche à Frédéric Bobin : Fred Folk, toujours au Centre culturel La Source. Il n’y a que des guitares folk sur la scène, une contrebasse. C’est seul avec sa guitare que Frédéric attaque avec la chanson éponyme de son dernier album : Les larmes d’or, puis L’auto-radio de mon père. Frédéric, après les remerciements à On connaît la chanson, nous annonce une soirée unique, éphémère, avec ses trois invités, autour du folk, visiblement ravis de partager cette soirée avec un public ami , il nous dit son attachement à l’Auvergne, et aux Rencontres Marc Robine : On me demande souvent quelles sont mes influences musicales, elles sont à la fois françaises, Brassens, Ferré, Barbara, Félix Leclerc… Et elles viennent aussi des pionniers du folk, Pete Seeger et Woody Guthrie, Bob Dylan, Léonard Cohen, etc…

Photo Martine Fargeix
Et c’est sa vie en Super 8 , Jimmy. Puis Frédéric Bobin nous présente son premier invité Mikael Cointepas, que l’on sait contrebassiste, et que l’on découvre chanteur, il met en musique des poèmes anglophones, comme celui d’Emily Dickinson, poétesse américaine :
Le courage ne se crie pas toujours. Parfois il est la petite voix qui te chuchote à la fin de la journée, j’essaierai encore demain…
Après quelques chansons de Frédéric Bobin, Le soir tombe, Musiques Musique blessée, Jimmy, une référence à Times they are a changing de Dylan dans La pyramide, c’est Pierre Delorme, deuxième invité de Frédéric Bobin, qui entre en scène : Pierre, c’est à toi, dit simplement Frédéric Bobin. Pour présenter Pierre Delorme, qui ne fait pas la une des gazettes, je crois, non je pense, que c’est son ami Floréal Melgar qui en parle le mieux :

Photo Martine Fargeix
Diction parfaite, paroles à tout instant compréhensibles, et tout ce qu’on attend de l’attention et du respect qu’un artiste porte à son public. Et quand la beauté des textes et des mélodies s’y ajoute, que demander de plus ?
Pierre Delorme, 9 albums à son actif, des textes subtils, des chansons poétiques, humaines, avec des mots simples, qui touchent en plein cœur, des mélodies taillées sur mesure, c’est toute une vie consacrée à la chanson, à la musique, une voix profonde, le geste sobre.
D’ailleurs, j’ai appris par lui qu’on pouvait tomber amoureux d’une musique, d’une chanson, voire d’une rivière, Un jour, j’ai entendu une émission à la radio, dans laquelle Georges Brassens expliquait qu’il pouvait rester pendant des jours amoureux d’une musique. J’ai donc compris qu’on avait le droit d’être amoureux d’une chanson, sans être ridicule, puisque Georges Brassens lui-même n’avait pas peur d’affirmer qu’il l’était parfois. Donc, je peux affirmer moi-même que je suis amoureuse des chansons de Pierre Delorme, même si je ne sais pas trop expliquer pourquoi, et j’ai été si heureuse qu’il interprète ses chansons ce mardi soir, merci à Frédéric Bobin de l’avoir invité à sa carte blanche !
Pierre Delorme a chanté ses propres chansons, Si l’amour existe, et une nouvelle qui pourrait s’intituler : Je suis comme tout le monde, et There but for Fortune, de Phil Ochs (chanson popularisée par Joan Baez) avec Frédéric Bobin, ou encore Léonard Cohen , adapté par Graeme Allwright : Demain sera bien, et deux chansons de Townes Van Zandt : avec Vincent Dupuis, le troisième invité de Frédéric Bobin, à l’harmonica, Si je t’appelais, et Marie.
Frédéric a interprété la chanson qui lui a fait découvrir Pierre Delorme : Je lisais dans ma chambre, puis Le dernier voyage de Sindbad…
Après une pause bavardage et boissons, les recettes du bar allant à l’école de musique de Volvic, une deuxième partie de Fred Folk, les chansons se suivent, les guitares claquent, et tout s’enchaîne dans une folle ambiance, Frédéric Bobin et Pierre Delorme chantent ensemble La Manic de Georges Dor, un travailleur sur le barrage de la rivière Manicouagan, s’ennuie, et écrit à son amie :
Si tu savais comme on s’ennuie
A la Manic
Tu m’écrirais bien plus souvent
A la Manicouagan… La fille du nord, La complainte du Partisan, Blowing in the wind,, en alternance avec d’autres chansons de Frédéric, La maison de mon grand-père, Joe de Georgie, Y’a plus de travail dans ton champ de coton / On te fait GI, que tu le veuilles ou non / On te sort de ton trou quand le drapeau rugit / Ou bien tu mendies et tu mets les bouts… Singapour, Où je vais de Tom Paxton , chant de vagabond, chantée aussi par Johnny Cash, entre autres, Frédéric nous raconte l’histoire de ses chansons, et c’est à la demande d’Alain Vannaire, qu’il a chanté une chanson de Marc Robine, qui fait écho à sa chanson Singapour, Les aciéries :
Tout au nord du quartier ouest
Abritées par de hauts murs gris
Il y a les aciéries
Ou plutôt ce qu’il en reste
Car on ne voit plus de fumée
Au-dessus des cheminées
Plus de rumeurs de machines
Dans les couloirs de l’usine
{Refrain:}
Et les seuls bruits que j’entends
Ce sont les longues plaintes du vent
Qui se cogne dans le soir
Contre les murs sans mémoire . ..

Fred Folk et Cie. Photo Martine Fargeix
Standing ovation pour ces quatre artistes, et plusieurs rappels. Pierre Delorme a chanté At home , chanson de son album ça ira bien comme ça, et tous les quatre descendent vers le public, on termine par Le premier homme de Frédéric Bobin :
J’adorais le veau d’or, tous les chemins faciles / Les retours aux aurores avec des filles faciles / Je suivais les cadors, les idoles de la ville / Et leur voix de stentor, leurs sirènes futiles / Et puis, tu es venue dans mon capharnaüm / T’as mis mon cœur à nu, je me sens comme le premier homme…
Superbe soirée folk dont on se souviendra longtemps, sous le regard de papier de Marc Robine, qui peut être fier de sa descendance musicale.
Je vous parlerai demain de la journée d’hier, la balade volvicoise, ville d’eau et de pierre, le concert Afunalhue, chansons d’Amérique latine, et concert de Baptiste W.Hamon, prix Marc Robine 2019.
Danièle Sala
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