Elle est facile celle-là vous me direz. Eh bien non, figurez-vous ! Parce que lire « L’aide à l’emploi » n’est pas si simple. Sauf si vous êtes… barré. Dans ce cas, ça coule de source.
Pierre Barrault cherche un emploi. Ou non. Pas aisé de le définir. Ce qui est certain, c’est qu’il a trop lu Ionesco et trop regardé les Monty Python. Pour cette raison, Barrault – ou plutôt son héros Artalbur – ouvre des portes depuis chez lui qui le mènent ailleurs. Ou pas. Grimpe dans des bus qui le transportent où il faut. Ou pas. Au restaurant, chez son médecin, dans un magasin. Artalbur se fait écraser. Souvent. Parce qu’il a l’intestin trop long ; enfin je crois. Il rencontre aussi énormément son conseiller d’aide à l’emploi qui ne l’aide pas beaucoup. Un conseiller qui lui téléphone chaque matin. Qui lui propose un poste dans une société, laquelle vend des démons en bois à trois yeux. Mais pour se faire engager, il faut impérativement se faire greffer un troisième œil. C’est un peu contraignant. Son conseiller lui dit de toquer à plein de portes, d’essayer, même s’il n’a pas le profil, au cas où, on ne sait jamais… Mais même s’il se prend les pieds dans son intestin, Artalbur ne veut pas bosser à tout prix. Il ne veut pas bosser en vérité. Des hommes avec des mallettes en cuir critiquent notre chômeur ne-sachant-pas-chômer avant que la bise soit venue. Parce que les hommes avec des mallettes en cuir sont des gens sérieux, eux.
Artalbur dort, mange, fait couler des bains et du café. Il cherche une sortie, une issue dans le labyrinthe de la recherche d’emploi. Dans une société menteuse, violente, absurde. Car, dans le monde d’Artalbur, on peut être radié si on refuse l’installation de lapins rouges dans son salon. Le conseiller conseille tout et n’importe quoi, mais pense qu’ils vont s’en sortir. Tous les deux. Comment ? Aucune idée. Car dans l’univers fantasque et cruel d’Artalbur, les humains sont des baudruches, des déchets qui font semblant d’être libres. Tous vivent sous le règne de Cron où (à force de ne pas traverser assez de rues) on vous pose des bracelets électroniques. Car ne pas travailler offre la liberté. Cela déstabilise Cron et le système. Et ceci est une vraie folie.
Alors ne croyez pas que j’ai pu vous résumer « L’aide à l’emploi » du barré Barrault…
Si vous ouvrez ses pages, soit vous jetterez le bouquin au loin, au bout de 60 lignes. Soit vous serez absorbé par l’écriture folle et hallucinée de cet auteur. Vous vous laisserez porter par les courants contraires d’une écriture désaxée. Le sourire aux lèvres et l’angoisse au fond du ventre. A l’écart de toute logique.
Mais voilà. S’il y avait une logique dans la recherche d’emploi, ça se saurait !
« L’aide à l’emploi ». Pierre Barrault. Editions Louise Bottu
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Fabienne Desseux