Deuxième salve..
Avant de revenir dans la salle, faisons un passage sur la scène, car nos amis les artistes méritent aussi (et surtout) qu’on s’intéresse à leur cas, car si on s’aventure dans des salles de spectacle, c’est d’abord pour eux, sauf quelques rares exceptions de spectateurs égarés dans un lieu où ils ne soupçonnaient pas qu’on y chantât…
Parce que l’activité primordiale est le verre et la fourchette, voir chapitre précédent.
C’est là ————————————->
Ordoncques, qui aime bien chatouille bien, c’est parti pour quelques grincheries de saison… Quoi que, les saisons y en a plus, ou alors il y a toujours une raison de gronchonner. Commençons par le début, le début théorique du spectacle. Le public est bien installé, noir dans la salle, un temps variable s’écoule -très lentement- et quelqu’un apparaît sur scène car il y a un peu de lumière. Là, au milieu, il y a un … micro ??? Ça alors !! Et s’il était branché ? On sait jamais, va falloir le mettre à la bonne hauteur, c’est pas facile, un salopard a serré ce truc, mais, gnnnniii, ayé il est réglable, faut le mettre à la bonne hauteur, la bouche par exemple, c’est mieux, on le tapote un peu, pour voir, des fois ça marche tout de suite… Et si l’artiste a une guitare, il faut farfouiller par terre pour trouver un fil qui, miracle, se branche sur la guitare. Devant ce prodige inespéré, l’artiste se dit in petto, et si j’en poussais une ?? Mais avant, juste pour savoir, au cas où, il pousse son cri à la cantonnade : « Est-ce que vous êtes là ? » C’est fou, non ? C’est pas comme s’il y avait eu des affiches à son nom, avec la date, l’adresse du lieu et l’heure, tout ça… Dans ce cas là, moi qui trouve toujours la réplique qui tue un jour après, me vient une réponse à la Bigard :
- Bin non connard je suis chez le maraîcher du coin et j’achète des salsifis de Pierre-Bénite… (bio, les salsifis ..)
Toutefois, il y a des spectateurs moins malengroins qui répondent poliment : « OUIIIIIIII » ce serait marrant qu’ils gueulent « NON » sur l’air des lampions… (ou une variante de « la pêche aux moules » en lambada gaélique) Et enfin, ça va commencer. J’ai déjà le sentiment d’avoir perdu 3 heures, en quelques minutes… Après c’est selon, parfois ça se passe bien … Mais pas toujours, il arrive, par quelque satanique inspiration que nous soit balancé entre deux chansons, « est-ce que vous êtes chauds ? » Ou mieux, « est-ce que vous êtes toujours là ? » Y a comme un doute de l’artiste sur sa prestation, c’est clair !
C’est à ce moment que je lorgne sur l’itinéraire d’évasion pour partir le plus vite possible, ce qui se passe bien, ayant pris la précaution de me placer plutôt dans le fond, ou sur les côtés… C’est plus discret.
Qu’on ne vienne pas objecter que la technique a des impératifs et gna gna gna… Pour mémoire, lors du Marathon de la chanson, 42 artistes en scène pour 8 mn chacun, soit 336 mn en 3 sets, même pas 8 mn de dépassement, sans un temps mort, chaque artiste arrivait en scène, prêt à chanter en 5 secondes, le temps d’atteindre le micro. Si vous cherchez des conseils dans ce domaine, demandez à Xavier Lacouture. Ou à Lili Cros et Thierry Chazelle… ou Pierre Margot… Enfin tous ceux qui font un spectacle dans lequel on est capté dans les 3 secondes après le noir de la salle, et qui se termine après un enchantement qui a semblé très court.
Et puis, et puis, parfois il y a des reprises qui plongent l’auditeur dans des abysses de perplexitude, on découvre, on se dit qu’il doit y avoir une intention secrète, un message codé, quelque chose de subliminal … Et puis non, c’est juste un re-création alacon, dans laquelle on a émasculé la mélodie originale pour mettre sa couleur musicale, ce qui revient le plus souvent à remplacer un Van Gogh par un graffiti d’écolier avec 3 couleurs de gouache… Sans oublier les paroles mal comprises, mais chantées très fort ad libitum. Quelques beaux assassinats, gravés sur disque par dessus le marché, font douter sérieusement du bien fondé de la chose et de la prétendue admiration pour le malheureux « hommagé » endommagé. Souvenir douloureux , en scène, d’une « Etrangère » dont la version tenait plus d’un pastiche raté que d’un hommage. Ou « Ma môme » quand un mot changé transforme la chanson tendre en grasse gaudriole gauloise de fin de banquet dipsomane. Sans oublier, « Ma mie de grâce ne mettons / pas sous la gorge à Cupidon/ sa propre flèche» qui devient « Maman de grâce … » Lapsus freudien ? La liste est longue, et tellement déprimante que je vous l’épargne, je ne suis pas si salopiot finalement.
N’allez pas penser que ma vie de spectateur est un enfer quotidien, ce serait même plutôt le contraire, n’empêche que parfois, ça gave grave. Et ça donne des idées de… non rien.
NB : pour les étrangers au pays lyonnais, Pierre-Bénite est une ville au bord du Rhône, tout près de Lyon, zone maraîchère importante jusqu’aux années 70. Et accessoirement communiste de la naissance du communisme à l’an 2000 (en gros). Outre les salsifis (bios), qu’on y trouve, c’est là qu’est née la cerise Burlat.
NB 2 : je pars presque toujours dès la fin du spectacle, mais pas toujours pour les raisons ci-dessus. Qu’on ne se méprenne pas.
Calamity John
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