Archive | 23 h 57 min

Eric Frasiak à l’Arthé Café

18 Déc

Photos Martine Fargeix

Salle bondée, chaude ambiance pour accueillir Eric Frasiak et son pianiste Benoît Dangien, ce dimanche soir à l’Arthé Café. Encore une première fois sur scène pour moi, et j’ai compris pourquoi il y avait tant de fans dans la salle.

En noir et gilet noir et rouge, avec son chapeau noir de San Francisco sous lequel bout une marmite de blues man contestataire et humaniste, avec son pianiste, en noir, casquette, lunettes et moustache assorties, pianiste aux multiples talents, chanteur et joueur de mélodica,  Eric est à la guitare, et la boite à rythme est chinoise, vu la scène un peu juste ! Il attaque avec Sous mon chapeau :

Sous mon chapeau, y’a tous ces vers qui prennent leur pied / A me bousculer les neurones / Qu’écrivent des trucs qui font chialer / Ou qui gueulent dans l’vent des cyclones / C’est pour pas qu’mes idées s’envolent / Qu’elles partent trop tôt / Que j’les garde au chaud, ces belles babioles / Sous mon chapeau…

Il chante surtout les chansons de son dernier album, le 7ème : Sous mon chapeau, en se racontant entre chaque chanson, et ça l’agace vraiment ce Z à son nom, tant qu’il en a fait une chanson :

Mais qu’est-ce que j’leur ai fait à tous 
Journaux, radios, télévisions 
Pour qu’à chaque fois sous ma frimousse 
Y’a ce Z qui m’file des boutons 
C’est pas comme un meuble IKEA 
ça s’écrit sans complications 
Juste F-R-A-S-I-A-K 

Il ne sera pas question de François Béranger ce soir, non pas qu’Eric Frasiak ait tué son père spirituel, mais il en est la réincarnation, François Béranger a dit : Chanter, c’est pas vivre mais l’espérer. Chanter, c’est survivre quand on est vidé.  Eric Frasiak a tout hérité de lui, la tendresse, l’humour, l’amour, la révolte contre les injustices et la bêtise humaine, un regard lucide sur l’actualité, et l’espoir malgré tout, il nous donne l’humanité en partage, avec tous ses travers, peintre  bouleversant d’une société à la dérive, il trempe sa plume dans tous les encriers de la vie, le noir quand toute la France est plongée dans l’horreur des attentats de Charlie Hebdo :

Je suis humain :

Il n’y a qu’une seule cartouche d’encre noire / Dans mon stylo désarmé / Juste une plume trempée d’espoir / D’un monde de fraternité.

Une encre d’eau qui pleure, pour un bouleversant hommage à Barbara Weldens :

La vie, la rage
C’est face où pile
De l’eau qui pleure
Sur le pavé
C’est le bonheur
Qui s’est taillé

Comme un éclair
Un courant d’air
Coup de tonnerre
L’amour par terre .

L’encre des yeux de son père, un polonais taiseux, sur le jardin abandonné, Le jardin de papa :

Si tu voyais l’jardin dans l’état
ça t’f’rait comme du chagrin, du tracas
Une des graines que t’as s’mé c’était moi
Et tu vas lui manquer, mon papa.

L’encre bleue des mers, passages pour les migrants qui tentent de survivre :

Je n’ai plus de terre
Plus aucun chez moi
Sous le feu, la guerre
Fous de Dieu et soldats
Je n’ai plus de terre
Que ce rêve là
Au bout de la mer
L’île de Lampedusa…

L’encre bleue de la tendresse, quand il chante : Je t’écris :

Je t’écris ces mots de silence
Pour que ces rimes parlent à tes sens
Parce que se taire en dit parfois
Plus que la grammaire à nos voix.

L’encre grise de la nostalgie du grand Est dont il est originaire, Charleville-Mézières, des cheminées des hauts fourneaux de l’est qui dorment dans un silence  qui peut être définitif, où l’on ne voit plus guère Monsieur Boulot, et pourtant :

On t’aimait bien dans le quartier 
On comptait tous un peu sur toi 
Pour la bagnole , pour le loyer 
Pour boucler la fin des douze mois 
Mais quand on t’vois à la télé 
Prendre la pause et faire le beau 
On s’dit qu’le fric t’a bien changé 
Pourtant tu m’manque M. Boulot

L’encre blues de sa ville d’adoption :

Barle-Duc City Blues :

C’est pas New York USA de Gainsbourg 
Ni la ville rose de Nougaro, Toulouse 
C’est pas Paris au mois d’mai d’Aznavour 
Mais c’est ma chanson, BAR LE DUC City Blues …

J’ai atterri là par hasard 
A une consonne des parisiens 
Parce qu’il faut bien vivr’ quelque part 
Et qu’ici c’était sur mon chemin 
J’ai pas dit qu’c’était l’amour fou 
C’est pas non plus la terre promise 
Mais quand j’reviens de je n’sais ou 

C’est là que j’pose mes valises

Mais c’est chez moi, BAR LE DUC City Blues.

L’encre blues des fonds de verres :

J’ traîne mon folk au fond des bars
Pour des loulous qui pensent qu’à boire…

  J’traîne mes mélodies , mes accords
Pour dire aux cons qu’j’suis pas d’accord
Pour moi aussi dans cette histoire
Semer ma p’tite graine d’ananar 

J’traîne mon blues à Bar Le Duc
Où c’est là qu’j’écris tous ces trucs
Qui m’emmèneront un peu partout
Simplement pour être avec vous.

L’encre en Technicolor de Noël :

Comme le beau sapin, j’ai les boules
Quand j’vois ces cadeaux de maboul
Qui par milliers finiront d’main
Sur E Bay ou sur le Bon Coin
Même le p’tit jésus dans sa crèche
Lui, qu’est plutôt né dans la dèche
Se dit qu’des ânes et puis des bœufs
Il en a fait beaucoup l ‘Bon Dieu.

L’encre couleur d’asphalte, le long des routes, au volant d’un 44 tonnes :

Dans mon bazar de 44 tonnes
Derrière mon volant, tout seul, peinard
Musique à fond, faut pas qu’je dorme
Long is the route for un bon plumard.

L’encre Tango de la jet’set :

C’est connaître Paris et dormir chez Hilton
Un string en haut des cuisses qu’a d’secret pour personne
C’est faire du cinéma sans réalisateur
C’est compter sur papa pour avoir son 4 heures
Au rendez-vous des snobs, pour la une de Gala :
« Ce soir avec ma robe, Porsche ou Testarossa. »

L’encre haut débit d’ADSL, pour les toqués d’internet :

Quand y’a une coupure internet 
C’est le monde entier qui s’arrête 
Les mots d’amour dans les modems 
Ca remplace pas les vrais « Je t’aime » 

J’t’avais même pas imaginé, 
T’étais pas né 

Puis une espèce hélas courante d’encre peu sympathique, celle là : Y’a pas d’danger qu’elle disparaisse, ça s’reproduit l’hiver, l’été, ça fait pas trop dans la finesse… Espèce de cons. Que l’on reprend à l’unisson.

L’encre amère du constat politique de notre pays :

Comme on compte pour des prunes faut nous lâcher la grappe
C’est jamais dans les urnes que le bonheur s’attrape

Mais l’encre pétillante de La poésie  reprend le dessus :

Ces p’tites pages de bonheur, un peu comme du Rimbaud 
Qu’on écrit dans nos cœurs sans rimes et sans dico 
Ces p’tits morceaux d’la vie, comme de la limonade 
Qui moussent et qui pétillent, ça mérite le Pléiade 
Les copains de nuits blanches qui passent à la maison 
Chanter quelques boutanches et vider des chansons 
Les histoires de ce mec vers les trois heures du mat’

 

De nombreux rappels, on tape dans les mains… Chacun à son rythme, comme nous le fait remarquer Eric Frasiak, et  après les traditionnelles dédicaces des albums, la fameuse soupe de Marc, suivie d’un repas pour une partie du public, Eric fait le tour des tables, parle avec les uns et les autres, et c’est un bonheur prolongé, en toute simplicité.

Encore une soirée mémorable, et l’on attend avec impatience le huitième album d’Eric Frasiak qui est en bonne voie.

Danièle Sala

Et pour quelques photos de plus,

 

Chez Frasiak, c’est là –>

Il y  a toutes les infos sur sa vie son oeuvre sa route ..  clic sur la borne.

Tio Brassens par Christina Rosmini…

18 Déc

Itinéraire d’une enfant de Brassens… c’est la petite princesse du croque notes qui a tricoté à son Tio Brassens un bel habit en patchwork de souvenirs reconnaissants et aimants pour ce tonton virtuel qui l’aidée à grandir pour devenir une femme citoyenne à part entière.

C’est une histoire où une famille déracinée a trouvé un lieu où faire sa vie. Et dans ce voyage intime de migrants espagnols, les chansons de Brassens ont forgé une identité française, celle de Voltaire, de Rabelais, Musset, Villon, de tous les poètes…  et s’il n’en restait qu’un, Hugo serait celui-là.

Si je devais illustrer par une image le patchwork tricoté par Christina, ce serait peut-être par un tableau de Klimt, une composition raffinée et élaborée suggérant toutes les nuances de l’âme humaine quand elle est humaniste. Tricoté, selon Christina Rosmini, avec toutes les paroles de Brassens, pas uniquement celles des chansons, et c’est là ce qui fait de spectacle un moment rare, c’est tout Brassens qu’on entend à travers Christina : l’archétype paternel solaire , universel, protecteur et émancipateur.

Il y a urgence, ce spectacle est à Paris pour deux jours encore, mardi 18 et mercredi 19, et que vous soyez fan de Brassens ou pas, c’est l’opportunité de découvrir « cette toute nouvelle création (-) un véritable hymne à la poésie et la joie avec cette pointe de truculence et d’humour propre au maître » . (Jean Dominique Rega Vaucluse matin)

Libération rappelle que ce spectacle a été récompensé par le Molière du meilleur spectacle musical en 2017. Et les amis de Georges lui ont remis le Grand Prix d’Interprétation Féminine 2018.

Last but not last, les émules de Django et les disciples de Crolla seront émus de retrouver dans les notes de Bruno Caviglia l’écho des guitares de Victor Apicella et de Barthélémy Rosso, ces tricoteurs de dentelles musicales qui soulignent avec finesse la griffe méditerranéenne que Christina Rosmini exalte avec bonheur et jubilation.

Du point de vue d’un vieux routier des spectacles qui doit bien avoir 30 à 40 spectacles Brassens au compteur, c’est une révélation et un bonheur rare de redécouvrir Brassens.

C’est ici que ça se passe pour tout savoir sur les créateurs de ce spectacle , et réserver,

clic sur la guitare.. → (une Favino-Brassens)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Norbert Gabriel

%d blogueurs aiment cette page :