Qui a peur de Pauline Julien ?

23 Nov

 Quand y a la mer et puis les chevaux 
Qui font des tours comme au ciné 
Mais qu’ dans tes bras, c’est bien plus beau 
Quand y a la mer et puis les chevaux 

Quand la raison n’a plus raison 
Et qu’ nos yeux jouent à s’ renverser 
Et qu’on n’ sait plus qui est l’ patron 
Quand la raison n’a plus raison… 

C’est par ces mots de Léo Ferré que Céline Faucher nous embarque dans l’univers de Pauline Julien qui avait interprété  cette chanson, dans les cabarets de la rive gauche, à Paris, dans les années cinquante, elle chantait Ferré, mais aussi Brecht,  Boris Vian, puis son répertoire s’est enrichi, avec Charles Trenet, Aznavour, Gainsbourg, Brel, ou Montand. Céline Faucher raconte Pauline Julien entre deux chansons, nous dit que c’est elle qui lui a donné le goût de l’indépendance, de la liberté, elles ont la même force et la même tendresse, le même humour, le même amour de l’autre, les mêmes engagements, le même amour de la vie, et l’une et l’autre, pour rassembler les humains, elles chantent, la chanson, c’est leur vie, Quand Pauline Julien n’a plus pu chanter, elle a préféré partir, le 1er octobre 1998, et ça fait plus de trente ans que Céline Faucher chante, et raconte les gens de son pays, et aussi Anne Sylvestre, et bien d’autres. Mais c’est le répertoire de Pauline Julien qu’elle a le plus exploré,  fait connaître, défendu avec fougue et tendresse, et colporté sur les routes du Québec et de France.

Tout au long de la soirée, on redécouvre les plus belles chansons du répertoire francophone, certaines un peu oubliées,  mais épatantes, Bilbao song, de Brecht, adapté par Boris Vian, La chanson du capitalisme, Je ne peux pas rentrer chez moi, d’Aznavour, Une noix de Charles Trenet, La chanson de Prévert, On oublie rien de Brel, et bien sûr Anne Sylvestre, dans la deuxième partie de soirée.  Pauline Julien a dit : Je n’ai aucun problème à chanter Anne Sylvestre au Québec, parce qu’elle parle comme moi.

En 1957, Pauline Julien rentre au Québec, après avoir fait découvrir des chanteurs français, elle défend la nouvelle chanson québécoise comme Félix Leclerc, Gilles Vigneault, Calvé, Léveillée, Blanchet,  Ferland, Georges Dor, etc…

Puis elle se partage entre le Québec et la France, et c’est en 1962 qu’elle sort son premier disque Enfin. Parmi les chansons de ce premier disque, Céline Faucher nous chante La marquise coton, J’entends, j’entends, d’Aragon et Ferrat.  Jack Monoloy, de Gilles Vigneault,  l’interprétation de cette chanson lui vaudra le second prix au festival de Sopot, en Pologne, en 1964 ,  La chanson de Prévert, de Gainsbourg, Quand l’amour est mort de Bécaud et Delanoë,  ou encore On oublie rien de Brel et Gérard Jouannest.  Et c’est en 1968 qu’elle commence à écrire ses propres textes.

Et ce sont surtout des chansons québécoises, qu’elle ira chanter en Russie, au printemps 1967, comme Les gens de mon pays, La Manic,  Jack Monoloy,  c’est significatif, révélateur d’une personnalité particulière qui exprime  l’universel, parmi une multitude de chansons, seules restent celles qui sont authentiques,  qui portent des témoignages de vie, de lutte, qui font vibrer en nous des émotions partagées, et durant toute sa vie, Pauline Julien a  été une combattante en chanson, de coups de gueule en sourires de tendresse, une insoumise se défendant de vouloir faire passer des messages, elle a chanté sa vérité,  interprétant des chansons d’auteurs progressistes qui lui ont donné ce goût de la liberté, et les siennes, combattante pour les droits des femmes, et pour les droits humains.  Emprisonnée pendant une semaine, en 1970, quand l’armée canadienne faisait la chasse aux indépendantistes, elle fait chanter les femmes en prison : Je ne chante pas la liberté qu’on nous donne, mais celle qu’on nous prend. Chanter, pour moi, c’est mon mode d’expression, c’est toute ma vie. . Et ce sont aussi les mots de Céline Faucher.

Le début de la carrière internationale de Pauline Julien est en 1969, avec des critiques dithyrambiques partout, sauf au Québec ! Qui a peur de Pauline Julien  ? C’est le nouveau spectacle de Céline Faucher.

Céline Faucher qui nous rapporte cette anecdote : Un jour que Pauline Julien chantait  La Manic à Toronto, en anglais, un spectateur s’est écrié, dans la salle : En français ! Ce à quoi elle a répondu, quand je vais chanter dans le monde, par respect,  je chante dans la langue du pays, à Toronto, je chante en anglais, au Québec, je chante en français.

Après une pause bavardage, une deuxième partie du spectacle, des chansons encore, au plus près de Pauline Julien, de ses combats et de ses rencontres. Bozo les culottes, de Raymond Lévesque :

Il a fait sauter un monument
À la mémoire des conquérants..


Bozo-les-culottes. Pour protéger les québécois.  Mais :

Quand on est de la race des pionniers
On est fait pour être oublié
Bozo-les-culottes.

Ne vous mariez pas les filles…  de Boris Vian :

Avez-vous vu un homme à poil 
Sortir soudain d’la salle de bains 
Dégoulinant par tous les poils 
Et la moustache pleine de chagrin ? 

Une version de Gilbert Langevin de Suzanne de Léonard Cohen,  l’Etranger, paroles de Pauline Julien, musique de Jacques Perron :

Croyez-vous qu’il soit possible d’inventer un monde
Où les hommes s’aiment entre eux
Croyez-vous qu’il soit possible d’inventer un monde
Où les hommes soient heureux
Croyez-vous qu’il soit possible d’inventer un monde
Un monde amoureux
Croyez-vous qu’il soit possible d’inventer un monde
Où il n’y aurait plus d’étranger

une interprétation bouleversante d’ Une sorcière comme les autres, d’Anne Sylvestre, sa sœur de cœur et de scène. Ensemble, en 1988, elles ont créé un spectacle de chanson théâtralisé devenu mythique, spectacle conçu et écrit par Denise Boucher, Anne Sylvestre et Pauline Julien : Gémeaux croisées.  Et pour la première fois, l’album du spectacle est réédité, un double album CD,  disponible là, clic sur l’album –>

Et pour clore ce parcours raconté et chanté d’une voix harmonieuse et profonde, qui colle impeccablement aux chansons de Pauline Julien, et magistralement accompagnée par un pianiste aux multiples talents, Patrick Laviosa, Céline Faucher nous a mis L’âme à la tendresse, une des plus belles chansons écrites par Pauline Julien, que les privilégiés présents ont repris en choeur :

Ce soir j’ai l’âme à la tendresse Tendre tendre, douce douce Ce soir j’ai l’âme à la tendresse Tendre tendre, douce douce Tresser avec vous ce lien et cette délicatesse Vous mes amis d’hier et d’aujourd’hui Cette amitié dans la continuité Un mot un regard un silence un sourire une lettre…

Après le repas convivial pris ensemble, on a continué à chanter. Maï a chanté sa Corse, accompagnée par Marc à la guitare, et par un guitariste-spectateur, d’autres ont chanté Montand, et  Les feuilles mortes, Reggiani, Le barbier de Belleville, Henri Genès, La tantina de Burgos,  Le général à vendre des Frères Jacques, et chaque fois qu’il y avait un trou de mémoire, c’est Patrick Laviosa, le pianiste, qui venait compléter, il nous a aussi chanté avec brio une chanson tyrolienne Le coucou de ma grand-mère, d’Andréani. Et Céline Faucher est revenue, à la demande générale, nous chanter Les gens de mon pays, de Gilles Vigneault.

Encore une soirée toute en amitié et en partage, comme savent nous en proposer Maï et Marc Usclade, à l’Arthé café. Un grand merci à eux, et à Céline Faucher, qui contribue à faire perdurer le souvenir de Pauline Julien,  artiste et femme d’exception, qui est aujourd’hui bien oubliée des médias.

C’est avec Jean-Paul Liégeois, auteur de livres sur la chanson, éditeur, et l’un des trois fondateurs d’Initiatives chansons, que Céline Faucher a construit ce spectacle, et la bonne nouvelle, c’est qu’il y aura une suite…

Danièle  Sala

L’actualité de Céline Faucher c’est là, clic sur le Racoon joyeux –>

Sy

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