Archive | octobre, 2018

Festival Musicalarue 2018 : entretien avec Shaka Ponk

30 Oct

Revenu faire la tournée des salles, puis des festivals d’été, après un moment d’absence consacré entre autres à la création du nouvel album « The Evol’ », Shaka Ponk était également présent à Luxey. Le groupe allait occuper la plus grande scène de la manifestation, pour y planter son décors personnel, avec projection d’images en trois dimensions et offrir au public un spectacle explosif pour les sens, digne de la tradition à laquelle il a habitué ses fans. Il ne serait cependant pas question de rejouer des scènes usitées à l’identique, comme on revisite un film classique déjà vu : c’est l’honneur de Shaka Ponk d’offrir un concert différent et original à chaque fois, qui témoigne de ce que les membres ont souhaité mettre dans l’actualité de leur création, y compris en évitant de jouer leur succès commerciaux, qui pourtant auraient facilement créé des moments fédérateurs. Du groupe, satisfait de pouvoir grâce au professionnalisme des équipes techniques, retranscrire le spectacle de leur tournée, fidèlement à ce qu’il imagina pour le Zénith parisien, et visiblement heureux de retrouver le public landais, six ans après sa précédente participation à Musicalarue, le chanteur Frah et le claviériste Steve acceptaient de nous accorder un entretien dans l’après-midi, au cours duquel ils purent également parler plus en détail de leur engagement pour l’environnement et la défense de la nature à travers le collectif qu’ils ont créé.

– Bonjour et merci de nous accorder ce moment. Votre album « The Evol’ » prend en considération un thème qui vous est cher, à savoir la question de l’évolution de l’espèce humaine, mais aussi du sort de notre planète, question que vous avez décidé de promouvoir aussi à travers votre collectif « Freaks ». Pouvez-vous nous en parler ?

– Frah : C’est un grand sujet, un grand débat. On a besoin de beaucoup de temps pour en parler. Mais en gros, on a lancé un collectif d’artistes qui se retrouvent autour de gestes simples et efficaces pour lutter contre la pollution et le réchauffement climatique, pour protéger la biodiversité. C’est un travail qu’on a mené en parallèle avec la création de ce disque et e spectacle, qui ne devait d’ailleurs pas forcément voir le jour maintenant. Mais à un moment il fallait y aller. On a travaillé pendant trois ans, entre la date qu’on a faite lors de la dernière tournée où on a été voir la Fondation pour la Nature et l’Homme [] et le moment où on l’a mis en ligne, un peu en sourdine en juillet, avec la FNH, l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’énergie) et des bêta-testeurs, pour décortiquer la journée d’un consommateur lambda et établir un théorème. Théorème qui est que si on change, nous les consommateurs, dans notre quotidien, certaines habitudes et certains comportements, uniquement dans notre vie privée, sans parler de travail professionnel, ni attendre que les politiques ou les industriels changent de rythme, on peut tout faire basculer. Ça a été un travail, car il fallait que ce soit vrai, et pas juste de la démagogie. C’était très long ; on a failli laisser tomber plein de fois, pour plusieurs raisons. Mais finalement le système était assez simple : on proposait des choses à la fondation ; quand elle nous validait l’idée, on la testait sur le terrain, voire si c’est quelque chose d’accessible, et si oui, on décidait de parler de ce geste. On a regroupé autour de nous des gens qui ont de gros réseaux. C’est pour ça que ce n’est pas un collectif pour le grand public : n’importe qui dans le grand public peut dire qu’il fait ci ou ça, ce qui ne signifie pas qu’il le fasse vraiment. En revanche si des gens connus parlent à leur followers en disant qu’ils ont cessé de manger de la viande ou d’utiliser des gobelets en plastiques ou des produits à usage unique, ou encore qu’ils sont passés sur un fournisseur d’accès écoresponsable, c’est tellement facile de vérifier si c’est vrai ou faux qu’ils seront obligés de le faire vraiment. Donc on s’est lancés dans un truc qui est selon les professionnels de l’écologie avec qui on a travaillé, une vraie nouvelle bonne solution pour faire changer la seule masse qui peut faire changer les choses : nous. C’est le début d’une histoire.

– Steve : Oui, c’est vraiment le début. C’est un challenge et personnel et collectif, parce qu’effectivement c’est intéressant de changer nos habitudes et de se refiler des combines : on est tous des pré-adolescents responsables d’une nouvelle façon de vivre. Tout ça, on le fait ensemble évidemment. On n’est pas égaux ; c’est difficile. Mais justement ce qui est cool c’est de pouvoir en parler et d’aller dans la même direction et avec la même envie. Le résultats viendra avec les efforts.

– Peut-on imaginer que votre engagement se concrétise sous forme de festivals organisés spécifiquement autour de cette thématique avec d’autres artistes ?

– Frah : Oui… Mais c’est à dire que pour l’instant l’idée est d’informer les gens, de leur donner deux informations : savoir comment changer certains comportements d’une part, et savoir d’autre part qu’il est encore possible de limiter les dégâts. Des dégâts, on sait qu’il va y en avoir. Maintenant il y a assez de scientifiques qui expliquent qu’entre dans dix et cinquante ans, il va se passer des choses très déstabilisantes que l’espèce humaine n’a jamais connues sur cette planète. Mais il est encore temps de sauver les meubles. L’idée est de concentrer l’énergie sur le message du changement plus que sur le fait d’être musiciens et de construire un festival autour de ça. Mais pourquoi pas ? Sauf que là, on est dans un cas d’urgence : on essaye de réanimer le mec !

– Steve : Et puis ça parle ou pas aux gens. C’est en cours. On vit avec. On va faire des manifestations bien sûr. Mais on se concentre plus sur notre capacité personnelle d’action.

– Frah : Et puis les personnalités qui constituent le collectif sont encore en train d’arriver. On attend peut-être juste avant 2019 pour avoir le noyau dur qui va être composé de cent à cent cinquante personnalités, pour trouver par groupe des idées concrètes et faire jouer les réseaux de tout le monde pour faire passer des informations qui sont un peu « rabat-joie », mais apportent des solutions concrètes, avec tout ce qu’il faut de positivisme pour se dire que si on veut, on y arrive. Il faut que les gens vrillent vraiment : on a besoin d’un détour à cent quatre vingt degrés.

– Steve : Il y a tellement d’énergie dépensée dans le déni de l’ensemble de la situation, que ça mérite quand même une réflexion personnelle et d’ouvrir les yeux.

– A propos d’artistes sensibilisés aux questions environnementales, le groupe Guaka [] qui avait assuré votre première partie lors du concert de Bordeaux en 2014, a réalisé un titre en duo avec la chanteuse de votre groupe, Sam, sur son album « Le Jardin des Malices ». Guaka, dont la batteur et percussionniste Mauro Ceballos, également dessinateur, vient de créer la bande-dessinée « Di Vin Sang » retraçant l’histoire du vin au Chili et des liens avec la ville de Bordeaux, et entièrement teintée et peinte avec des vins, partage avec vous l’originalité d’être composé d’artistes s’épanouissant dans plusieurs disciplines (musique, dessin, théâtre…). Comment les aviez-vous rencontrés ?

– Steve : On les a connus en jouant pas loin d’ici, au Krakatoa de Mérignac (Gironde), une salle qui est devenue depuis mythique pour nous, puisqu’elle l’était déjà pour d’autres. C’est le genre de petite salle où on aime bien jouer et puis on y a rencontré Bertrand Cantat, le jour où on a rencontré les Guaka. C’est devenu une espèce de famille pour nous. Guaka, on a rejoué avec, on a chanté avec, ils nous ont peints dans des festivals. On a fait plein de trucs avec ces mecs là ; ils sont aussi fous que nous -et sympas-. C’est vrai qu’on est six, mais qu’ils auraient pu aussi bien rentrer dans le groupe avec nous. Et ils sont libres ! Autonomes, c’est ça qui est quand même bien aussi.

– Le projet de recherche « PIND » [] lancé à l’initiative de Solveig Serre et Luc Robène [] concernant l’histoire de la scène punk française, a fait apparaître au fil de divers témoignages collectés combien l’esprit d’autonomie et de débrouille propre au Punk et à la philosophie du « do it yourself » a influencé et construit énormément de personnes, par delà le mouvement musical et culturel lui-même. En quoi l’esprit Punk vous a-t-il particulièrement formés ?

– Frah : L’esprit punk, c’est un truc qu’on avait, parce qu’on a bousculé des choses. Quand on sent que les choses sont établies et qu’elles n’avancent pas vers quelque chose de constructif, ça nous angoisse et on aime bien les bousculer. Ça peut être un côté « fouteur de merde ». Mais c’était aussi pour jouer avec les deux extrêmes, entre le côté Shakyamuni très posé, très pensé, basé sur la sagesse, le respect, la construction, et le côté punk plutôt du mec qui pète tout sans trop réfléchir.

Steve : C’est la métaphore de l’équilibre juste qu‘il faut trouver entre deux extrêmes qui sont cool à vivre, mais un petit peu, à chercher loin dans les cultures, les différences, les sensations.

– Frah : Mais je pense que si tu demandes à un groupe de Punk si on est des Punks, ils seront pétés de rire !

– Steve : Si c’est pour avoir une étiquette punk, déjà c’est antinomique. Mais la liberté dont on parle, et même dans ses gestes, c’est exactement ça.

Miren Funke

Photos : Carolyn C, Océane Agoutborde

Lien : site officiel de Shaka Ponk : http://www.shakaponk.com/

Fb de Guaka : https://www.facebook.com/GUAKA-105715122132/

Mauro Ceballos : https://www.facebook.com/mauroceballossollabec/

 

NB:  au fil de la lecture, il y a des mots ou des groupes de mots en rouge souligné, en cliquant dessus vous allez sur une page dédiée.

Tournée de présentation d’Amours Sorcières, quatrième album de Julie Lagarrigue (Julie et le Vélo qui pleure) : entretien avec l’artiste

26 Oct

C’est par une tournée de concerts, au cours desquels ses nouvelles chansons viendront à la rencontre du public dès la fin octobre, que Julie Lagarrigue (Julie et le Vélo qui Pleure, voir ICI et  ICI) annonce d’ores et déjà la création d’un nouveau répertoire, dont l’enregistrement s’exécutera dans quelques mois. Quatrième album de l’artiste, « Amours Sorcières », qui sera disponible début 2019, a donc décidé de se dévoiler au préalable sur scène, d’y promener sa poésie, d’y confier son intimité, d’y faire danser ses lueurs, et d’y esquisser les sens rêveurs qui fourmillent toujours dans l’âme de l’auteure-interprète, dont le goût pour la recherche du différent et le talent pour exprimer autrement nous inclinent à osciller d’émotions familières en sentiments étrangers, au jour d’un regard original, tendre et clair-sentient, parfois inattendu et insolite. A l’orée de ce nouveau voyage auquel Julie Lagarrigue nous invite, et pour lequel un appel aux contributions du public -avec possibilité de pré-commande de l’album- a été lancé (lien en bas d’article), Julie Lagarrigue acceptait de nous accorder un moment.

– Julie bonjour et merci de nous accorder quelques instants pour parler de ce nouvel album « Amours Sorcières » en création et pour lequel un appel au financement public a été lancé. Des dates de concerts sont déjà fixées pour les 4 prochains mois, préalablement à l’enregistrement du disque. Cette tournée va-t-elle consister à permettre aux chansons d’exister et d’évoluer peut-être ou de se métamorphoser ?

– Effectivement au préalable, on part en tournée avec « Les P’tites scènes » de l’IDDAC, et quelques autres dates, une vingtaine en tout. J’ai choisi de garder la même équipe de musiciens que ceux qui ont joué sur l’album « Fragiles, Debout » : Ziad Ben Youssef au oud et Anthony Martin à la guitare. En revanche je ne jouerai pas d’accordéon sur ce nouveau répertoire. J’ai acquis un très beau tambour de la Réunion, et puis en cherchant les arrangements des nouvelles chansons, nous avons travaillé avec. Il fallait un tambour avec lequel tout le monde puisse jouer, donc un instrument de taille raisonnable, et dont on puisse jouer à la main, à la baguette, sans cerclage. Quand à l’évolution des titres, on a une belle marge d’évolution devant nous. Il y a déjà une chanson « Le beau de la forêt », pour laquelle Anthony a créé un arrangement très beau avec une guitare portugaise à cordes doublées -moi jouant du tambour et Ziad du oud-. Peut-être la jouerais-je au piano en rappel ? Honnêtement ce qui me passionne le plus, c’est la période de recherche et de création, plus que le résultat. La résultat sera forcément différent chaque soir de toutes façons. On ne sait pas vraiment où cela va mener les chansons. Mais comme dans ce milieu, on nous demande toujours de tout prévoir trois ans à l’avance, j’ai décidé de faire de la résistance, et d’y vivre au jour le jour. De même j’ai préféré un appel aux dons, via la site « helloasso » plutôt qu’une souscription classique. Bien sur il y a des contre-parties et c’est une forme de précommande de l’album.

– Souhaites-tu que tes musiciens expriment leur polyvalence sur ce nouveau répertoire ?

– Ziad et Anthony jouent des percussions. Mais Anthony joue plein de guitares quand même; on n’a pas le cavaquinho pour l’instant sur ce répertoire. Mais tout va peut-être changer, puisqu’on rentre une semaine en résidence et on ne sait pas trop ce qui va en sortir. Pour ma part je vais jouer essentiellement du piano et du tambour.

– Tu évoquais récemment des thématiques plus intimes que sur les précédents albums au sujet de ces nouvelles chansons. Qu’en est-il ?

– Est-ce que j’ai tenu ma promesse ? Je ne sais pas si c’est intime. « Le jardin manque d’eau » est à mon sens une des plus belles chansons qui parle de la terre, mais aussi, comme les autres chansons, des relations hommes-femmes. Je souhaitais mettre les femmes à l’honneur : la femme-amante, la femme-aimante, la femme-mère etc. 

– Et ces femmes, sont-elles toi ou des femmes que tu as croisées et qui ont pu t’inspirer ?

– Il y a des chansons où je parle de moi, mais du moi qui ressemble aux autres; et d’autres où je parle de femmes, d’une femme en particulier, que j’ai rencontrée. La chanson « Si tu la voyais » raconte une femme qui, à la cinquantaine, change de vie et reconstruit. Mais de toutes façons, lorsque j’écris, qu’il s’agisse de moi ou d’autres personnages, je m’exprime toujours à la première personne. « Mon mec est un scientifique » relate l’histoire d’un couple moderne. « Doucement je me décristallise » est une chanson que j’aime beaucoup, et dont cependant je ne sais pas trop ce qu’elle va donner. Je souhaitais y parler du moment où on revit, où après avoir passé une période, qui peut être n’importe quoi, de maladie, de parenthèse, de repli ou de transformation -dans mon cas je me sentais invisible-, on revient à la vie. La chanson « Le beau de la foret » décrit l’aventure d’un homme, toujours à la première personne -j’aime bien me mettre dans la peau d’un mec- qui quand il était jeune avait reçu pendant très longtemps des lettres d’une fille auxquelles il n’a jamais pu répondre, par timidité, et se rend compte vingt ans plus tard qu’en fait il l’aimait. Cette chanson aborde le thème de l’inhibition, de l’introversion qui parfois tétanise. « Amour Sorcières » est un titre court qui a donné son nom au spectacle et probablement à l’album, et qui parle d’aller faire un tour sur la terre

 Voir si les hommes
encore s’étonnent
de voir des coquelicots pousser
au bord des chemins goudronnés .

Il faudrait qu’on arrive quand même à profiter et s’enjouer de ce qui est beau et positif. C’est un spectacle plutôt lumineux en fait.

– En quoi d’autre va-t-il différer des précédents ?

– Normalement je devrais moins parler que sur les précédents spectacles. C’est Cécile Delacherie qui vient jouer le rôle de regard extérieur [voir ICI]  : elle m’aide à ce que ce soit globalement construit, que l’ordre des chansons ait du sens; elle me/ nous fait travailler et nous aide à garder une certaine rigueur dans le travail. Patrick Lafrance s’occupera du son et de la lumière. Le vélo n’est plus là. Mais il y aura de belles surprises. Pour le moment les principales dates annoncées sont en Gironde et dans des départements limitrophes (Landes, Tarn, Dordogne, Creuse), mais nous espérons voyager un peu plus loin avec cette tournée, et pouvoir participer aux festivals de Chanson.

– L’affiche de la tournée te présente en robe rouge au milieu d’un champ de fougères. Lagarrigue dans les fougères, un joli clin d’œil ?

– J’adore le symbole des fougères ; on dit qu’elles ont l’ADN le plus vieux existant sur la terre. Ce sont des espèces de vie pionnières. Et il y a un lien avec les sorcières. Pour moi les sorcières sont des femmes soignantes, qui sont en fait juste des femmes qui suivent leur intuition, qui connaissent les plantes, qui accompagnent l’autre. Je ne pourrais jamais retirer ça de moi : il y a cette part de moi qui est dans le soin, de par mon activité d’art-thérapeute.

Miren Funke

photos : Mathieu Ferguson

  • Dates de concerts : clic sur le vélo  —–>

 

  • Lien de souscription, clic sur la bourse

 

Gémeaux Croisées…

25 Oct

C’est pour demain 26 Octobre, un des plus forts moments de spectacle enfin disponible pour les jeunes générations qui oublient souvent les acquis conquis de haute lutte par leurs parents et grands parents. C’était en 1988,  enregistré au Théâtre d’Hérouville et au Théâtre 71 Malakoff.

Anne Sylvestre et Pauline Julien ont porté au plus haut la chanson de citoyennes embarquées dans la marche cahotique ou chaotique du monde, sans jamais abdiquer, parfois dans les chemins de traverse, quand les grandes routes leur étaient peu accueillantes. Dans ce parcours du cœur battant, voici une biographie en chansons et dialogues qui dépeignent assez bien leurs vies de femmes debout, il y a toutes les questions de l’humanité inquiète… Avec raison.

Cet extrait suffira à vous convaincre,

Le double album de ces Gémeaux croisées est réédité par EPM, disponible chez MistiMusicShop, la bonne adresse pour la VPC.

C’est ici, câlin sur le chat et vous y êtes. –>

 

 

 

Important : il y a dans l’album une version de Suzanne, peu connue, celle de Gilbert Langevin, mise en sommeil après que Leonard Cohen ait confié à Graeme Allwright la version « officielle ». Sans vouloir polémiquer, il semble quand même que la version Langevin est plus proche de celle de Leonard Cohen..

Et le florilège des questions en interview est un bréviaire indispensable à tous les plumitifs qui s’essayent à l’exercice… A enseigner dans les écoles de journalisme.

Norbert Gabriel

Hubert-Félix Thiéfaine en concert à l’Arkea Arena de Bordeaux (Floirac)

19 Oct

Ouvrir le bal par « 22 mai 1968 » pour nous plonger directement en immersion dans les abysses des plus anciennes eaux troublantes de son répertoire, quelle idée savoureuse ! Et on allait y boire à la même barrique : les titres suivants -exception faite du magnifique « Toboggan », unique extrait du dernier album qui fut interprété-, tirés essentiellement de treize premiers disques du chanteur, et rarement de plus récents ( « La ruelle des Morts », « Le jeu de la folie », « Confessions d’un Never Been ») cimentèrent le sentiment initial induit : ce concert d’Hubert-Félix Thiéfaine s’annonçait comme un voyage à travers les innombrables paysages de la vaste discographie multipolaire d’un artiste qui a, depuis 40 ans, émerveillé, accompagné, soutenu et parfois secouru les nombreuses générations de son public, et sort ce mois-ci une anthologie de ces quatre décennies passées, « 40 ans de Chansons ».

Après avoir, au cours des précédentes tournées, interprété principalement les morceaux de ses deux derniers albums, Hubert-Félix Thiéfaine avait décidé de le régaler, ce public, conviant devant l’auditoire de la salle, pleine comme un œuf, des chansons qui, pour certaines lui appartiennent désormais moins qu’elles appartiennent au patrimoine de ces enfants qu’un peu de lui a fait croître. Car il en va ainsi : parfois la trace d’un autre peut nous apprendre à tenir debout. D’autres titres, que je n’avais plus entendus depuis fort longtemps (« Stalag-Tilt », « L’Agence des Amants de Madame Müller », « La Dèche, le Twist et le Reste », « Enfermé dans les Cabinets », « La Maison Borgniol ») me surprirent d’émotions enjouées et mélancoliques à la fois, d’un peu de stupéfaction aussi, tant leurs paroles revenaient en tête immédiatement, comme instinctivement, sans souffrir la moindre hésitation. A s’étonner soi-même de si naturellement toiser les trous noirs de la mémoire capables d’avaler des périodes entières de nos vies, mais qui n’ont rien aspiré de ces textes jadis fredonnés par cœur. C’est dire ce que parfois des chansons bâties de mots tristes et d’idées sombres peuvent contenir de lumineux.

Comment ne pas deviner ressurgir les fantômes des histoires intimes de chacun, et sentir se réveiller la tendresse de l’oeil qu’on promène sur les blessures du passé, à travers cette foule de moments obscurs que la poésie et la folie de l’artiste ont rendu radieux ? On se regarde au fond des yeux dans le miroir des souvenirs, et il en va ainsi : parfois la plume d’un autre peut nous apprendre à porter des ailes.

Et voilà déjà «Mathématiques Souterraines » qui enfle une lame de fond me remontant du fond de l’âme, prête à déborder de mes yeux et en cracher son écume, alors qu’ils sont si nombreux tout autour de moi à en beugler en cœur les paroles, à tel point que leur chant couvre parfois la voix de l’artiste. Qu’importe : c’est sans doute leur chanson, comme c’est aussi la mienne. Eux au moins parviennent à le crier. Et c’est beau! Et ça sonne si juste, malgré les fausses notes. Phénomène identique avec plusieurs autres titres phares (« Les Dingues et les Paumés », « Alligators 427 », « Soleil Cherche Futur », « Sweet Amanite Phalloïde Queen », « Lorelei », « La Fille du Coupeur de Joints » et « Dernière Station avant l’Autoroute » a capella en rappel), qui confirme une idée persistante : plus que d’autres sans doute, Hubert-Félix Thiéfaine eu le talent d’inventer des « chanson-golems » qui ont fini par échapper aux mains de leur créateur pour partir vivre auprès d’autres âmes et s’offrir à elles.

Entouré du fidèle Alice Botté à la guitare, de son fils Lucas Thiéfaine (guitare, percussions), et du groupe de ses musiciens renforcé par les présence de deux violoncelles, d’un saxophone et de Yan Péchin (guitare, banjo, mandoline, lap-steel) que, tout comme Alice Botté, on a toujours plaisir à retrouver auprès des beaux artistes, c’est deux heures trente de bonheur et de délire que distilla un Hubert-Félix Thiéfaine en grande forme, d’un bout à l’autre d’un concert consacré aux retrouvailles avec nos souvenirs, et emprunt d’une humilité très humaine et de reconnaissance exprimée à l’endroit du public autant que des nombreux techniciens et travailleurs qui permettent aux spectacles d’exister. Un plein de vibrations somptueuses qui nous laisse quelques étoiles en tête et un sourire ému sur le visage. On reviendra ! Pour lui, on revient toujours…

Miren Funke

photos : Carolyn C (1 à 5), Emma Boireau (6)

Et le site de HFT, c’est là –> Clic on the cat..

Arthur de la Taille…

17 Oct

Même si les anges nous jettent des pierres, même s’ils sont devenus fous, vivre est un voyage, une aventure, plus ou moins risquée, et il paraît que ça finit mal selon certaines sources. Mais en attendant l’épilogue, le visa sans retour, on peut essayer de faire la traversée en navigateurs résolus à cueillir l’or des jours.

Les orpailleurs du quotidien‘ pourrait être le sous-titre de l’album Ministère des ondes d’Arthur de la Taille, salué par un coup de cœur de Charles Cros*, toujours bien inspiré. A défaut de fière caravelle portée par les vents oiseleurs vers des îles parfumées de soleils permanents qui subliment les filles et les fleurs, suivons les chemins de traverse du ministère des ondes, ces ondes qui éparpillent des musiques colorées de toutes les nuances avec quelques notes de guitare ou d’accordéon mélancolique sur un bord de Seine..

Et tout ça fait résonner comme un air d’Higelin « Vivez aujourd’hui, demain il sera trop tard. »

Ou quelques vers d’Arthur de la Taille

Comme on avance dans la vie
Et que l’on veut trouver de l’or
Forcément on fait des erreurs
à courir après les nuages…

Les nuages, là bas, les merveilleux nuages… Oui mais là-bas, « c’est le lointain rivage, le paradis bleu par delà les sommets… »** le pays d’Ellie peut-être ?

Pour le savoir, rendez-vous le 19 Octobre, on y est presque, c’est le jour de sortie officielle de l’album.

Et pour avoir un aperçu (version guitare voix)

 

avec le clip et l’extrait de l’album,

 

 

 

Pour Arthur FaceBook   Clic ici–>

 

  • Le Prix de l’Académie Charles Cros récompense depuis plus de 60 ans des albums remarqués et remarquables
  • ** merci à Jean Richepin de son aimable participation, à son insu mais probablement de son plein gré… Les oiseaux de passage..

Norbert Gabriel

Et c’est ici qu’il est en vente –>

Cabaret Louise ..

4 Oct

Photo Xavier Cantat

Au rendez-vous avec Louise (Michel) vous êtes embarqué dans un voyage dans le temps et une série d’aller-retours en tempo vitaminé entre les années 1970 et 2018. Raconter ce spectacle sans divulgacher (en englishe « Spoiler ») est une entreprise impossible, mais …

Mais, on peut essayer de vous allécher sur un autre registre que la ribambelle d’éloges dispensés par la presse depuis sa création.

Imaginons que vous, spectateur aventureux, êtes devant un flipper, un de ces vieux machins que les moins de 40 ans connaissent peu, ça marche comme ça : vous envoyez une boule dans le labyrinthe, elle va retomber sur des plots réagissant en donnant des points ou, comme dans le cas présent, vous envoyer dans des flashes-back de l’histoire : dzoing, et vous êtes en 1968 avec Moustaki et sa Révolution permanente, re-dzoing, rebond vers les années de la Commune de Paris en 1870-71… avec Louise Michel…  et Théophile…  La boule ricoche vers un autre plot qui …

Tiens, c’est bizarre, on entend un discours d’Adolphe Thiers et le plot suivant ressort le même discours d’un président de 2018… Vous avez dit bizarre ? Comme c’est étrange… Quoi que … Avec ces ricochets dans le temps et l’histoire, on croise entre autres Rimbaud, Hugo et Jules Ferry, qui ne sort pas indemne de l’aventure…

Le croirez-vous ? Johnny himself est présent dans le panorama.

Panorama à la gloire de cette femme exceptionnelle, Louise Michel. Et même si on connait ses évangiles révolutionnaires par cœur, quelques images d’Epinal de notre histoire de France se font reloooker le profil.

Dans ces virevoltes, les deux comédiens polymorphes funambulisent entre les pages des chroniques révolutionnaires et leur vie de couple de scène, ou du quotidien de la vie d’artiste; qui est vraiment Louise, et qui est Théophile ? Où est la fiction et la réalité ? Reste la révolution… permanente.

Un spectateur enthousiaste a écrit: «  Un spectacle foutraque et foldingue, d’une intelligence et d’une efficacité redoutables. Un temps de théâtre où plaisir de réfléchir et plaisir de s’amuser font un très bon ménage. Un conseil ? Courez le mardi à 19h30 au Funambule Montmartre. »

C’est un point de vue totalement partagé,

Photo Xavier Cantat

Quelques conseils pratiques ,

  • d’abord arriver à l’heure  19h30, voici pourquoi →
  • Révisez votre bréviaire de Mai 68, vous en serez ravi, et peut-être un spectateur actif.
  • Ça se termine avant 21 H, vous avez le temps d’aller prendre un pot avec les comédiens dans un bistrot voisin ou de vous offrir un restau à une heure décente.

 

Pour les modalités pratiques, clic sur le théâtre

 

 

Et pour quelques images de plus,

PhotosNGabriel2018

Norbert Gabriel

 

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