Ce sera la conclusion de cette trilogie, après La leçon de musique, et Brassens international, voici la leçon d’écriture, qui montre 40 ans plus tard que cette séquence était prophétique.
Et explique pourquoi Georges Brassens a été traduit avec bonheur plus de 200 langues, dans tous les pays du monde…
Par Robert Mallet, recteur de l’Université de Paris, sur les textes de Georges Brassens dans Le Grand Echiquier Brassens du 6 Mars 1974.
La leçon de musique, c’est là,
Norbert Gabriel
Oui pour le côté Verlaine, Laforgue et Appolinaire, mais le répertoire de Brassens est tellement riche que chacun peut y trouver ce qu’il veut. Moi j’aime bien aussi son côté Couté, son côté terrien, authentique, universel, amoureux de la vie et de la nature. Le nostalgique de son arbre : « Mais toi, tu manques à l’appel
Ma vieille branche de campagne
Mon seul arbre de Noël
Mon mât de cocagne… »
La nostalgie qui ramène Ulysse au » pays des vertes années », sa compassion pour le » Petit cheval » de Paul Fort, sa tendresse pour l’auvergnat qui lui a donné le pain le miel et le bois, sans le juger, pour le » Pauvre Martin » :
» Avec une bêche à l’épaule,
Avec, à la lèvre, un doux chant,
Avec, à la lèvre, un doux chant,
Avec, à l’âme, un grand courage,
Il s’en allait trimer aux champs!
Pauvre Martin, pauvre misère, »
pour la pauvre Hélène et ses sabots crottés, ou » Angèle la tourangelle ». ou encore quelques bergères :
« Malgré le règne des machines
Dans certains villages cachés
Un vieil ânon courbe l’échine
En grimpant les sentiers perchés.
Et dans les prés sur l’herbe verte
Le voyageur fait tout à coup
La plus heureuse découverte :
Une bergère aux yeux très doux… »
Le Brassens qui nous emmène sur » Ce petit chemin… qui sent la noisette,
Ce petit chemin… n’a ni queue ni tête
On le voit
Qui fait trois
Petits tours dans les bois
Puis il part
Au hasard
En flânant comme un lézard…
C’est le rendez-vous de tous les insectes
Les oiseaux pour nous, y donnent leurs fêtes
Les lapins nous invitent
Souris-moi, courons vite
Ne crains rien
Prends ma main
Dans ce petit chemin. » .
Sans renier tout le reste du répertoire de Brassens, j’ai un faible pour cette humanité profonde, pour cette mauvaise herbe là, pas celle qu’on rumine, pas celle qu’on met en gerbe, mais celle qui pousse dans les jardins en liberté :
» Je suis d’la mauvaise herbe,
Brave gens, brave gens,
Je pousse en liberté
Dans les jardins mal fréquentés! » .
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Charles Trenet entraînant bien sûr… mais ces deux extraits ne sont-ils pas dignes des plus grands poètes?
« Je n’ai jamais su dire
Pourquoi j’étais distrait.
Je n’ai pas su sourire
A tel ou tel attrait.
J’étais seul sur les routes
Sans dire ni oui ni non.
Mon âme s’est dissoute.
Poussière était mon nom. » (La Folle Complainte)
« Fidèle, fidèle pourquoi rester fidèle
Quand tout change et s’en va sans regrets
Quand on est seul debout sur la pass’relle
Devant tel ou tel monde qui disparaît
Quand on regarde tous les bateaux qui sombrent
Emportant les choses qu’on espérait
Quand on sait bien que l’on n’est plus qu’une ombre
Fidèle à d’autres ombres à jamais. » (Fidèle)
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J’aime beaucoup Trenet, mais je trouve que Les chansons de Brassens résistent mieux au temps. Trenet l’a dit lui-même :
« Brassens m’aimait beaucoup, étant donné que j’étais le chanteur de sa jeunesse. Mais, dieu merci, il ne s’est pas inspiré de ce que j’ai fait. Il a fait autre chose, une œuvre qui résiste au temps. Parce que, justement, il n’a pas sacrifié à la mode. Il l’a créée. » Charles Trenet [« Il n’y a plus de chansons… » (Propos recueillis par J. Théfaine) – Chorus (Les Cahiers de la chanson N°28, juillet-août-septembre 1999]
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Le sujet est la qualité poétique et, à mon avis, les strophes que j’ai recopiées résistent tout aussi bien (sinon mieux) que certaines chansons de Brassens. Le problème est que Trenet est généralement mal connu des amateurs de chanson,qui l’évoquent rarement, pourtant dans ses chansons « entraînantes » et à la musique légère, se cachent des vers d’une profondeur et d’une beauté que n’auraient pas renier de grands poètes.
Quant à savoir qui résistera le mieux au temps, nous n’aurons pas la chance de le savoir, hélas! 🙂 . Pour le moment La mer ou Que reste-t-il de nos amours, résistent aussi bien que Chanson pour l’Auvergnat ou Les Copains d’abord… Et Trenet est bien modeste dans son propos, car il a créé une mode, lui aussi, et surtout il a ouvert une brèche dans laquelle les Brel, Brassens et consorts se sont engouffrés. Il y a un avant et un après Trenet. Et n’oublions pas que ce genre d’extrait d’émission de télévision a déjà quarante ans ou plus… C’est un témoignage davantage qu’une leçon, à mon avis ! 🙂
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Bien sûr les chansons de Charles Trenet sont éternelles, tout comme celles de Brassens, j’ai juste l’impression que celles de Brassens sont plus « toujours d’actualité ». Et Brassens a chanté beaucoup de poètes, de Villon à Aragon. Trenet n’a chanté que ses chansons je crois ?
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Le plus grand chansonnier de XIX° siècle était Béranger (Pierre-Jean) aussi célèbre à l’époque qu’Hugo et Lamartine. Qui se souvient et connaît ses chansons aujourd’hui ?
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Trenet a chanté Chanson d’automne (Verlaine).
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Et La cigale et la fourmi, il me semble aussi…
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Robert Mallet est surtout connu pour sa fameuse série d’émissions à la radio avec Paul Léautaud dans les années 50. Aucun doute, il avait bien rencontré Léautaud, lui…
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