Archive | janvier, 2018

Histoire d’une chanson « Le déserteur »

31 Jan
Nos chers résocios facebouquiens font circuler parfois des balivernes insultantes pour l’intelligence, ou des approximations du même métal.  Ainsi, je viens de voir revenir quelques mots sur Le déserteur que  Mouloudji aurait « édulcoré  » pour éviter la censure. D’où le retour de l’histoire de cette chanson, publiée il y a quelques années.

Commençons donc par la version créée par Mouloudji.

 

 

Récemment encore, à la radio, un animateur a été plus qu’approximatif avec cette chanson, comme en Juin 2009, dans Vivement Dimanche avec Juliette Gréco à l’honneur, Michel Drucker fait une petite digression sur Boris Vian et « Le déserteur » et dans une approximation assez désinvolte, il explique que Boris Vian a réécrit quelques lignes de la chanson pour qu’elle puisse passer en radio…

Suggérons à Drucker de mieux choisir les collaborateurs qui le documentent, car si sa mémoire a des éclipses, il est notoirement connu que cette chanson est l’archétype de la chanson interdite de diffusion radio, et de vente (l’éditeur Salabert a dû retirer les petits formats des magasins) et ce, de 1954 à 1962. Sans faire un développement exhaustif, préciser que c’est Mouloudji qui l’a créée n’aurait pas été superflu.

Cette chanson donne toujours lieu à des commentaires d’autant plus animés que 54 ans après sa création, la légende s’enrichit, ou se déforme selon les témoignages et les interprétations qui en sont faites. En particulier sur les variations et modifications du texte initial, donc revoyons les faits

– Février 1954: Boris Vian écrit la base du texte qui deviendra « Le déserteur » sur une nappe de restaurant. Dans les variantes* qu’il a ébauchées, une première version émerge, «Monsieur le Président…. qui se termine par «… que j’aurai une arme et que je sais tirer » qu’il propose à tous les chanteurs du moment, ou presque. Refus de la chanson, pour des raisons diverses, certains ont déjà des chansons antimilitaristes dans leur répertoire, d’autres refusent l’idée de la désertion, d’autres ont d’autres raisons. Seul Mouloudji accepte, mais il en discute certains points avec Boris Vian, ils sont très copains; d’une part, Mouloudji est résolument pacifiste, il n’a jamais tenu un fusil de sa vie, et la fin le met en porte à faux avec ce qu’il est, d’autre part, dans le contexte de la guerre froide USA-URSS, il lui semble opportun d’élargir le débat. Réponse de Vian: « mais c’est toi qui chantes Moulou, tu fais comme tu veux » et en accord avec Mouloudji, il réécrit le début et la fin, (et une partie de la deuxième strophe) dans une version qu’il enregistrera en version mixte : « Monsieur le Président,» et avec la fin « que je n’aurai pas d’armes»

– Mouloudji interprète en scène « Le déserteur » le jour de la défaite de Dien Bien Phu,  (7 Mai 1954) pur hasard, il apprendra la nouvelle le lendemain.

(Pour mémoire : tous les experts de toutes les armées du monde étaient d’accord sur un point, Dien Bien Phu (Muong Tanh) est un camp inexpugnable, car inaccessible aux véhicules blindés, chars, canons et autres fourbis militaires. Personne n’avait pensé à la possibilité de démonter tout l’armement, de l’acheminer sur des vélos, dans des sentiers de brousse invisibles du ciel, et d’installer sur les collines une ceinture de pièces de tir. Seuls les aviateurs avaient fait une réserve sur la position en cuvette, mais comme elle était en principe inexpugnable, on les a renvoyés à leurs machines volantes.

C’est donc un camouflet pour toutes les armées, surtout l’armée française ( uniquement des soldats de métier), que cette journée du 7 Mai 1954, la guerre du Tonkin prend fin, et celle du Viet-Nam commence…

De plus, avec la fin de la guerre d’Indochine, on voit arriver quelques mois plus tard le début de celle d’Algérie. Avec la mobilisation du contingent qui va sensibiliser les français, les p’tits gars d’chez nous expédiés dans un département français pour cause « d’évènements », ça passe mal. Et c’est un chanteur nommé Marcel Mouloudji qui envoie Le déserteur dans les bacs à disques !

Le scandale est de taille, censure immédiate sur les radios, disque interdit à la vente. Pourtant en quelques mois, cette chanson est connue de tous les français. Parce que le tissu associatif, syndical, est très actif, et s’il n’y a pas de Zénith ou d’Olympia pour inviter Moulou, et pas de Youtube, il y a les Maisons du Peuple, les salles genre Mutualité, qui relaient efficacement ce qu’on n’entend pas à la radio, TSF pas tout-à-fait transistor.

Toute la jeunesse française va chanter « Le déserteur » dans la « version Mouloudji », que Vian enregistrera d’ailleurs, ce qui tend à démontrer qu’il avait avalisé cette version. Et puis, je ne suis pas certain que Vian ait tenu absolument à imposer la version agressive, lisez le texte, on a un mec qui va prêcher la paix sur les routes de France, inciter les gens à refuser la violence, et il aurait un fusil pour tirer sur les gendarmes … ? C’est troublant, il y a un hiatus, provocation diront certains… Peut-être. Mais c’est une sorte d’option terroriste qui semble ne pas coller avec le personnage de la chanson. Cela dit, vu des années 2000, la glose est facile, en 1954, on est à dix ans de la fin de la guerre, de la résistance, avec certains policiers collabos, on peut imaginer qu’un fusil était un argument utile dans les discussions.

Mais le fusil ce n’était pas l’option de Mouloudji. Et quand dix ans plus tard en 1965-66, un chanteur reprend « Le déserteur » version avec fusil, c’est un peu facile de reprocher à « un certain » d’avoir trahi Vian. Reggiani réïtérera ce propos en 1998 ou 1999, Vian et Mouloudji n’étant plus là pour préciser les choses, et le contexte de la première version.

Et c’était en 1954 qu’il fallait y aller en front de scène, pas en 1964.

Parmi les nombreux interprètes qui ont choisi de mettre « le déserteur » à leur répertoire, bravo à Peter Paul and Mary (les premiers aux USA), à Joan Baez et à ces américains qui la chantaient pendant la guerre au Viet Nam, ils chantaient aux USA, pas sur les Champs Elysées**, où c’est plus facile de crier Paix au Viet Nam qu’à Washington.

Pour ce qui est des choix à faire dans ce genre de situation, on peut réfléchir à ce que disait  un des derniers poilus de 14-18: « Devant moi il y avait les allemands, derrière moi il y avait ma famille, qu’est-ce que je pouvais faire d’autre?»

Avec cette chanson, (Le déserteur) on a un parfait exemple du rôle décisif de la scène dans l’expression libre. Une chanson peut être censurée par la production, quand elle est enregistrée, elle peut être censurée par les diffuseurs, ou les distributeurs (comme Allah, de Véronique Sanson) ou interdite à la vente, mais personne ne peut empêcher un artiste de s’exprimer en scène. Malgré le consensuel ambiant qui gomme les aspérités (pas de crime économique en diffusant un opéra à 20h30, ou une chanson qui segmente, ou qui provoque, tiens comme ce titre de Tachan, « fais une pipe à pépé » peu de chances qu’une grande chaîne invite Henri Tachan, toutefois, on a pu entendre Agnès Bihl chez Drucker… (invitée par Ségolène Royal, faut pas rêver…)

Norbert Gabriel

*Variantes: dans une des variantes, l’humour iconoclaste de Boris Vian lui inspire  « ma mère est dans la tombe et se moque des vers » ... Il l’interprète lui-même dans un album qu’il a enregistré, mais il est pratiquement le seul à avoir osé ce jeu de mots, car de qui se moque-t-on? Des poètes ou des animaux pluricellulaires sans mains ni pieds… ? Sacré Boris !

** « Pauvre Boris » de Jean Ferrat, pour une mise au point. C’était en 1966.

Tu vois rien n’a vraiment changé
Depuis que tu nous a quittés
Les cons n’arrêtent pas de voler
Les autres de les regarder
Si l’autre jour on a bien ri
Il paraît que  » Le déserteur « 
Est un des grands succès de l’heure
Quand c’est chanté par Anthony
Pauvre Boris

10 Novembre 2019, une version féminine vient de faire son apparition grâce à Annie Nobel..

Barbara , le voyage musical de sa vie…

30 Jan

Quelques clichés habituels perpétuent le cliché ‘la-chanteuse-de-minuit-au-piano-en-noir-à-l’écluse’.

Et si on allait sur les traces de cette femme qui a chanté ses amours et ses douleurs de Marseille à Bruxelles, avant d’aborder au port de l’Ecluse ? C’est la proposition de Claudia Meyer dans son spectacle, Ah les voyages… Et elle a bien voyagé, Barbara, dans des tribulations diverses, pas toujours organisées, mais en aventurière de la vie qui n’abdique jamais.

Conteuse et chanteuse, musicienne avant tout, Claudia Meyer a repeint les paysages musicaux couleur guitare, et les chansons de Barbara renaissent dans de nouveaux décors. Jazzy ou rythmes latino-bossa, ces arrangements mettent en évidence les belles qualités des mélodies de Barbara.

« Un conte qui nous incite à rêver d’un autre destin pour Barbara. Et si on refaisait le voyage de sa vie à l’aune de notre imagination, dans ses limbes lointains… Alors, venez je vous y emmène… »

Une chanson, c’est paroles et musique, il faut savoir trouver le juste équilibre entre les deux, ne pas occulter la musique par des paroles trop hégémoniques, et pas non plus faire danser sur des musiques guillerettes quand les paroles sont chargées d’émotion qu’on n’entend plus quand la musique est trop bonne..

Claudia Meyer a maitrisé ce juste équilibre, bien entourée par un trio complice, de haut vol.

Photos NGabriel 2018 à l’Auguste Théâtre.

Il faut remercier ces artistes qui savent faire revivre des répertoires parfois figés dans des conventions obsolètes que les gardiens du temple érigent en bible incontournable. Casser les codes, remettre sur le métier l’ouvrage pour le magnifier avec les couleurs du temps actuel. Donner à entendre une différence créatrice, faire naître de nouvelles émotions. Et honorer Barbara par ces re-créations.

Claudia Meyer, dans ce spectacle,  illustre un parcours de vie avec les chansons emblématiques qui prennent de nouveaux habits de fête. Et elle rappelle que Barbara a été  durant une dizaine d’années une interprète de Jacques Vidalin, Brassens, Raymond Lévêque et Jacques Verrières… Dans ce spectacle, on peut entendre une des versions les plus réussies sur le plan guitare de « Mon Pote le gitan »  avec Bruno Caviglia…

Le trio est composé de  Bruno Caviglia, Marc Benabou « Marquito » et Dominique Bertram de gauche à droite sur la photo. Et la mise en scène est de Yorféla.

Ce beau spectacle vous attend pour quelques dates parisiennes, à l’Auguste Théâtre, tout-à-fait adapté à une rencontre intime entre les artistes et le public.

Norbert Gabriel

Pour les dates à venir et tout savoir, clic sur la guitare –>

ET DIEU NE PESAIT PAS LOURD

29 Jan
de Dieudonné Niangouna  à la MC93 de Saint-Denis.

 

Quand on a la chance de pouvoir sortir enfin des ténèbres, c’est à dire de nos moments d’ultime détresse, de profonde tristesse et de désespoir, il faut savoir trouver un juste milieu pour s’y ancrer.
Anton, personnage déroutant en proie à sa solitude, oscille entre ombre et lumière dans un soliloque profond qui invite le spectateur pour un voyage d’1 heure 20.

Une apparition subite. On distingue un homme dans le noir au fond de la scène, tête baissée.
Son histoire commencera par ses origines, tissant ainsi des liens entre lui et le spectateur qui essaye tout au long de la représentation de retracer le chemin que Anton a parcouru pour atterrir dans cette sorte de chambre forte coupée du monde. La mise à distance de toute civilisation et d’interaction humaine est un point majeur dans l’interprétation de Frédéric Fisbach.

En effet, un écran géant retransmet l’image de la cellule en temps réel et une caméra de surveillance filtre la parole de ce détenu en lui envoyant quelques électrochocs en guise d’avertissement. Le son des mots qui s’écrasent dans ce vide abyssal est le seul moyen de lutter contre ce silence assourdissant. Un processus de contamination s’opère alors entre le détenu et le spectateur qui est sans cesse renvoyé à sa propre solitude.
Anton explore les moindre recoins de sa prison comme s’il explorait sa mémoire.
De nombreux sujets sont traités dans ce spectacle foisonnant: politique internationale, démocratie, démagogie des dirigeants, lutte des classes, écologie, sexualité, but de notre existence sur terre et démocratie. Une fracture se crée entre le discours abondant du prisonnier et le silence de ses détenteurs. Réfléchir pour ne pas tomber dans l’excès et la folie. Se questionner en remettant en cause les choses les plus banales au monde. Avoir l’intime conviction que notre passage sur terre n’est pas un hasard et que nous vivons seul coupé des autres. Nous sommes à la fois hyper connectés sur les réseaux et seuls comme Anton dans sa cellule.
Anton défend sa propre vison des choses mais reste ouvert d’esprit, manifestant sa volonté de ne pas imposer ses idées comme le ferait des politiques autoritaires et sclérosantes pour leur peuple. Car le fin mot de tout ça, Marx nous le rappelle: La religion est l’opium du peuple» et si Dieu existait, il serait déjà intervenu depuis longtemps! Anton est un révolutionnaire des Lumières moderne, il nous  susurre à l’oreille: «A ces politiques qui leur crèvent les yeux ou à ces foules aveugles?»

Mathias Youb

 

Pour   les dates et tout ça, clic sur le rideau –>

 

« Datacenter » : Léonel Houssam

29 Jan

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J’ai failli poser cette chronique quelques jours avant noël… ça m’aurait amusé. (Je sais m’amuser seul). J’imaginais le livre sous le sapin. Et puis le temps est passé, l’idée avec… Début janvier, un post de Léonel Houssam (très présent sur les « réseaux » dits « sociaux », sous le nom d’Andy Vérol il y a longtemps, ou encore d’Eliot Edouardson actuellement) m’a fait sourire :

« Au regard des ventes en novembre et décembre, je constate que mes livres ne sont pas des cadeaux de Noël à faire. »

DATACENTER_couv

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Lu cet été (étrange moment qu’inonde le soleil quand se prélassent le calme, le repos et la tranquillité pour qui peut se les payer) : le livre DATACENTER, publié en 2017.

Les photographies de Yentel Sanstitre accompagnent ce récit, roman, dialogue, monologue…? Essai…? Je ne sais pas trop. « Récit fictionnel », précise Houssam.

Littérature… ? Assurément. Au sens où il y a un travail sur la langue, les sons, le rythme, un style travaillé depuis longtemps. La forme rencontre la matière.

Un mot ? Une expression ? Un hashtag ? Oui : « extinction ».
#avantextinction (hashtag utilisé par Houssam) : tout ce qui précède, le monde d’avant l’extinction, le nôtre. Comment on y va. Avec méthode.

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Les jambes croisées, les fesses et le dos calés. La chaise longue était blanche, je crois. Plongée magnifique sur les Pyrénées, immenses, qui barrent la vue et laissent tantôt apparaître le soleil, tantôt la lune, et s’établir le silence. DATACENTER et ses nuances de gris asphalte, de violences quotidiennes et systémiques, inéluctables car liées à l’espèce dominante, établit un contraste saisissant avec l’écrin tranquille qu’envahissent habituellement mes heures d’été. Je m’installe, donc, je reprends la lecture, et je prends des coups. 

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©Yentel Sanstitre

Le récit n’est pas très long : c’est la bastonnade. Je lis lentement, je ne peux excéder quelques pages avant de retourner à une autre occupation, de retrouver le soleil, les sourires, l’inconscience (toute relative) des enfants réunis dans la maisonnée. On joue au ping-pong dans le garage, à la lumière des néons et je songe aux lignes qui viennent de traverser ma cervelle de part en part, laissant blessures, douleurs, cicatrices, éclaboussures.

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Les mots chantés par Serge Reggiani (écrits par Lemesle et Candy), dans « Couleur de colère » me reviennent en mémoire :

Moi l’intrus, l’anonyme
Le cocu, la victime
Je n’veux plus tendre l’autre joue.
Bouge, ma pauvre vie laissée pour compte si longtemps
Et si c’est éphémère, ne te prive pas d’air pour autant.
Rouge, le ciel est rouge et nous promet de beaux printemps
L’avenir est couleur de colère !
De colère ! {x3}

Lire DATACENTER de Houssam, c’est lire ce qu’on aurait préféré ne pas entendre. Tant que ça parle des autres tout va bien, mais le plus souvent, ça vient titiller sans indulgence nos hypocrisies, notre confort et c’est beaucoup moins plaisant… S’il n’est qu’une leçon à retenir : non, je ne vaux pas mieux que le voisin que je pointe du doigt.

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Léonel Houssam

Le récit distribue les torgnoles, la tête du voisin en prend suffisamment, pas besoin de s’en occuper. « Vous prendrez un sucre ? ». Euh, non, mais j’aimerais bien souffler un peu.

Des gifles qui se succèdent, un combat perdu d’avance : comme si le personnage (qu’on croirait narrateur) se trouvait seul un soir, une nuit, dans une salle de boxe et tapait, jusqu’à le détruire, le sac de frappe. « Frappe le sac, ne le pousse pas ». Le sac de frappe, le sac de sable. Quand on ne peut rien, on frappe le sac. Que faire d’autre…? Changer le monde…? D’autres ont essayé. Écrire…? Oui, écrire : les mots sont là et chaque mot vient heurter le lecteur, chaque ligne balance une beigne (au mieux… en attendant pire…). Houssam a trouvé une forme efficace. Le style on le lui connaît depuis longtemps, que l’on lise ses bouquins, ses extraits ou ses statuts (j’ai commencé à suivre le bonhomme sur Myspace, c’est dire si nous datons… — on en a laissé des traces dans le datacenter…).

Il y a les posts et il y a le livre. Pour passer de l’un à l’autre, il fallait trouver la forme, et piquer plus encore vers la littérature.

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©Yentel Sanstitre

Voilà concentrée dans ces pages l’expression du personnage principal, un dingue…? Un dingue qui dérange…? Une expression qui dérange…? La fuite n’est plus envisageable. Personne n’est épargné, car les dingues (dingues ou non) délivrent une boue parfois incompréhensible, parfois grinçante, brutale, crûment physiologique – et disent aussi des vérités qui touchent… en plein dans le mille. L’état détruit, le pouvoir détruit, le pouvoir privé détruit, l’argent détruit, l’humain détruit, l’humain est un animal, l’humain détruit l’animal, le végétal, les liens, l’humain reste passif, la planète tousse et souffre et s’apprête à l’expulser. Houssam raconte « l’extinction », concentre ce qu’il y a à dire de « l’avant extinction », va plus loin qu’on oserait, dépasse largement les limites qu’on aurait posées (par conviction ou par lâcheté), et c’est le style qui promet la cohésion du texte, l’assemblage des différentes parties du « discours », de ce « récit fictionnel » qui remue la non-radicalité, l’hypocrisie, plonge dans le politiquement-très-incorrect.

Désolé, je lis mes mails via mon smartphone. Je suis toujours sur le qui-vive. On est connecté ou on ne l’est pas. Il faut. Je disais donc que nous sommes généralement contre la violence sauf « exceptions ». Toujours. La saveur de la paix, de la tranquillité. Chacun veut être peinard chez lui, ne pas avoir à subir ceux des quartiers pauvres qui sont tellement indisciplinés, pouilleux, méchants, mal élevés. On ne veut pas des jeunes qui font trop la fête, trop de réseaux, trop de choses sexuelles pas nettes. On ne veut pas de l’esprit acariâtre des passagers de transports en commun, des chauffeurs dans les bouchons. On ne veut pas trop des anglais, des arabes, des corses, des marseillais, des ch’tis, des parigots, des portugais ou des sénégalais (…) du merdeux à dreadlocks qui joue du djembé, du mec qui sort de prison, de l’oncle qui est de droite, du cousin socialiste, du chef de service qui aime bien faire des commentaires sur la taille des poitrines de ses salariées. On n’aime personne. On n’aime rien. (…) Je suis meilleur ? Non, j’ai dit « on », je suis dans le « on ».

DATACENTER, Léonel Houssam, extrait.

C’est juste avant l’extinction…
Le regard sans compassion porté par Houssam sur notre monde.

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DATACENTER
, Léonel Houssam, aux éditions du Pont de l’Europe.

120 pages de Léonel Houssam + 14 de photos de Yentel Sanstitre.

yentel_sanstitre


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Un site, des textes :
https://leonel-houssam.blogspot.fr/

Un profil, des statuts :
https://www.facebook.com/leonelhoussam3/

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Hum Toks / E.5131 / Eric SABA

Compilation: « Des Standards de Philippe Jolly »…

26 Jan
Sortie de la compilation « Des Standards de Philippe Jolly » : 16 artistes et groupes réunis pour rendre justice au chanteur. Entretien avec Bebert (groupes Stalag/Les Standards), Kick (Strychnine) et Boubou (Strychnine/Les Standards)

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Ce mois de janvier 2018 augure pour le rock français quelques belles émotions à vivre ou revivre, restituées à l’air du temps, après avoir sommeillé sous la poussière des ans, avec la sortie de l’album « Les Standards de Philippe Jolly » compilant 17 titres, dont 16 reprises par autant d’artistes et groupes de chansons du charismatique chanteur des Standards, et un titre original issu de son album solo « Figures de Femmes ». Groupe fougueux, prolifique et atypique, Les Standards furent, avec Strychnine, Stalag et d’autres, parmi les formations les plus flamboyantes et importantes de la scène rock bordelaise des années 80. Pourtant si la musique des Standards et la poésie de Philippe Jolly ont laissé dans le cœur de nombreux adeptes et passionnés la trace d’une référence prégnante et influente, c’est peu dire que les talents du chanteur et parolier décédé en 2010, n’ont été jusqu’ici que trop injustement négligés par la postérité et abandonnés à un oubli intolérable. Il était temps que justice leur soit rendue. Et c’est à l’initiative de son ami Raymond Bélliard, dit Bébert, bassiste des Standards, que de nombreux musiciens ont souhaité participer à cette juste cause et témoigner de leurs souvenirs, leur reconnaissance, leur estime pour la créativité de Philippe Jolly, de leur attachement au personnage aussi, avec conscience, tendresse, générosité et conviction. Entièrement auto-produit et supervisé par Bébert, le projet abouti donnera lieu le 03 février au Théâtre Barbey à Bordeaux à un concert collectif, dont les organisateurs ont souhaité l’entrée à prix libre : l’occasion pour la responsabilité de chacun d’apporter son soutien financier délibéré à cette démarche résultant d’un investissement personnel obstiné, l’occasion aussi de repartir avec un souvenir rare, puis qu’outre la compilation, y seront également disponibles à la vente des stocks retrouvés de Cd des Standards et de vinyles de Philippe Jolly. C’est au cours d’entretiens successivement menés, que nous avons choisi de regrouper pour des raisons de lisibilité, que trois des amis du chanteur impliqués dans cette aventure, Bebert (bassiste de Stalag et des Standards), Kick (chanteur et guitariste de Strychnine) et Boubou (batteur de Strychnine et des Standards, puis de Gamine entre autres) ont accepté de nous en parler.

 

– Bonjour, et merci de nous accorder du temps pour parler de ce beau projet. Comment est née l’idée de réaliser ce disque ?

– Kick : Ça fait un moment qu’on en parle avec Bebert, qui est à l’origine de la chose. Il a été bassiste dans Les Standards, et c’était un ami proche de Philippe, donc ça lui tenait vraiment à cœur de sortir ça. Et à moi aussi. Ils avaient commencé un peu après Strychnine, et fait quelques unes de nos premières parties au début ; et ensuite quand Strychnine s’est arrêté en 1982, notre batteur Boubou a rejoint Les Standards. Quant à Francis Tisné et Claude Ghighi qui sont également présents sur le disque, ils ont été respectivement bassiste et guitariste au sein de Strychnine au début, alors que François Renou était guitariste des Standards. Tout ça, ce sont donc des histoires d’amitié entre gens qui se connaissent très bien. Et puis ça a pris longtemps à se finaliser, car il y a quand même 16 groupes qui participent au disque, donc il a fallu faire venir tout le monde au studio qui est en coproduction.

– Bébert : Ça fait deux ans que j’ai commencé à penser au projet sérieusement. J’ai toujours fait de la musique ; je ne suis pas un grand musicien, mais je suis un passionné. Et il m’arrive de jouer des chansons qui ont plus de 80 ans : pour qu’une chanson vive, il faut que des gens la jouent. Par association d’idée, je me suis donc dit que les chansons de Philippe s’éteindraient, sauf si on les jouait. L’idée est partie de ce constat. Philippe était un ami d’enfance : il me disait que nous étions à la maternelle ensemble déjà. Nous venions du même endroit, Biscarosse, et nous sommes arrivés ensemble sur Bordeaux. Il était bien meilleur musicien que moi, et il a monté Les Standards, alors que j’intégrais Stalag. Et puis après je l’ai rejoins dans Les Standards ; j’en étais très fier, car pour moi ça voulait dire que j’avais progressé techniquement.

 

– Quelle a été la motivation principale de la démarche ? Un hommage ?

– Bébert : « Hommage », « Tribute », j’ai horreur de ça. Je le dis depuis le début. D’ailleurs tu as vu le titre du disque : « Des Standards de Philippe Jolly ». Alors bien sûr c’est un clin d’œil au nom du groupe. Mais ce n’est pas que ça : ça n’est pas un « tribute ». Pour moi un tribute est quelque chose lié à la mort. Or ce disque n’est pas lié à la mort de Philippe, mais à la vie de ses chansons. C’est tout l’opposé. Mais simplement il n’y a pas de mot qui exprime cela, du moins je ne l’ai pas trouvé, et les gens ont l’habitude de nommé « hommage » ce type de compilation de reprises.

– Kick : Le but était que le disque existe pour lui rendre justice, plus qu’hommage. Pour moi c’est un des meilleurs auteurs qui ait eu en langue française dans cette génération là. Et comme beaucoup de gens ne le connaissent pas ou plus, j’espère que ça va remettre en lumière ce qu’il a fait. Dans cette génération là, on écrivait beaucoup en Français quand même, mais Philippe avait un style d’écriture à lui, et une superbe personnalité. Il a eu une vie de bluesman un peu, avec les mêmes problèmes que tu peux lire dans les vieilles biographies de Blues sur des artistes qui avaient beaucoup de talent et qui n’ont pas connu la réussite qu’ils auraient méritée, et qui ont, pour certains, fini par s’autodétruire. Mais ce n’est pas fini : j’espère, et c’est l’intérêt de cette démarche, qu’en écoutant des morceaux, les gens vont se dire que c’était vachement bien. Je fais le parallèle avec le Blues, car je suis plongé dans cette histoire : des musiciens de Blues sont restés ignorés ou oubliés pendant 40 ou 50 ans, et aujourd’hui on ne jure que par eux, alors que des gens très connus de leur vivant ne sont pas vraiment passés à la postérité. Et si on fait ce qu’il faut pour remettre en lumière ce qu’a fait Philippe, j’espère que dans 20 ans, on parlera plus de lui que de Jean-Louis Aubert.  

– Bébert : Voilà. Le but essentiel de ma démarche est de faire revivre ses chansons pour ceux qui les connaissent et aussi de les faire connaitre à ceux qui ne les connaissent pas. Dans le milieu rock bordelais, il est évident que c’est un mec très important. Tout le monde te le dira. C’est un poète, un sauvage. Et puis sur scène, c’était un showman. Il suffit de regarder sa prestation à l’émission « Les Enfants du Rock » pour le voir. Quand tu jouais avec lui et que tu arrivais sur scène, tu étais quelqu’un d’autre. Lui, c’était un personnage. Jouer, c’est un spectacle ; ce n’est pas que jouer les chansons que tu as apprises.

– Kick : Tout ça nous tient à cœur, parce que c’était un mec qui avait beaucoup de talent, qui écrivait de très beaux textes. J’ai joué avec eux ; il a joué avec moi sur le morceau que j’ai fait pour la compilation « Snapshots », aux claviers et au chant. Boubou a joué avec lui pendant des années, Bebert et Charp [membre de Quidam, premier groupe de Philippe Jolly] présent sur la compilation aussi. J’espère que peut-être d’autres groupes reprendront d’autres morceaux ; souvent de jeunes groupes cherchent des reprises à faire, et de rock avec des textes en français qui tiennent la route, il n’y en a pas tant que ça. Chez Philippe il y a de quoi faire.  

 

– Qu’est-ce qui faisait selon vous des Standards un groupe atypique ?

– Bébert : Sa plume ! Et puis François Renou avait une part importante dans la couleur des Standards, et le jeu de Boubou, qui avait rejoint le groupe aussi. Mais tous ceux qui ont participé au groupe en ont fait un groupe atypique. Tous les groupes « st » de Bordeaux chantaient en Français : Stalag, Strychnine, STO… Tous les groupes sont différents. Kick est différent aussi, tout comme le chanteur de Stalag. Tous avaient leur truc particulier. Pourtant c’est évident que Les Standards étaient atypiques. Il y a eu un changement dans la musique dans les années 76-77, et tous ces groupes là ont fait partie du début de l’explosion et de cette période charnière. Donc ça leur donne une légitimité supplémentaire, même s’il y a eu et il y aura toujours de très bons groupes. C’est en ça que c’est hyper important en musique.

– Kick : D’ailleurs François Renou, le guitariste des Standards, qui a composé pas mal de morceaux avec Philippe, a participé au disque, sur un morceau avec Ze Closh. Charp, qui était membre de Quidam, le premier groupe de Philippe, également.

 

– Ne vous étiez-vous pas rencontrés au festival punk de Mont de Marsan de 1977 ?

– Bébert : Kick y était ; il jouait. Philippe y jouait aussi, avec son groupe d’avant, Quidam. Les deux ont fait l’ouverture de ce festival : ce n’est pas rien ! J’y étais en tant que spectateur. C’est un souvenir extraordinaire ; ça a été quelque chose de très important dans le paysage musical mondial. Mythique.

 

– Boubou, comment as-tu rejoint l’aventure des Standards ?

– Boubou : On s’est connus il y a très longtemps. La première fois que je l’ai rencontré, c’était aux alentours du festival de Mont de Marsan. Quidam avait ouvert la seconde journée du festival ; je les connaissais déjà d’un peu avant. C’était un groupe de Biscarosse qui venait jouer dans les MJC à Bordeaux. Et puis à la fin de Strychnine, il m’a dit qu’il cherchait un batteur pour Les Standards, et j’ai tout de suite rejoint le groupe avec joie. C’était une période troublée… On a arrêté Strychnine au 1er de l’an 1982. Je répétais alors avec un groupe de Dreux, Les Paparazzi, et j’ai débauché le bassiste des Paparazzi, Didier Rousseau –un super bassiste qui jouait sur une Rickenbacker-, pour qu’il vienne jouer avec moi dans Les Standards. Il a joué quelques mois avec nous, jusqu’à Boulevard du Rock, avant de partir pour un autre groupe. L’intégration s’est passée très facilement : on a appris les morceaux existants de suite, et on s’est vite mis à composer. Philippe était très prolifique ; et entre lui et François ça composait beaucoup. Il était jeune et fringant !

 

– Pourquoi as-tu eu envie de jouer avec lui ?

– Boubou : Parce que je l’aimais ! Il était brillant, attachant. Beaucoup moins « dark » que Darc. Mais il écrivait de très beaux textes. Et de mon côté, je ne voulais pas retourner vers un groupe sans répertoire, qui part de zéro. C’est long et fastidieux. Ce qui m’intéressait était de m’adapter au répertoire des Standards, le modifier un peu à ma sauce, mettre ma patte. J’ai fait ça avec tous les groupes dans lesquels j’ai joué par la suite. Bien sur je connaissais déjà leur répertoire, puisqu’on faisait souvent des concerts ensemble. Et puis il y avait un lien amical fort. On se voyait souvent ; à l’époque on travaillait dans les mêmes bars. Et on faisait souvent des concerts ensemble, avec Strychnine, Les Standards, Stalag, STO : enfin tous les « st » ! On était potes. Tout m’intéressait en lui : les textes, la musique, le personnage. Il était charismatique. La scène, c’était son truc. Je regrette qu’il soit mort à 53 ans ; c’est dramatique.

 

– Qu’avais-tu envie d’apporter à sa musique ?

– Boubou : De la puissance ! Je suis un batteur puissant. Le précédent batteur des Standards, Jeff, jouait bien, même s’il avait un jeu un peu timide, mais qui collait bien avec le style du groupe quand même. Moi, je joue « gros bras », et ça a fait évoluer le style du groupe ; ça a changé sa couleur sonore. Le jeu du batteur y fait souvent : si tu enlèves le batteur de Led Zeppelin du groupe, ce n’est plus Led Zeppelin, idem avec les Who, les Rolling Stones, etc… La batterie, c’est une manière de faire groover le groupe ; ça précise l’identité.

 

– Jusqu’à quand es-tu resté membre des Standards ?

– Boubou : Jusqu’à la fin, vers 1985-86. L’histoire du groupe s’est terminée en eau de boudin. On avait fait notre mini-album, un 6 ou 7 titres, dont la pochette avait été faite par un type des Beaux Arts. Je la trouve moche, et en prime il n’y a pas le nom du groupe dessus, juste celui de l’album « Jack et Jerry ». Ce qui faisait que les disquaires ne savaient pas où le ranger ni où le trouver quand on leur demandait, et que ça a été un gros bide, car il s’est mal vendu. Ça m’a foutu le moral en berne. Et par ailleurs, le bassiste était en train de construire son studio d’enregistrement, Le Chalet ; le guitariste était en train de monter le magazine Club et Concerts, ce qui lui prenait aussi pas mal de temps. Et puis il y avait l’usure du groupe : ça durait depuis 7 ans, sans reconnaissance. D’une manière générale les groupes bordelais de cette époque n’ont pas eu beaucoup de reconnaissance, au niveau national. Le premier qui en a eu une a été Noir Désir. Mais il y a eu de très bons groupes avant, comme Camera Silens et d’autres, qui n’ont eu aucun écho national, et se sont essoufflés, faute de reconnaissance par la presse notamment. Quand tu n’as pas de papier écrit sur toi, les maisons de disque ne s’intéressent pas à toi. Alors tu rames d’autoproduction en autoproduction ; et au bout d’un moment, ça use. Surtout quand tu es jeune : tu as envie que ça se passe vite. Avec l’âge, tu peux attendre. Mais quand tu as 20 ans, il faut que ça bouge. Quand tu vois Starshooter, Lili Drop, et tous ces groupes qui à l’époque étaient suivis par la presse, et donc dont les disques étaient produits, il y a de quoi être désolé d’avoir le sentiment de ne pas avancer, faute de soutien. Après Philippe a fait son album solo en 1987 ; je l’ai alors un peu suivi sur scène, même si je ne jouais pas sur l’album, car à l’époque, j’avais déjà rejoint le groupe Gamine. Kick a raison de parler d’une vie de bluesman : Philippe a fait des piano-bars pendant des années, sans vraiment en retirer grand chose.

 

– Comment s’est développé le projet avec les artistes qui y participent ?

– Bébert : J’ai été voir The Lookers, qui sont du Pays Basque, puisque j’y habite à présent. Je leur ai demandé si ça les branchait de reprendre une chanson. Ils m’ont répondu « oui » très rapidement, et comme ils ont été les premiers, ils ont pu choisir la chanson qu’ils voulaient interpréter. Je m’étais mis en tête que si eux disaient oui, l’idée était bonne et que ça allait faire son chemin.

– Kick : J’avais déjà repris la chanson « En Equilibre » de Philippe sur mon album « Forcené », donc une version remixée figure sur le disque. Mais à part cet enregistrement qui était déjà fait, et le titre « Figures de Femmes » issu de l’album solo de Philippe, tous les morceaux ont été enregistrés pour la compilation, dont « Le Sermon de Jack le Prêcheur » que nous avons repris avec Strychnine. Certains artistes, comme Bebert, moi, Charp, sont présents sur plusieurs morceaux. 

 

Avez-vous contactés vous-mêmes tous les participants, ou y a-t-il des artistes qui se sont proposés spontanément en entendant parler du projet ?

– Bébert : Il y en a un qui s’est proposé spontanément : Allan qui joue dans le groupe Au Pays des Matins Calmes. C’est un ami du fils de Jeff, le premier batteur des Standards, ce qui fait que depuis tout gamin, il baignait dans la musique du groupe. Donc quand il a eu vent du projet, il m’a contacté pour en faire partie. Il y a aussi certains groupes que je ne connaissais pas personnellement et qui figurent sur le disque. Mon projet était de faire un CD pour faire vivre les chansons de Philippe, et comme je savais que certains, comme King Kong Blues, en concert reprennent des chansons de lui, je voulais les inviter. Donc a ça créé des liens supplémentaires.

 

– Parmi les participants au disque, il y a bien sûr vos copains, des artistes de la génération de groupes contemporains des Standards. Mais avez-vous été surpris par le fait que des artistes plus jeunes, qui n’ont peut-être pas connu le groupe lorsqu’il jouait, se réfèrent aux chansons de Philippe et désirent lui rendre hommage?

– Kick : Beaucoup de gens ont participé, à la fois des gens de notre génération et de celle de Philippe, et ensuite des plus jeunes. Tous ont répondu, certains que j’ai contactés comme King Kong Blues, et la plupart que Bebert a contacté.

– Bébert : En deuxième position sur le disque il y a Joujou Duo, qui ne connaissait pas du tout Philippe, ni d’Eve, ni d’Adam, et qui a fait une reprise particulière. J’aurais bien aimé avoir plus de groupes beaucoup plus actuels, de musique électronique par exemple. Mais le hasard y fait beaucoup, et à un moment donné il faut aussi arrêter les recherches et faire les choses. Je sais que d’autres gens, à Paris notamment, préparent une chanson, mais n’ont pas pu le faire dans les temps pour qu’elle soit sur le CD.

 

– Peut-on envisager un deuxième disque à venir, si d’autres reprises te parviennent ?

– Bébert : Ce n’est pas prévu. Mais très certainement on pourra les retrouver sur youtube, comme des videos vont aussi se tourner. On ne peut jamais savoir : quand tu fais quelque chose, c’est toujours du « peut-être ». Effectivement si 15 ou 20 autres reprises se présentent, ça vaudra le coup de faire un disque, parce qu’à ce moment là tout sera déjà enregistré ! Mais honnêtement, on ne sait même pas si on va rentabiliser la chose. C’est moi qui ai produit, avec mes fonds personnels, et si tu voyais le vendeur que je suis, tu prendrais peur.

 

– Comment s’est déroulée la réalisation d’un point de vue technique ?

– Bébert : D’un point de vue technique l’essentiel était d’avoir l’argent pour produire. J’ai un certain âge et je travaille ; je n’ai jamais été riche, mais je ne me plains pas. Quand je décide quelque chose, en général, je vais jusqu’au bout. Donc petit à petit, j’ai mis des sous de côté pour ce projet. Une fois que l’aspect financier a été réglé, j’ai commencé à en parler. Et puis il se trouve que William Valverde, qui tient Tribal Studio à Ustaritz au Pays Basque, et que j’ai rencontré dans un concert, et à qui j’ai parlé du projet, m’a rappelé pour me dire que le projet l’intéressait sérieusement. On a commencé à travailler ensemble : j’amenais les fonds pour produire, il fournissait le studio et la partie technique pour enregistrer. Une autre personne m’a beaucoup aidé aussi : Didier Mauroux, vice-président de Bordeaux Rock et chanteur des Stagiaires, qui m’a associé à la semaine de Bordeaux Rock. Et puis nous avons eu le soutien de la presse et d’Eric Roux, directeur du Théâtre Barbey qui accueillera dans sa salle de spectacle le concert du 03 février. L’envie de faire quelque chose pour à Philippe a fédéré beaucoup de gens. Ce n’est pas moi, le truc important là dedans : c’est Philippe. J’ai été celui qui a lancé le projet -et même au départ je ne comptais que le lancer et me retirer ensuite, si William n’avait pas insisté pour que je reste m’en occuper-  et tout un tas de gens ont répondu présents.

– Kick : Il faut dire qu’Eric Roux, tout comme Didier Mauroux, sont des gens de la génération qui a vu Philippe sur scène. Donc ils se sont sentis concernés. La pochette du disque a été réalisée par la dernière compagne de Philippe. Le texte du livret a été écrit par Jean-Pierre du label Rocka Rolla, qui finance mes vinyles ; il était un ami très proche de Philippe. Donc c’est vraiment une histoire d’amitié et de musique, et je trouve ça sympa comme démarche.  

 

– Les groupes lors du concert vont-ils jouer uniquement des chansons de Philippe ?

– Bébert : On n’a pas de pression ! Chaque groupe va jouer un quart d’heure environ, donc des chansons de Philippe et aussi ses compositions propres ; il y aura 12 groupes. Certains ne pourront pas être là, pour raison professionnelle. Bien sur je regrette ceux qui ne seront pas là. Et Philippe aussi, qui ne sera pas là, même s’il est avec nous sur le disque, puisqu’il y a une chanson tirée de son album solo « Figures de Femmes ». Mais l’idée est que ce concert soit une grande fête. J’avais été voir David Wolfberg, qui tient le magasin de musique Cactus à Bordeaux, pour lui demander l’autorisation de mettre la chanson « Figures de Femmes » sur l’album, puisque c’est lui qui avait produit le disque de Philippe à l’époque, et il m’a très gentiment donné un petit stock d’exemplaires de 33 tours qu’il possédait encore. Donc, comme je te le disais, tout le monde a tenu à participer. Le projet a mis deux ans à aboutir, mais le CD est là, et c’est bien. Derrière l’idée est aussi de faire un ou plusieurs concerts : pour moi c’est la cerise sur le gâteau. Et j’espère qu’il y aura du monde.

– Kick : Le disque vinyle de son album solo sera donc disponible lors de la soirée du 03 février à Barbey, et ça vaut le coup de l’avoir, car c’est vraiment un bel album. Et on pourra aussi y trouver des CD des Standards, puisque Boubou en a qu’il va vendre. Le concert, ce sera une fête, et comme l’entrée est en prix libre, j’espère que les gens repartiront avec un disque.

 

– Envisagez-vous aussi de pouvoir diffuser et exporter ça dans d’autres villes ?

– Bebert : Oui, après ça va circuler. J’ai fait ce que j’avais dit : ce disque. Après, je suis musicien, pas businessman. D’ailleurs j’ai plus donné que vendu de disques pour le moment ; je suis très mauvais pour le commerce. Mais il y aura autre chose de prévu après le concert du 03. Déjà au Pays Basque, quelque chose va se faire, parce que plusieurs participants du disque y vivent : Joujou Duo, Barnum, The Lookers, moi-même, et Kick en est originaire. Et puis j’espère qu’à Paris il y aura également une soirée, sans doute pas avec les 17 groupes, mais au moins quelque uns. Mon fils a un label qui s’appelle Control et fait partie du Collectif 23, dans le Xème, qui tient une salle de concert. Donc j’espère que quelque chose pourra se faire à Paris aussi. 

 

– Boubou, lorsque Bébert vous a parlé de son idée de compilation, comment l’as-tu accueillie ?

– Boubou : Ça faisait longtemps qu’il murissait l’idée. Ça m’a fait super plaisir ! Mais je me demandais quel groupe allait venir. Il est vrai qu’au début, je n’y croyais pas trop ; je pensais que c’était un projet en l’air. Notre reprise, avec Strychnine,  a été la première enregistrée, il y a un an et demi, au studio d’Ustaritz. Maintenant j’espère que cette compilation va toucher le plus de monde possible, et diffuser les chansons de Philippe. Comme le disait Kick, j’ai récupéré des exemplaires de la compilation des Standards qu’on a faite avec Bordeaux Rock en 2005, « Il ne fallait pas les réveiller », et qu’on va également vendre lors du concert du 03 février. C’est quasiment l’intégrale des Standards. Je suis très content et ému de participer à cette aventure et je suis reconnaissant à Bébert d’avoir eu le cran de monter et de mener à bien ce projet.

 

Nous remercions Bébert, Kick et Cathy et Boubou et Clarisse

Pour commander le disque : raymond.belliard@wanadoo.fr

Page de l’évènement : https://www.facebook.com/events/2054137658140880/

 

Miren Funke

Respect…

25 Jan

Tout commence le 11 janvier 2015 :

Avancer devient impossible tant la rue est serrée, et sur le boulevard Voltaire, l’immense flot humain s’est immobilisé. Nous sommes un million et demi dans la rue, à exprimer la même révolte après l’attentat de Charlie Hebdo et les prises d’otages qui ont suivi… L’écriture s’est imposée comme une urgence.  « Respect » est né dans ces instants partagés au cœur d’une foule d’anonymes déterminés à faire entendre la voix du silence, comme une respiration, sans amalgame ni polémique. (Yves Duteil)
Au fil du travail sur l’album, avec les conseils éclairés de Noëlle, son épouse, Yves Duteil a peaufiné, taillé, pour ne garder que l’essentiel. 12 chansons à l’écriture ciselée, des mots bienveillants qui apaisent et redonnent espoir en l’humain, avec le respect en toile de fond.
Respect est d’ailleurs la chanson qui ouvre l’album :

C’est la force qui nous inspire / Pour pouvoir résister au pire / Et faire face en restant debout/ Plutôt que de vivre à genoux.
Respect pour Mohamed, Aïcha et tant d’autres qui sont victimes de l’amalgame que certains font entre musulmans et barbares

Les histoires se nouent / Les enfants s’éparpillent / Mais vous êtes partout dans l’album de famille.
Respect pour Mamie, Mamita, Mamito : Tu m’as tellement conté l’histoire / Qu’elle est gravée dans ma mémoire / Ta Mamie, Mamita et toi Mamito / Vous m’avez transmis le flambeau.
Respect pour sa femme à qui il fait une déclaration d’amour en suivant le fil de leur histoire et quarante ans plus tard : je t’aime toujours / Plus fort encore qu’au premier jour.
Respect pour ce Passeur de lumière, un peu de Frison-Roche / Un soupçon d’Archimède /

Un grain de Moitessier / Et d’Henri de Monfreid… Et un peu de son grand-père : A travers sa mémoire / Il m’a ouvert les cieux / Et m’a confié un soir / « Quand je serai trop vieux / Un jour j’y verrai moins / Et tu seras mes yeux ».
Respect aussi pour son petit « âne corse »  : Mon petit âne corse / Tu portes ton fardeau / Tu respire la force / Et sans courber le dos… / Tu viens boire mon amour / Dans le creux de mes mains.

Et respect pour l’apiculteur, La légende des immortelles, une chanson écologique qui nous rappelle que les abeilles sont essentielles à la vie sur terre : Et sur les sentiers du printemps / Peu à peu en humble artisan/ Il aura forgé la légende / Des immortelles et des lavandes.
Respect même pour un vieux piano chargé de mémoire, et à travers le piano, pour sa mère : Quand ses mains voltigeaient / Comme un oiseau sans cage / Je sentais qu’elle m’offrait / Son amour en partage.
Respect pour la vie malgré tout, et l’espoir têtu d’un monde meilleur, A l’abri du meilleur : S’il est vrai que l’espoir un jour peut refleurir / S’il s’éveille un matin comme un arbre à son heure / Nous aurons beau tout faire pour nous garder du pire / On n’est jamais vraiment à l’abri du bonheur.
Respect et attachement pour ce quelque part où l’on est né, où l’on a vécu, ici pour Paris, au delà des rêves d’Argentine : Du delà de l’eau / Ton pays devient merveilleux / Avec son ciel gris, avec son ciel mauve / Et tu pleures un peu / Mais quand tu fermes les yeux / Tu revois sur fond de brume et de pluie / Un coin de bistrot, un ami / Un morceau de toi revit…

Respect enfin pour ces armées d’amour, pour résister à la peur, à la violence qui frappe le monde aveuglément : Je pense à ces âmes en allées / Dont le seul crime aura été / D’être heureux au mauvais moment / Tous, nous aurions pu être là.
Respect qui s’exprime par Une minute de silence : Une minute de silence / A l’envers de la peur / Un souffle d’espérance / Un battement de cœur.

Tous ces mots sont portés par des couleurs musicales métissées, ouvertes à tous les choix musicaux, chaque chanson ayant sa propre couleur, avec les arrangements et les orchestrations de Franck Monbaylet, inspirés par les arrangements pour cordes d’une chanson de Véronique Sanson : Et je l’appelle encore.
Et là encore, respect réciproque entre Yves Duteil et Franck Monbaylet : J’étais totalement « chez moi » dans sa vision rythmique de mes chansons.
Et respect pour tous les musiciens qui ont mêlé leur notes dans le plus parfait esprit d’équipe, de Mokhtar le batteur, Rhani le percussionniste, Joan le contrebassiste, Pierre le guitariste, aux violonistes, violoncellistes, altistes.

Photo Toussaint Pery-Kacsa Alhambra2018

Une fois les textes achevés, la musique a jailli du silence et de l’émotion pure. Tempos des percussions à fleur de peau, harmonies suspendues de la contrebasse, guitare jazzy et cordes vibrantes d’émotion.
Dans le livret qui accompagne l’album, outre les textes des chansons, Yves Duteil présente ses musiciens et tous ceux qui ont oeuvré à la réalisation de ce 15 ème album, une description imagée qui en dit long sur l’importance de chacun dans l’équipe, par exemple : Pierre, guitariste reconnu, dans le monde du jazz, à l’aise dans tous les styles, et qui joue avec la grâce du funambule sur le fil de ses arpèges.
Douze chansons, douze histoires ancrées dans l’actualité, chargées de sens, de générosité et d’espoir, pour ce chanteur qui en quarante-cinq ans de carrière, a rassemblé autour de lui un public fidèle, loin de l’industrie du spectacle et des grands médias, et malgré les campagnes de dénigrement injustes dont il a fait l’objet.
Respect pour l’artiste qui nous a donné quelques unes des plus belles chansons de notre patrimoine, et respect pour l’homme aux multiples engagements civiques et humanitaires, en associant Noëlle, son épouse, celle à qui, dit-il,  Je dois tout.

 

Danièle Sala

 

Et pour suivre Yves Duteil  , c’est là –>

 

Pour mémoire, le 11 janvier 2015, c’était ça, près de Nation… vers 16 h…

Entretien avec Alice Botté, un activiste de la musique

15 Jan

L’homme fait partie de ces musiciens que l’on a bonheur à retrouver, avec de moins en moins d’étonnement, et de plus en plus de fidélité, toujours aux côtés des artistes que l’on admire. Charlélie Couture, Jacques Higelin, Alain Bashung, Jacno, Christophe, Daniel Darc, Hubert-Félix Thiéfaine, Damien Saez… et toujours un même guitariste mettant ses talents et l’originalité de son jeu au service de leurs répertoires. Mais, travailleur acharné, explorateur perpétuel, hyperactif de la recherche musicale, Alice Botté, après un passage au sein du groupe Jad Wio, mène de front une double-vie de « sideman » prenant plaisir à accompagner des artistes d’envergure, et de véritable activiste de projets artistiques qui multiplie les expériences. Profitant d’un temps-mort, plutôt d’une pause, pendant le « service » -au service des autres-, et dans la vie du groupe Berline, qu’il a fondé avec sa compagne Barbee, l’artiste se lance sur les routes, au hasard des dates qui s’emperlent, pour présenter une performance solo, où il avance une philosophie politique au grès de ses idées et de ses expérimentations instrumentales. Mais c’est encore lui qui nous en parle le mieux…

 

– Alice, bonjour et merci de nous accorder un peu de temps. Commençons par une actualité récente :  ta reprise de « Hamburger Lady » parait sur une compilation du Label Unknown Pleasures de reprises du groupe Throbbing Gristle, destinée à récolter des fonds pour aider la chanteuse Genesis P.Ooridge dans sa lutte contre une grave maladie. En quoi ce projet te tenait-il particulièrement à cœur ?

– Genesis P. Ooridge fait partie du groupe Throbbing Gristle, qui est un collectif qui m’a fondamentalement  appris la liberté, comme forme d’expression. Quand j’avais 18 ans, j’ai découvert cette musique là, et ça a été une révolution, un bouleversement pour moi. Et il n’y a pas longtemps, un label espagnol a lancé ce projet. J’y ai répondu. Mais je ne savais pas si ma reprise allait être retenue, d’autant que c’est un titre assez dur ; le texte est violent. Ils ont sélectionné le morceau. Ça sort bientôt. Les bénéfices bien évidemment vont à Genesis pour soigner sa maladie et suis heureux de figurer sur ce disque  à côté de Marc Hurtado, Peaches et LTNO entre autres. Throbbing Gristle représente  la contre-culture anglaise, cette  autre option de considérer la musique ; il  est une de mes bases fortes.  Barbee, ma compagne, a tourné des images la nuit pour réaliser le clip de la chanson,  proche de l’expressionnisme allemand, un film très organique. Sombre et lunaire, tout comme le post-punk, les musiques industrielles, expérimentales qui  ont construit ce jardin obscur, ce lieu où je peux me laisser aller, sans être coincé dans un format traditionnel de chanson. Je suis guitariste et on me dit souvent que je suis « rock » ; mais le Rock pour moi, c’est les fringues et  surtout une culture, une iconographie, sa forme quant à elle n’a jamais évolué.

– Chanter en anglais, lorsqu’on est un artiste qui dans sa création privée privilégie l’usage du Français et se réfère à l’importance de l’influence littéraire francophone, ne constitue-t-il pas une contre-évidence ?

– Je n’allais pas traduire le texte de « Hamburger Lady «  en français ; je ne voulais rien toucher. Donc  ça ne me pose pas de problème, dans la mesure où c’est quelque chose de ponctuel, et pour un morceau dont je suis fan. C’est parfois difficile d’écrire en Français en ayant de bonnes idées et d’être pertinent ; mais j’adore cette langue et j’adore la littérature. Je lis énormément et j’essaye de découvrir plein de choses. La langue française est tellement riche et vaste, tellement excitante, que je ne vois pas pourquoi on ne s’en servirait pas. Et avec Berline, c’est une question qu’on ne s’est même pas posée. Pour Barbee écrire en français est naturel et évident ; c’est là où tu touches le plus de choses et tu peux vraiment toucher  les mots de près. Quand tu ne maitrises pas une langue étrangère, pourquoi l’utiliser, à part vouloir singer les Anglo-saxons. Tu ne peux pas aller loin dans ce territoire inconnu. Ecrire dans sa langue est une évidence, la question ne se pose  pas.

– Tu as accompagné Damien Saez, qui a une écriture très poétique et chargée de sens, et qui a pourtant dans sa discographie un album en Anglais, « Yellow Tricycle »…

– J’ai fait une tournée avec lui l’année dernière. Il écrit  bien. Quand il m’a appelé, je connaissais peu le personnage, et son univers . C’est un artiste … spécial…Je ne savais pas qu’il avait écrit en anglais comme les Beatles.

– Où en est l’aventure du groupe Berline que tu as fondé avec ta compagne Barbee ?

– Avec Berline, avant de faire le premier album, on avait fait beaucoup de concerts, écumé les bars et joué en première partie d’Indochine à l’époque de leur tournée « Alice et June Tour ». Et puis on en a eu un peu marre. C’est vraiment un boulot de fourmi d’aller jouer dans les bars. Donc on a mis ça en stand by. Mais on a enregistré un deuxième album ; simplement on a envie de continuer le groupe pour le moment plutôt en faisant du studio, des clips. Barbee aussi a d’autres activités ; elle bosse pas mal, donc c’est assez difficile de trouver du temps. Mais on a un nouveau petit projet, parce qu’on ne peut pas se priver de bosser ensemble, évidemment ! C’est une histoire d’amour, mais c’est aussi une complicité artistique énorme, pas que musicale d’ailleurs. On est une petite entité et il ne faut pas que ça s’arrête comme ça.

– Actuellement tu tournes en formule solo. Qu’est ce que tu voulais exprimer de différent ?

– Depuis longtemps  je voulais expérimenter seul sur scène, avec des machines, des sons préenregistrés qui créent des textures. Comme j’ai beaucoup tourné depuis dix ans -j’ai dû enchainer tous les ans 100 à 120 dates-, je me suis dit que maintenant que j’en ai le temps, c’était l’occasion de ne pas passer à côté de ce rêve,  se retrouver seul, improviser, se remettre en danger devant un auditoire qui ne connaît pas cette facette de toi. Je voulais retrouver cette liberté d’action ; être le seul responsable à bord d’un navire sur la houle, passer les tempêtes et atteindre un cap. C’est pourquoi j’ai créé en juillet 2017 au Festival Girolita, qui programme electro, techno et installations ce projet qui s’appelle « FEU Brûlé ». C’est une composition de 30minutes,  divisée en quatre mouvements qui s’enchainent et dont l’axe est la décroissance sonore. Cette performance me permet de me réinventer, de retourner voir ailleurs et de ne pas rester dans le confort et la certitude. Chaque concert est un différent : je pars de l’idée  de désintégration,  qui donne un début très radical, une tempête de bruit. Le  1er mouvement s’appelle « Maria » et dure dix minutes. Ce sont des sons très violents qui meurent petit à petit, et le set s’enchaine avec des morceaux qui vont vers le beau et le doux pour s’achever avec « Le Puits ». Je pense que derrière la violence et le monde toujours ultra-croissant, existe l’idée de décroissance, de ralentissement et d’approche du beau. C’est ma certitude. L’idée de faire moins me plaît beaucoup. « FEU Brûlé » est un ma  vision du « faire trop » : il faut qu’à un moment donné, on prenne le temps et on arrive à des choses simples et belles. J’aime la douceur ; je déteste la violence. Je suis un grand sensible !

– En parlant de douceur, à titre personnel, lors du concert d’Hubert-Félix Thiéfaine à Arcachon en 2015, j’avais trouvé la version acoustique intimiste que vous aviez jouée de « Syndrome Albatros » magnifique. N’en était-ce pas un bel exemple ?

– Justement c’est un morceau beau, doux, planant. C’est un morceau de pause pour moi et Lucas [Thiéfaine] qui jouons à fond pendant deux heures, et soudain on s’installe sur des tabourets, et c’est un peu comme quand tu prends l’apéro avec tes potes et que tu es tranquille. C’est une magnifique chanson et Hubert la chante bien.

– Destines-tu cette formule solo à un enregistrement ?

– Je ne sais pas si un enregistrement se profile. Je n’en suis qu’au début de l’aventure. Je cherche, je tâtonne. En fait j’aimerais faire une vidéo du projet, un film, on verra, je dois trouver, me laisser aller, me livrer à moi-même, cultiver l’instinct et chopper les bonnes choses au vol, quand elles arrivent. J’ai plein de projets.

– Comment se passe la mise en relation avec les artistes pour qui tu joues en général ?

– J’ai eu la chance à 19 ans d’être contacté par Charlélie Couture, à ses débuts. Et grâce à lui j’ai pu rentrer dans ce réseau, et surtout garder l’identité de guitariste que j’avais. Je suis complètement autodidacte ; je n’ai pas fréquenté d’école de musique. J’ai appris la musique d’une manière vraiment instinctive et sans limite. Un son, un accord, une suite de notes qui me paraît bien, je joue, même si ce n’est pas vraiment inscrit dans les codes de la théorie musicale. Je n’ai pas d’a priori, pas de barrière. Il faut pouvoir créer son identité, et c’est ce que les artistes aiment. J’ai la chance que les gens m’appellent pour ça.  Hubert un jour m’a appelé pour me proposer de partir avec lui en tournée et que si ça me branchait, il aimerait bien que j’en sois. J’ai dit « oui, évidemment ». Ensuite la discussion en général part vite vers d’autres sujets : musique, cinéma, littérature. Hubert [Thiéfaine] passe beaucoup de temps dans la littérature. C’était déjà un dénominateur commun entre nous. Quand on se parle en tournée, on ne parle quasiment que de littérature, car c’est ce qui nous intéresse. On échange des points de vue et c’est très riche comme approche. Ce qui fait que quand tu montes sur scène, tu es heureux d’y être avec un type avec qui tu partages plein de choses. Bon, je ne vais pas faire l’éloge d’Hubert, mais c’est vrai que c’est un mec assez gigantesque, et un super humain en plus.

– Lorsqu’un artiste te contacte, qu’attend-il de ton jeu précisément ou de ce que tu peux apporter de toi à son univers ?

– Ce qu’il me demande, c’est un acte de base : que je sois vraiment cohérent avec moi-même et que je ne mette pas à jouer des choses qui seraient en dehors de mes cordes. Il entend  la couleur de ma guitare et me guide. Mais ça se fait d’une manière vraiment implicite. Il sait comment je joue, donc il m’appelle pour ça. On n’a pas besoin de parler beaucoup. Je ne débute pas non plus : ça fait 40 ans que je fais ce métier, donc les gens à force me connaissent.

– Jouer au service d’autres est-il pour toi aussi une source de revenus qui te permet une totale liberté d’expression dans tes compositions personnelles, puisque que tu n’as pas besoin d’en vivre et donc de soumettre ta créativité à des impératifs commerciaux?

– Pas exactement. C’est confortable d’être en tournée avec un « gros » artiste, on te paye bien et le reste du temps tu peux rester glander à la maison. Mais ce n’est pas le cas en ce moment. Je dois vivre de ce projet, donc chercher des concerts, travailler dans mon studio sans me soumettre à des critères commerciaux … Pas facile, mais je n’ai pas le choix et cette précarité est plutôt un vrai stimulant.

– La mise en danger par la recherche est-elle selon toi nécessaire pour un  artiste ?

 – Complètement ! A un stade, quand tu es musicien, tu as besoin de ça, faute de quoi tu prends vite la poussière et tes idées sont épuisées. Il est nécessaire de se faire peur pour reconstruire et continuer à faire de la musique. Je parle de peur, mais ce qui est paradoxal, c’est que quand je monte sur scène pour ce projet, j’ai zéro trac. Je suis content d’y aller. Alors qu’en général quand je monte sur scène avec les autres, je suis mort de peur. Mais là, c’est mon affaire, donc je sais que si je la rate, ça ne regarde que moi.

– Tu évoquais tout à l’heure Charlélie Couture, mais tes débuts ne se sont-ils pas fait au sein d’un groupe avec son frère Tom Novembre ?

– Si ! C’était Les Fonctionnaires. J’habitais à Nancy à l’époque, et c’était un trio, influencé par des groupes comme The Cure. J’écrivais mes premiers textes en français et on avait justement cette attitude un peu « rock nouveau », comme The Cure, Marquis de Sade. On a fait une maquette qui a été un peu diffusée, mais ça n’a pas duré longtemps, car après Tom est parti faire sa carrière, mais c’était une bonne expérience. Mais à l’époque j’étais déjà fan de Throbbing Gristle et des expérimentations. J’ai compris très vite que si je devais faire de la musique, ce ne serait pas dans la Chanson, parce que ce n’est pas mon caractère : je préfère triturer des sons, les mélanger, aller les chercher, plutôt que d’écrire une chanson.

– Tu dis avoir appris la guitare en autodidacte. Qu’est-ce qui t’a poussé vers cet instrument ?

– Le hasard… Mon frère ainé avait eu un grave accident et est resté longtemps à l’hôpital. Il avait une guitare dans sa chambre à la maison, et  j’ai commencé à gratouiller. Des copains avaient amené dans la chambre d’hôpital un électrophone et des vinyles, de Hendrix entre autres. J’avais 10-11 ans, et ça m’a un peu retourné le cerveau. J’écoutais ces musiques alors que mon frère était dans un sale état, avec des tuyaux partout, des fractures, après deux mois de coma, et la musique réhumanisait tout ça et me donnait de l’espoir, parce que je me disais qu’il allait s’en sortir. Et ça a stimulé mon envie de jouer. Ca a été un déclencheur, et quand il est rentré à la maison après des mois, il m’a poussé à jouer. Tous mes frères m’ont poussé à faire de la musique ; j’étais le petit dernier de quatre frangins et mes trois grands frères m’ont éduqué dans ce sens là.

– Un spectacle a été récemment annulé pour cause de fermeture de la salle devant vous accueillir. La politique de restriction budgétaire concernant la culture et l’art fragilise les artistes aussi. Comment appréhendes-tu ce phénomène ?

– Ça fait froid dans le dos, mais ça fait partie de l’évolution. Tu t’adaptes ou tu crèves. La musique est devenue un gros business. Et surtout on rentre dans une dictature monarchique où la culture n’a pas vraiment sa place, et n’est plus une priorité. Mais c’est ce qu’on veut nous faire croire. On est dans une ère de productivité très manichéenne. Les gens aujourd’hui doivent d’abord bosser, dur, toute la semaine sans avoir la certitude d’avoir un emploi demain. Hein Macron, tes ordonnances à la con … Bosser, bosser, alors pas le temps de se reposer et de consommer de la culture, qui ne sert à rien pour les politiques… Alors pourquoi injecter des subventions pour générer et faire proliférer la culture qui distrait les gens de l’objectif principal : bosser ? Donc pour les gouvernants, la culture c’est TF1, Hanouna, Ruquier, la télé réalité, de la sous merde en fait. Et c’est bien suffisant pour le peuple. On prend les gens pour des cons. C’est assez effrayant. Donc se battre, faire exister des projets, se réinventer en toute autonomie est pour les artistes la seule option ; c’est possible quitte à crever la dalle, mais sans jamais se compromettre. Quant aux salles, qui ont besoin de subventions pour diffuser la création, c’est un autre problème qui ne va pas s’arranger. Je reste optimiste et comme dit un proverbe africain, il y a toujours un côté du mur qui est à l’ombre.

– Nous avons justement évoqué avec les membres Strychnine l’époque où la moindre cave de Bordeaux abritait des groupes, le moindre bar proposait des concerts, et où finalement la musique était accessible facilement…

– Kick et Strychnine ? Alors ça, ça me parle ! Je ne sais pas s‘il me connait, mais Strychnine, c’est un des groupes que j’ai beaucoup écoutés. J’ai toujours vraiment beaucoup aimé Strychnine. C’est vrai qu’à Bordeaux, il y a eu plein de groupes. Il y a eu des villes comme ça, comme Nancy, Rennes, qui ont connu une scène musicale foisonnante. Donc respect à Strychnine !   

-Peux-tu parler du groupe Les Petits Bras dont un enregistrement retrouvé est sorti l’an dernier ?

– C’est encore un autre avatar de moi-même. C’était un duo avec Arnaud Dieterlen que j’ai rencontré il y a longtemps, avec le groupe Jad Wio. Après on a beaucoup joué ensemble et c’est un peu devenu mon « petit frère » de son. Un jour on s’est mis à enregistrer chez moi ce qui nous passait par la tête pou s’amuser. Et puis c’est sorti plus de vingt années après. C’était une autre posture. Alors je me contredis un peu en disant que la Chanson Française n’est pas non truc. Mais là justement je voulais me placer en second degré de chanteur, histoire de faire le con. Déjà rien que le nom, « Les Petits Bras » est ridicule. Mais on a fait pas mal de concerts quand-même. En tous cas c’est une expérience qui m’a beaucoup apporté et à un moment de ma vie où il fallait que je me rassure, d’où le besoin de mélanger un peu de tendresse avec des idées farfelues. Il y a beaucoup de second degré là dedans. C’est toujours dur de parler de sa propre écriture ; mais beaucoup de textes sont sortis comme ça assez naturellement. C’était très instinctif. Le fait de dire qu’on avait retrouvé des enregistrements perdus était une posture, une connerie de plus pour rigoler. Mais ça dormait dans des cartons, sur des cassettes en fait. Et puis on est retombés dessus par hasard. Du coup on a sorti ça sur Xplose-Music, le label de Berline, qui est un label solidaire. Il faudrait faire des concerts, graver des vinyles, aller plus loin. Il y a un deuxième album d’ailleurs qui est prêt.   

– Tu t’es aussi consacré par le passé à la réalisation de disques, notamment pour le troisième album de Balbino Medelin, « Évangiles Sauvages ». Serait-ce une expérience à réitérer pour toi ?

– Ecoute, c’est très long. J’aimerais bien, mais quand tu réalises l’album de quelqu’un, tu t’immerges dans son univers et ça peut te prendre beaucoup de temps. Avec Balbino, on est restés enfermés chez moi pendant un an. « Balbi », c’est pareil, c’est un petit frère que j’ai croisé y a longtemps, et avec qui je suis toujours en contact. En fait ça vaut le coup de réaliser quelque chose, si c’est pour apporter du mieux à un truc qui est déjà bien, c’est-à-dire pour l’amener ailleurs et encore mieux. Mais je pense qu’on ne peut pas trop s’éparpiller. Quand on est réalisateur, il ne faut faire que ça. A l’époque des « Evangiles Sauvages », j’étais en tournée avec Higelin, je rentrais m’occuper de l’album de Balbino, et en même temps je consacrais du temps à Berline… Je ne dormais plus ! C’est comme dans le film « Phantom of Paradise » : t’es emmuré vivant dans ton studio, on te passe un plat, et on te dit « joue, joue, compose ! ». Pour l’heure je suis vraiment concentré sur mon projet.  

 

Miren Funke

Lien : https://www.facebook.com/profile.php?id=100006955845849

Dates :

15 et 16 janvier à l’ISBA [Institut Supérieur des Beaux Arts] de Besançon,

19 à Brest

20 Malestroit (56 )

02 février à Neufchâtel.

Et d’autres à suivre …

Les oiseaux de passage

11 Jan

Quand Brassens a mis une musique  ce poème de Jean Richepin, il s’est attaqué à une œuvre majeure, mais très peu ont su donner toute son ampleur au texte et à la musique. Et au dessus de tous, Rémo Gary…

Photo NG 2016

Rémo Gary a choisi de prendre le texte intégral, de le mettre en majesté, remarquablement accompagné ( dans la version ci dessous) par Nathalie Fortin une pianiste qui ne fait pas un pléonasme musical sur les vers mais qui amène la musique avec une finesse et une subtilité rares. C’est comme la BO d’un film, la musique n’est pas que le trait qui surligne comme c’est souvent le cas avec les artistes qui s’accompagnent, et qui parfois ne savent pas faire le choix entre les priorités d’où une valse hésitation entre les mots et les notes. D’abord on s’écoute chanter parce que, quand même, il y a le texte, et puis on s’écoute jouer, parce que, quand même, Brassens a bien travaillé… Le résultat est… souvent déconcertant. Décevant.

La musique doit ouvrir des portes sur d’autres paysages. Et c’est ce que fait Nathalie Fortin.

D’autres interprètes, dans une ingénuité qui pourrait être rafraichissante, choisissent de faire une version guillerette, c’est dansant, on peut imaginer dans la même approche Nuit et Brouillard en lambada, ils étaient vingt et cent venus pour danser… Tout est possible dans le monde merveilleux de la reprise.

Pour « Les oiseaux de passage » Rémo Gary en a fait un mini opéra, sans pathos ni artifice, dans une diction parfaite, avec le geste qui signe le texte et le décor, comme Leprest, l’homme qui sculptait ses chansons. La seule version filmée semble être celle de David Desreumaux, (Hexagone)lors d’une fête à Jean-Michel Boris, la voici, elle est magistrale. A vous de voir et d’écouter…

Parmi les autres interprétations, très diverses, il y a celle de Stéphan Eicher et Taraf de Haïdouks qu’on peut écouter, en version Brassens texte retaillé, mais cher Georges, je déplore que vous ayez escamoté cette strophe…

Là-bas, c’est le pays de l’étrange et du rêve,
C’est l’horizon perdu par delà les sommets,
C’est le bleu paradis, c’est la lointaine grève
Où votre espoir banal n’abordera jamais.

Et j’aime à croire qu’il y a des grèves où on aborde le pays de l’étrange et du rêve..

Le site de Rémo Gary, c’est ici clic sur Rémo  –>

 

 

 

Norbert Gabriel

Deux ans avec/sans Bowie…

10 Jan

J’y songe, ce soir, 10 janvier, bientôt minuit…

Album «Blackstar», David Bowie.

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« Dans le cadre de l’autobiographie, peut-on écrire sa propre mort…? », demande l’élève. Le professeur répond que, par définition, il n’est pas possible d’écrire sa propre mort, mais qu’un écrivain peut trouver des dispositifs pour « mettre en scène sa propre mort », l’achèvement de son œuvre, et offrir cette œuvre post-mortem. Il renvoie alors l’élève aux Mémoires d’outre-tombe de Chateaubriand.

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Avec le souci, peut-être, de faire de sa vie une œuvre d’art, Bowie est ressuscité avant même de mourir.

Ce lundi matin, 10 janvier 2015, il y a deux ans, alors que sur sa page FB « on » annonce son décès et qu’on a du mal à prendre la mesure, les images des deux dernières vidéos reviennent en mémoire : « Blackstar » tout d’abord (titre publié en Novembre 2015), et surtout « Lazarus » (publiée le 7 janvier 2016 sur Youtube) que l’on a visionnée deux jour plus tôt. Force est de constater que Bowie est mort, que Bowie est ressuscité.

De là à voir une manifestation du divin, il y a quelques degrés que certain-e-s graviront sans effort. Qu’il ait joué jusqu’au bout et qu’au terme, il se soit mis en scène rejoignant le ciel ou les étoiles, c’est à n’en pas douter. D’où venait Ziggy Stardust…?

Capture d’écran du clip «Blackstar», de David Bowie, réalisation : Johan Renck. Capture Youtube

https://media.giphy.com/media/yoJC2wQqhXpm97vdeg/giphy.gif

Je n’ai pas un seul album de Bowie chez moi et pourtant je connais un grand nombre de ses morceaux, écoutés attentivement ailleurs, dans d’autres salons. Et puis j’ai suivi, sans le vouloir, son travail. On croise forcément la patte de Bowie quand on écoute Lou Reed, Iggy Pop, Trent Reznor (Nine Inch Nails), que l’on suit David Lynch (qui est aussi compositeur…).

C’est une force qui n’est pas donnée à chacun de ne pas perdre son identité (il en avait tellement / « I’m deranged », dans Lost Highway de Lynch), tout en s’associant aux autres…

J’ai entendu des reproches. Il était « artiste » pendant et en dehors du boulot ? Il « jouait ». Il mentait ? Comme Dali, comme Gainsbourg, chez qui on reconnaîtra les mêmes qualités : sentir l’air du temps, voire le précéder, savoir s’entourer, savoir faire, tout en offrant une signature personnelle. Imposteur ? Oui, génial imposteur. « Beau oui, comme Bowie… ».

Il chantait, dansait, jouait de la gratte, du piano, du saxo, et la comédie… La comédie…

Parce que s’il se laissait voir à la lumière de l’étoile, Bowie est toujours resté une créature de l’Underground, jouant Andy Warhol d’ailleurs dans le film Basquiat. Ils ont tous joué ce jeu dangereux, de l’être, du paraître, du trait forcé… de l’image façonnée. La comédie…

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Ces deux vidéos, « Blackstar » et « Lazarus », deux ans plus tard, elles affichent 36 millions et 45 millions de vues … Pas prêt de disparaître le Bowie.

Vidéo « Blackstar »

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Comme le faisait remarquer Groucho Marx : « Tant qu’on n’aura pas trouvé le moyen de jouir d’un succès posthume, il faudra vous contenter d’un ersatz de Groucho. »
À quel Bowie avons-nous eu accès…?

« Something happened on the day he died
Spirit rose a metre and stepped aside
Somebody else took his place, and bravely cried
(I’m a blackstar, I’m a blackstar) »

« Blackstar », David Bowie, Blackstar

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J’aime ce dernier album. Il m’émeut.

Alors, peut-on écrire jusqu’à sa mort ? Jusqu’à la dernière seconde et même le lendemain ? Oui, il l’a fait.

Qu’a-t-il offert…? Une représentation plus ou moins fidèle de sa personne, de son personnage, de l’artiste…? Son intimité, son image publique…? Se joue-t-il de nous…?

Peu importe…
Le dernier souffle.
Beau, oui, jusque dans la mort…

Capture d’écran du clip «Lazarus», de David Bowie, réalisation : Johan Renck . Capture Youtube

« Look up here, I’m in heaven
I’ve got scars that can’t be seen
I’ve got drama, can’t be stolen
Everybody knows me now

Look up here, man, I’m in danger
I’ve got nothing left to lose
I’m so high it makes my brain whirl
Dropped my cell phone down below

(…)

This way or no way
You know, I’ll be free
Just like that bluebird
Now ain’t that just like me

Oh I’ll be free
Just like that bluebird
Oh I’ll be free
Ain’t that just like me »

« Lazarus », David Bowie, Blackstar.

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Vidéo « Lazarus » :

 

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http://i.imgur.com/kM6yMIR.gif

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E.5131 / Hum Toks / Eric SABA

Réalisez un rêve…

7 Jan

 

Photo DR…

L’année qui commence m’a semblé mériter quelques mots un peu utopiques, et ça peut pas faire de mal…

 

rêves

En attendant que vous fassiez le tri dans vos rêves personnels, voici une suggestion pour participer à la réalisation d’un rêve – olympique- ne faisons pas dans la demi mesure, tant qu’à faire rêvons altius, citius, fortius !

De quoi est-il question ? Il reste moins de 8 jours, ça urge au bout de la piste. Léa Bayekula est une jeune parathlète Bruxelloise de 22 ans, elle évolue au Royal White Star Athletic. Rejoignez l’aventure et contribuez à l’achat du matériel pro dont elle a besoin pour atteindre les Jeux Paralympiques de Tokyo en 2020 ! 

Envie d’aider Léa à réaliser son rêve ?

Et notez bien, à ce jour 73% du budget est réuni, il manque 27 % pour finaliser avant le 15 janvier, ça doit être possible dans un monde qui manque parfois de souffle et d’élan, et de générosité.

Et comme tout peut finir aussi par des chansons, appelons Francesca Solleville pour le sprint final (Et Jean-Max Brua, l’auteur)

Ils sont huit sur la ligne de départ
Trois blancs, cinq noirs
Sacré damier
Ils ont tendus leurs bras
Ils ont levé leur tête
Au bout de ce couloir étroit
Le cœur dément comme une bête
Lourd, lourd, lourd, lourd…
Regarde devant toi
Pour une fois, pour une fois
Il ne faut pas baisser les yeux
Comme elle est courte cette piste
Il faut l’avaler d’un coup
Il faudra prendre tous ses risques
Il faudra foncer comme un fou
Il faut la gagner cette course
Tu seras le plus grand de tous

Et pour y arriver, c’est ICI,  clic sur la bourse–>

 

 

Merci à Jean-Marc Héran qui a assuré le relais et la relance.

 

Le Blog du Doigt dans l’Oeil

15 Janvier…

Pari gagné le financement participatif a  atteint plus de 110%  du budget prévisionnel.

13.185  €  avec  257  participants.

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