Archive | novembre, 2017

Xavier Merlet A.O.C.

27 Nov

Commençons par un rappel dont cet extrait résume assez bien le ton général…

Si l’homme veut se casser la gueule

Du point de vue de la mouette

Qu’il tombe tout seul.

Xavier Merlet porte bien son nom c’est une sorte de voltigeur du verbe et de la note qui fait danser des fables acidulées, un chansonniste incisif et narquois.  Mais c’est pas lui qui va charger la mule  dans l’emphatique pompeux ou intellichiant à message pour dispenser la bonne parole, les mots sont là, les musiques balladines et swingantes, et le tout vous éveille les neurones au cas où ils se seraient laissés engourdir par les discours frelatés des pinocchios de la politicom’ formatée. Lui c’est plutôt Figaro, l’insolent, le rebelle subtil qui lance ses banderilles verbales et à la fin de l’envoi, Cyrano souriant, il touche. On imagine le trait du fleuret qui trace un X comme le Z de Zorro sur le postère de l’importun.

Dans son nouvel album, Xavier Merlet fait un panoramique sur l’état des lieux, et si globalement, il n’y a pas de quoi se tordre de rire sur notre monde, on peut faire comme si tout n’est pas perdu, comme si des îlots de fraternité résistaient aux prophètes de la peur. Il faudrait être heureux, ne serait-ce que pour donner l’exemple, c’est toujours d’actualité.

Ce pourrait être Arlequin, diversement décrit selon les traditions des pays, mais celui qui lui va le mieux est celui des orientalistes soufis pour qui le mot arlequin serait issu de l’arabe aghlaq le nom alors donné aux maîtres qui enseignaient par l’humour et la dérision. Si non è véro, è ben trovato…  Ajoutez la musique et le cocktail est prêt, tonique, pétillant, et éducatif, conseil à un enfant, en bon français, car l’enfant est aussi l’avenir de l’humanité.

Si tu vois un jour

Ta liberté se perdre

Je t’autorise, amour

A dire “Bordel de merde. .

Le nouvel album est résolument roots, voix guitare(s), façon néo bluesman manouche, avec les guitares qui jouent des sérénades qu’on entend sonner comme des tocsins, car c’est aussi de cela qu’il est question, c’est un lanceur d’alertes, et à la Manufacture chanson le 13 décembre, on pourra découvrir en chair et en notes Xavier Merlet et ses nouvelles chansons, A.O.C. avec peut-être en bonus une de ses presqu’anciennes qui résonne avec une acuité particulière depuis quelques temps, c’était en 2005,

 

Et voici ce qu’il en est de la variété française, quand Xavier Merlet parle de sa France…  Respect..

. Mais Marine ma variété à moi
Elle est terrienne avant d’être française
Peuplée d’hommes et de femmes qui croient
Qu’on peut toujours ajouter une chaise…

 

Pour en savoir plus, suivez le guide, il n’y a pas que Paris dans la tournée qui a commencé, clic sur la verdine et Latcho drom.

 

Merci à Prévert et Ferrat pour leur contribution amicale..

Norbert Gabriel

BELLA FIGURA de Yasmina Reza au Théâtre du Rond Point

26 Nov

Photos DR.

Autour de moi, on ne parle que d’elle: «Tu as aimé sa pièce ?» C’est la grande mode du Reza today!

Grande effervescence de la part des amateurs de spectacles contemporains typiquement parigots quand Madame Reza écrit un roman ou met en scène une de ses œuvres. Cette femme très discrète ne met pas les pieds dans les médias, d’ailleurs, elle n’en a pas besoin car son talent d’écrivaine l’illumine: récompensée par le prix Renaudot pour son roman Babylone en 2016. Quand on l’écoute, il y a toujours ce petit ton dans sa voix qui nous dit: «Non mais, laissez moi tranquille avec vos questions...» Je me rends alors, curieux et avide de découvrir la patte de cette femmes de lettres mystérieuse, au théâtre du Rond Point pour assister à sa pièce: Bella Figura.

 

Cette pièce n’a pas d’histoire précise: Andréane et Boris se retrouvent en amoureux sur le parking d’un restaurant, seul hic, monsieur s’est fait conseiller le restaurant par sa femme…Tel est le point de départ de cette pièce riche sur le plan implicite, car le matériau qu’utilise Yasmina Reza se base sur les non-dits. En effet, ce qui est intéressant dans l’oeuvre de Reza c’est qu’elle peint un tableau de notre société en remettant en cause cette chirurgie du sociale que les codes nous imposent:

On attend des gens qu’ils soient disponibles, beaux, souriants, toujours optimistes…  Or ici, les émotions à priori positives des protagonistes connotent quelque chose de plus enfoui: les gens pessimistes sont plus susceptibles de faire rire que d’agacer au final. Par exemple, la vieille mère d’Eric qui se plaint tout le temps et qui radote est le personnage qui nous fait le plus rire dans la pièce.

Tous ces personnages ont un point en commun: la solitude de leur quotidien.Nous ressentons une nonchalance chez ces personnages. Reza les confronte un à un dans une sorte de huis clos, qui n’en est pas un, car les décors changent sans arrêt.Au passage, je ne comprends pas l’utilisation de cette toile de fond sur laquelle sont projetées des images d’ombres représentant la forêt, inutile ! Pour ce qui est des décors: simples, intérieur style déco de catalogue de bobo qui achètent du Monoprix gourmet, j’adore! Je pense que Reza prend un certain plaisir à se moquer de cette bourgeoisie qui se plaint de tout et de rien: tu me quittes, je te quitte, il faut aimer la vie, ne perdons pas de temps, carpe diem nous rappelle le personnage de la vieille mère un peu sénile. L’est-elle réellement? Bien sur que non, ce sont autant d’outils donnés au spectateur pour qu’il puisse s’interroger sur la vérité de ces personnages. Quant au titre, faire preuve de «bonne figure» signifie que nous jouons tous un rôle en société mais que nous devons, malgré nos émotions qui prennent le pas sur nous, nous efforcer de sourire et de rire: montrer le contraire de ce que l’on ressent. C’est- à- dire avoir la force mentale de refouler ses émotions.

Pour ce qui est des acteurs: Emmanuelle Devos est parfaite dans le rôle de la garce qui mène son copain par le bout du nez. Tout est dans la démarche, talons rouge vifs, cheveux ébouriffés, robe sobre mais au dessus des genoux. Louis-Do De Lencquesaing, copain dévoué toujours derrière elle, est très juste dans sa façon de jouer, rien qui ne sonne faux! J’aime le personnage d’Eric, jeune juriste brillant et attachant, joué par Micha Lescot qui l’interprète merveilleusement bien.

La pièce alterne entre humour et tragédie, on ne s’ennuie pas une seconde car tout est bien articulé !

Pour le Théâtre du Rond Point, c’est là, clic sur le rideau,

 
 
 
Mathias Youb

Henri Valette et compagnie à l’Arthé Café.

24 Nov

Photos Martine Fargeix

Je ne suis ni meilleur ni plus mauvais que vous 
Contre vents et marées, envers et contre tout 
J’ai, chevillé dans le cœur, un rêve de bonheur, 
Un jour nouveau qui se lève chasse mon chagrin… 

 

C’est par cette chanson de François Béranger Tous ces mots terribles, qu’ Henri Valette l’ardéchois,  stéphanois d’origine  commence son tour de chant.  Chanson que nous prenons en route avec Catherine, étant légèrement en retard pour cause humanitaire.

Henri Valette, fine silhouette d’adolescent, visage encadré de longs cheveux blancs en boucles folles, voix qui se fait grave ou douce, qui se module du rire aux larmes, de la tendresse à la colère, s’adaptant au répertoire très riche et varié dont il est le passeur, ou lui-même l’auteur,  des intonations qui font penser  à Leny Escudero et parfois à Henri Tachan. Il est entouré de deux musiciens , François Buffaud à la guitare, et Jean-Marc Boucherie à la guitare basse et percussions,  qu’il présente comme amis, frangins.

L’amitié, l’amour, il en est question, avec L’Amour et l’amitié d’Henri Tachan,  Je t’aime de Michèle Bernard, ou l’amour du Beaujolais avec la vigneronne Marie Zambon, l’amour des femmes qui ne trichent pas, avec Botox de Claude Semal :

Dis moi ce qu’elle a d’esthétique / La chirurgie qui fait des trous / Pour fourrer des seins au plastique / Et changer les filles en blaireaux / Tu ne sais plus quand tu la touche / Si c’est son visage ou son pied… .

Amour érotique et religion selon Philippe Val avec  Les Versets érotiques.  Emmanuel Binet pour la musique :

 S’il y avait un Dieu bon,
Doué de pouvoirs véritables,
Il aurait viré ces cons,
C’est donc nous les vrais coupables.
Si divinité il y a,
C’est la nature c’est le vent,
C’est la terre, c’est toi, c’est moi,
Pas de quoi s’crêper le turban,
Comme le ruisseau dans le bois,
Descendons le fil des jours,
En écartant nos deux bras
Quand surgit une île d’amour.

 

L’amour encore Au café du canal de Pierre Perret, où l’on peut apporter ses baisers.

L’amour jusqu’à La fin du monde :

À l’infini, le long des plages
Roulent d’étranges otaries
Cent mille crabes nécrophages
Hantent l’estran du tsunami
Il pleut des grappes de carouges
Le sol s’ouvre à Fukushima
Il neige des flocons orange
Sur les joues du Fuji-Yama
Et moi, j’attends la fin du monde
La joue contre ton cœur
La bouche contre ta peau blonde
Sans même avoir peur ( Claude Semal).

 

Mais aussi chansons sur l’air du temps et la marche du monde, l’usine qui fout le camp à Singapour ( Frédéric Bobin), Les Oiseaux de passage de Jean Richepin, La chemise de Michel Buhler :

Je n’ faisais pourtant rien de mal

Je présentais ce plan social

Trois mille personnes virées d’accord

Ma femme adore les bagues en or

Et j’ leur donnais ni plus ni moins

(Le chômage c’est pas pour les chiens)

Une occasion de rebondir Parc’ qu’ c’lui qui l’ veut

peut s’en sortir Ils ont déchiré ma chemise.

Ou encore le portrait d’un Chien d’ivrogne :

Le trente du mois, pour éviter
Les comptoirs où y a des ardoises
On fait l’détour des salons d’thé
Renifler l’cul des Pékinoises

Arrière, matous et clébards
De tout poil, et vos pedigrees
Qui nous snobez devant les bars
En nous traitant de chiens d’arrêt

On est des chiens dans la même peau
Du Saint-Bernard au chien d’aveugle
On garde un berger sans troupeau
On est dix pour le prix d’un seul

Ah, quand viendra ma dernière heure
Petit, écris sur la couronne
Ici gît, ce fut son honneur
Et sa passion, un chien d’ivrogne. ( Allain Leprest).

 

Des chansons à dépaver les rues, des chansons de vie, du quotidien, des copains, comme ceux de Pierre Louki :

Ils ont tous des yeux étranges
Les copains qui viennent chez nous
J’oserais dire des yeux d’anges
S’ils n’étaient pas si souvent saouls
Des yeux qui font quand on les croise
L’effet d’un coup à l’estomac
C’est pourquoi je paye leur ardoise
Au bistrot où je ne bois pas
C’est pourquoi je paye leur ardoise
Au bistrot où je ne bois pas

 

Hommage à La Chansonade de Pourchère avec Aubade à La Chansonnade d’Anne Sylvestre :

Caché dans un coin de l’Ardèche

Un village semble en sommeil

A priori rien ne l’empêche

D’étirer son ventre au soleil

Mais quand l’été le déboutonne

A quelques jours de la Saint Jean

Y’a toute une troupe qui fredonne

Viennent toutes sortes de gens

Vagabonds, musiciens, nomades

Gens du bitume ou des moissons…

 

Hommage à un autre ardéchois Jean Ferrat :  Ma France.

Et en rappel 20 ans, de Léo Ferré. Des rappels, il y en aura beaucoup, après la fameuse soupe de Maï et Marc, et le repas qui rassemble les spectateurs et les artistes, nombreux ce dimanche soir.

Nous avons eu le plaisir d’écouter Christian Degiorgi, qui se dit faiseur de chansons, et qui est un excellent artisan en la matière,  aussi poète et raconteur d’histoires . Christian Degiorgi – christian degiorgi a contre courant

https://christiandegiorgi.jimdo.com/

Il nous a régalés de quelques chansons un peu coquines, de son Loup débonnaire qui n’est pas un sanguinaire, comme ses congénères :

 

Il était un jeun’ loup

Débonnaire,

Perdu parmi les loups

Sanguinaires,

Un loup tendre, un loup bon,

Un lou-foque,

Pas friand des moutons

De l’époque,

Oui vraiment un jeun’ loup

Débonnaire,

Pas un de ceux qu’on loue,

Qu’on vénère,

Aux moqu’ries aux lazzis

En pâture,

Véritable hérésie

D’la nature.

 

Photo DR

François Buffaud, qui n’est pas que le guitariste accompagnateur d’Henri Valette, mais aussi auteur, compositeur, interprète, cela fait 25 ans qu’il se produit avec sa guitare sur les scènes du Limousin et d’ailleurs, et il a fini par laisser son métier de kiné pour être chanteur à temps complet, premier vinyle en 1986 : Photos brûlées, et deux albums à son actif, Ça dépend des trains qu’on prend, En 2002, et Les cabines de plages, en 2007, prix de la SACEM de l’album autoproduit. Il nous a chanté une chanson qu’il aime particulièrement : Que serais-je sans toi, Aragon et Ferrat, Les cabines de  plages, entre autres.

Jean-Marc Boucharie, lui, nous a gratifié d’un Gilbert Lafaille : La tête ailleurs :

Je suis dans la lune
Couché sur les dunes
Ou les pieds dans l’eau
Certains jours de fête
Il y a dans ma tête
Un petit vélo
J’ai fait le voyage
Des gens de mon âge
Plus d’un demi-tour
Et j’ai sur la langue
Comme un goût de mangue
Une envie d’amour.

Et La vie ne vaut rien d’ Alain Souchon.

Henri Valette a repris le micro pour une belle interprétation de Je vous aime de Jean Ferrat,  Marc Usclade, multi-instrumentiste, s’est mis à la guitare basse, et au piano,  à la guitare pour accompagner Christian Giorgi, avec qui il sera à la Petite Gaillarde, à Clermont-Ferrand, ainsi qu’avec Philippe Galland à la deuxième guitare pour le spectacle  Du rire aux larmes et vice versa. VENDREDI 08 DECEMBRE A 20H30 « DU RIRE … – La Petite Gaillarde

lapetitegaillarde.fr/vendredi-08-decembre-a-20h30-du-rire-aux-larmes-et-vice-versa .

Et au piano pour accompagner Maï, qui, elle aussi, chante, et bien, d’une voix claire et bien posée, Maria Szusanna de Michèle Bernard, le Lac Saint-Sébastien d’Anne Sylvestre, et une chanson de sa composition sur l’île de beauté, la Corse, à propos, j’aimerais bien avoir les paroles de cette chanson, Maï, tu pourrais peut-être les mettre en commentaire sous l’article ?

Et nous avons continué jusqu’à tard dans la nuit, à chanter encore, notre ami Serge Leroux, qui, lui aussi, a une très belle voix, a été prêter main forte pour Sans la nommer de Moustaki,que tout le monde a repris en choeur, ainsi que la chanson de Pierron /Couté Les mangeux d’terre.

Y avait dans l’temps un bieau grand chemin, 
Cheminot, cheminot, chemine !
A c’t’heure n’est pas pus grand qu’ma main
J’pourrais bien l’élargir, demain !

Une soirée amicale, fraternelle, autour d’un feu de bois, et d’une même passion pour la chanson française, la poésie, celle qui parle de la vie, qui voit le monde à sa fenêtre, avec réalisme, le poing levé, l’autre main sur le cœur, toujours avec l’espoir chevillé au corps, de ce jour nouveau, . Et ce dimanche soir, nous avons été bien servis ! On s’embrasse, et on se dit à bientôt, car on devient vite accroc de ce lieu où il fait bon se retrouver.

Merci à tous les acteurs de cette soirée, à Maï et Marc pour leur accueil chaleureux, à Martine Fargeix pour ses photos, à tous ceux qui nous ont enchantés, à Catherine Reverseau pour son covoiturage.

 

Danièle Sala

 

 

 

Jean Guidoni, Légendes urbaines…

21 Nov

La Cigale reçoit Jean Guidoni,

Il y a quelques mois, lors de la première à L’Européen, la salle a été éblouie par ce spectacle, quelques mois après, le 20 Novembre à La Cigale, on peut dire que le grand cru s’est bonifié, mais rien à ajouter sur le fond à ce qui suit….

 

 Lors de la sortie de l’album, ce fut un triomphe, en voici les échos.

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Photo©NGabriel Européen 2017

Résurrection ! Depuis quelques années avec la nouvelle équipe Tacet, Jean Guidoni s’est consacré à des spectacles et albums essentiellement comme interprète. Période sans doute transitoire pour faire revivre à plein régime en 2017 ce jeune homme qui marchait dans les villes comme un conquérant insatiable bien résolu à tout dévorer et à flamber sa vie comme un feu d’ artifice. Une apparition explosive qui avait laissé pantois celles et ceux qui ont eu le privilège de le découvrir ces années-là (pour moi, 1982 à Firminy) Et certains des premiers spectateurs qui étaient au Théâtre en Rond au début des années 80, étaient là, le 4 Avril, dans ce théâtre devenu Européen. Et nous avons retrouvé ce Jean Guidoni éblouissant, une voix impeccable qui sonne comme un violoncelle, grave et bien posée sur ses Légendes urbaines, ses propres textes, associés aux musiques de Didier Pascalis, sur des arrangements de Thierry Garcia. Une équipe talentueuse et solide, dans laquelle Jean Guidoni trouve un épanouissement artistique total, et peut-être plus. L’artiste est souvent un solitaire, mais s’il n’est pas bien accompagné, dans tous les sens du terme, le chemin peut devenir très malaisé.

Légendes urbaines, avec quelques ajouts « du répertoire » donne un spectacle d’une densité émotionnelle particulière. Oublions une des légendes qui a fait de Guidoni un chanteur uniquement sombre et torturé aux ambiances tragiques, c’est beaucoup plus que ça, c’est un concerto des sentiments souvent exacerbés, – J’ai peur-* c’est un regard sans concession sur les tréfonds de l’âme humaine, un miroir souvent impitoyable – Je pourris camarade– mais c’est aussi une auto dérision jouissive, et acidulée, ça pique un peu, mais on pirouette quand même, sur le manège enragé. Putain de vie, je t’aime malgré tout… A la façon de Prévert, dont il m’a semblé deviner l’ombre complice dans un coin de la scène. A la façon de Daumier, dans ses portraits au vitriol, à la façon de Van Gogh aussi, dans les contrastes bigarrés de la vie rugueuse, bariolée, maquillée ou sauvage.

C’est un Guidoni qui semble avoir largué une bonne partie des « encombrants » qui plombent la marche en avant, aujourd’hui la marche est fluide, funambule qui valse sur la scène, lucide ascendant narquois parfois, grave sans lourdeur, et danser à contretemps dans ce monde de fous, sur le bien et le mal… les deux pieds dans la boue, et sans aucun témoin

Que dire de plus ? C’est un nouveau printemps Guidoni, et un album à mille feux, en fin de compte, ça valait le coup d’avoir la patience du diable pour revenir vers nous. Salut l’artiste.

*J’ai peur (Allain Leprest)

Suivez Guidoni, c’est ici, clic sur la photo…

Car si l’Européen a très vite affiché complet, la Cigale est programmée à l’automne, et soyez prudent, j’imagine que le public de l’Européen remettra ça et emmènera celles et ceux à qui ils veulent du bien.. Et n’hésitez pas à découvrir aussi la mutine Dorothy… (MP)

Et pour quelques images de plus…

Photos NGabriel Européen 2017

Norbert Gabriel

The Stranglers revient en France pour plusieurs dates à partir du 22 novembre : entretien avec le bassiste et chanteur JJ Burnel

19 Nov

La date du 22 novembre sonnera l’amorce d’une série de concerts que donneront les Stranglers en France, dans le cadre de leur tournée internationale, avant de s’envoler pour la Nouvelle Zélande et l’Australie.

Fondé il y a 43 ans, aux prémices de la scène punk britannique, bouillonnante d’horizons à explorer et de conventions à briser, ce groupe de Rock atypique, tant par l’inventivité de son jeu, la liberté de ses choix artistiques et l’originalité de sa trajectoire que par la franchise de ses écarts, l’est aussi devenu par sa longévité exemplaire. Certes la scène rock internationale ne manque pas de groupes chevronnés, formés, déformés, puis reformés. Mais à la différence de tous, les Stranglers, bien qu’ayant vécu des départs et renouvellements de membres -le chanteur et guitariste Hugh Cornwell, fut remplacé en 1990 par John Ellis (guitare) et Paul Roberts (chant), puis par Baz Warne en 2000-, a tracé sa route dans la continuité sans cesser d’exister. Ayant traversé, à l’instar de bien d’autres, des périodes prolifiques et glorieuses, et d’autres moins, le groupe renoue avec l’alchimie créatrice, depuis l’arrivée de Baz Warne, qui ramène la formation à une configuration de quatuor, suite aux départs successifs de Ellis et Roberts (2006), et marque en même temps le retour au chant du bassiste Jean-Jacques (« JJ ») Burnel, ce dernier recommençant à  partager l’interprétation vocale, comme durant les premières années du groupe. Du premier album, « Rattus Norvegicus » (1977) au dernier en date « Giants » sorti en 2012, l’histoire du groupe, jalonnée de 17 enregistrements studio et 15 lives, ne peut se résumer à ceci, tant elle est vaste, compliquée et fertile, et constitue une influence non négligeable pour bien des groupes, par la particularité d’un jeu où l’accord de quatre instruments jouant chacun un solo sonnait comme une harmonie inédite et une expérimentation ambitieuse. JJ Burnel lui-même, par sa pratique singulière, sans doute pionnière, arracha la basse de la fonction ingrate de base rythmique laissant la vedette aux autres instruments, à laquelle elle était jusque là cantonnée, pour lui donner un rôle de tout premier plan, inspirant en cela des générations de bassistes. Cette année le quatuor scénique du groupe en réalité quinticéphale (le batteur originel Jet Black, qui pour raisons de santé a dû définitivement passer le relais à Jim Mc Caulay, restant présent pour veiller à l’existence du groupe), a choisi de partir en tournée sans avoir encore sorti d’album. Celui-ci, en cours d’enregistrement, s’annonce avec de nouveaux morceaux qui par conséquent auront vécu, transpiré, évolué et muri sur scène au préalable.

Musicien iconique, auteur-compositeur et interprète talentueux, producteur avisé et engagé (Taxi Girl, Dani, The Sirens, Schindler, Polyphonic Size,The Reverge, Mona Mur et Magic de Spell entre autres), européanophile de longue, impliqué également dans le parcours de la Chanson Française (collaborations avec Jacques Dutronc et Dani), instruit d’une expérience de vie au service de la musique, dont le prestige n’a entamé ni son humilité ni son sens de l’humour, JJ Burnel nous accordait un entretien il y a quelques jours.

 

 

– Bonjour et merci de nous accorder cet entretien. Votre tournée internationale est entamée depuis le mois de mars. Après plus de 40 ans d’existence, avez-vous aujourd’hui le sentiment que le public  qui vient vous voir soit un public réduit à un noyau dur de fans « traditionnels » et fidèles ou plutôt un public qui s’élargit, y compris avec des jeunes générations ?

Je ne peux pas parler pour la France, mais ailleurs, depuis quelques années maintenant, il y a un renouveau avec beaucoup plus de jeunes qui viennent nous voir. Il y a bien entendu un public assez fidèle depuis des années, mais il y a un renouvellement aussi ; c’est évident. Je ne sais pas pourquoi. Peut-être les jeunes ont-ils accès à la vieille musique via internet. En tous cas, en Grande Bretagne, nous sommes perçus assez différemment. Cela dit c’est un peu partout dans le monde comme ça. Je crois que depuis les 3 derniers albums, il y a eu un renouveau d’intérêt pour ce qu’on fait. J’ai parlé avec des jeunes en Angleterre en leur demandant comment ils avaient connu les Stranglers, et ils m’ont répondu que c’était par les 3 derniers albums, et puis en voyant sur l’internet les anciens extraits. A une époque on avait une très mauvaise réputation, pour différentes raisons. Mais maintenant cela est considéré comme une marque de bravoure, des lettres de noblesse. Ils disent : « Maintenant beaucoup de groupes de musiciens sont un peu aseptisés et stériles. Et vu que vous avez été des fouteurs de merde, c’est plus attractif ». Tout est bien propre, correct et calibré par le marketing. La musique fait partie de la variété de nouveau, et vu qu’on a été un peu marginal -bien sur on a vendu beaucoup de disques, mais on n’a pas toujours suivi la bonne voie, si je peux dire- ils s’intéressent à nous. Ça correspond aussi à une envie d’authenticité ; et ça, beaucoup de jeunes me l’ont dit. On est crédibles, à une époque où beaucoup d’artistes sont fabriqués, notamment par les émissions de télé. Et live. On est très bons en live.

 

– Vous êtes partis en tournée sans avoir sorti de nouvel album depuis « Giants » en 2012. Comment avez-vous décidé des chansons que vous alliez jouer, entre les classiques incontournables du groupe, les anciens inédits et les nouveaux morceaux ?

Il y a un peu de tout. On a l’embarras du choix, comme on dit en France, après 17 albums studio. On essaye de changer tous les soirs de morceaux. Mais c’est vrai qu’il y a des classiques. Enfin, je ne sais pas ce qui est classique en France et ce qui ne l’est pas, mais j’en ai une petite idée quand même. On répète beaucoup plus qu’on ne joue, comme ça on peut changer les chansons, si on ressent quelque chose, une réaction du public. Et c’est important pour nous aussi, pour garder de l’intérêt. Le danger, c’est de s’ennuyer, de faire l’acte de jouer sans âme. Si je commence à ressentir ça envers un morceau, je laisse tomber.  Donc il y a des vieux morceaux que nous n’avons jamais joués sur scène, d’autres que nous n’avons pas joués depuis très longtemps, parfois des morceaux connus qui n’ont pas été joués depuis 10 ou 15 ans, parce qu’on s’en était lassés. Je ne voudrais vraiment pas qu’on devienne une sorte de karaoké des Stranglers, ou un numéro de cabaret. Ce ne serait pas très honnête.

 

– Dans quel état d’esprit aborde-t-on, après une longévité pareille, des chansons créées par celui qu’on était 30 ou 40 ans plus tôt ? Est-ce une redécouverte de soi ?

C’est une redécouverte, oui. Parfois tu te dis d’un morceau : « Merde ! Pourquoi m’en suis-je lassé ? ». Mais si tu le fais trop souvent, tu peux le faire avec les yeux fermés. Si tu baises la même personne pendant des années et des années, tu t’en lasses quand même. Tu comprends ce que je veux dire…

 

– Le groupe est assez éclectique pour ce qui concerne la diversité des sujets qu’il a traités au long de son histoire. Et puisqu’un nouvel album studio semble se profiler, pouvez-vous nous parler des thématiques qu’aborderont les nouvelles chansons ?

On est en train de préparer un nouveau disque. On n’a pas enregistré depuis 5 ans ; donc il était temps. Et puis on a accumulé pas mal d’idées et de matière, donc on commence à enregistrer et écouter ça. On travaille sur 8 morceaux en ce moment. J’aimerais bien pouvoir dire qu’on aura peut-être une vingtaine de morceaux, et après je ferais le tri. Pour le moment en thématique, il y a la bêtise qui nous entoure : il y a des choses sur Trump. Il y en a aussi sur le fait de vieillir, sur les gens qui nous ont quittés. Il y a tant de choses qui bougent dans le monde ; ce ne sont pas les sujets qui manquent. On a toujours été comme ça de toute façon ; on n’a pas souvent fait des chansons d’amour, malheureusement. Mais parfois il y a des thèmes plus introspectifs.

 

– Partir en tournée avant un enregistrement et non l’inverse, cela permet-il de « roder » en quelque sorte les chansons et leur donner une existence scénique avant de les enregistrer ?

 Absolument ! C’est d’ailleurs la meilleure façon de procéder, parce que l’atmosphère dans un studio est un peu stérile. Donc parfois c’est bien de les roder et peaufiner. En plus j’ai eu l’expérience d’enregistrer des morceaux qui n’étaient pas trop rodés, et à force de les jouer, tu trouves différentes façons de t’exprimer, et ça change énormément. Donc je préfère que ce soit rodé. De toute façon, si on fait un nouveau morceau sur scène qui n’est pas encore sorti, le lendemain, c’est sur l’internet. Mais je préfère que le public ait une meilleure version de ce que je travaille.   

 

– Vous est-il arrivé par le passé de regretter un enregistrement studio prématuré en voyant l’évolution d’une chanson après un an de tournée ?

Oui, bien sûr, j’ai eu ce regret. J’imagine que tout le monde a connu ça. Par exemple il y a « 15 Steps », un morceau que, j’espère, on va jouer en France, dont je pense qu’on le joue maintenant beaucoup mieux que sur le disque.

 

– Depuis « Giants », vous produisez vos disques avec votre propre label et de façon indépendante. Qu’est-ce que cette autonomie logistique vous apporte ? La liberté de ne pas être soumis à des certaines contraintes, impératifs ou pressions commerciales?

Parfois on a fait des choses avec notre propre label. En ce moment on est en train de débattre entre nous à ce sujet, parce qu’on a eu 5 propositions de labels de majors et indépendants aussi, et on se demande si ça en vaut la peine ou si on préfère le faire nous même. Maintenant tout a changé : il y a très peu de disquaires ; la plupart des musiques se téléchargent. Tout le modèle du business musical a changé. Donc c’est peut-être l’occasion de faire tout nous-mêmes, à part la distribution. Mais la distribution peut se faire électroniquement. Ce n’est pas vraiment un grand souci pour moi, mais c’est sûr qu’il va falloir y penser. La pression des impératifs commerciaux, on l’a toujours évitée. On a eu beaucoup de chance. Il y a eu des pressions commerciales, c’est vrai. Mais on a fait l’opposé à chaque fois. Et on a eu de la chance d’être laissé tranquilles par les maisons de disque. Les seules fois où elles ont essayé de nous emmerder, c’était fin de contrat entre nous.  Les américains ont essayé, EMI en particulier. Et ça ne nous plaisait pas. On a eu la chance de ne pas pouvoir être casés artistiquement, et ça nous a donné beaucoup de liberté. Personne ne nous disait quoi écrire, même si c’était des sujets que les gens ne voulaient pas qu’on aborde. D’ailleurs on avait forcé la maison de disque à sortir un morceau qui est devenu un hit total, « Golden Brown », qu’elle ne voulait pas sortir au début, parce qu’elle pensait qu’on ne pouvait pas danser dessus, que ce n’était pas « punky » -et en plus il y avait du clavecin dessus- : on a insisté et elle a été obligée d’accepter, et ça a été un succès mondial. Et après ça, la maison de disque a demandé : « Est-ce qu’on pourrait en avoir un autre comme ça ? ». Du coup, on leur a filé un morceau de 6 ou 7 minutes n Français.

 

– En plus de 40 ans d’existence vous avez vécu le départ de membres, et l’intégration de nouveaux musiciens : est-ce que ça a été des étapes déstabilisantes à vivre et qui ont pu, à un moment donné, menacer d’altérer l’identité du groupe ou au contraire des moteurs pour la créativité ?

Ça a été déstabilisant quand Hugh est parti. J’ai tourné en rond pendant quelques années. Et puis ça s’est remis en place lorsqu’on est redevenu un quatuor. Il y a de la dynamique dans la vie ! A un moment j’étais très bas ; j’avais un peu perdu la foi dans les Stranglers. J’imagine que tout le monde a des moments comme ça. L’important est de tirer du positif de toutes ces situations. Donc ça a été déstabilisant parfois, et puis à d’autres moments ça a été rafraichissant. Baz, avec qui je m’entends super bien et avec qui j’écris, est avec nous depuis 17 ans maintenant. On a connu des changements de membres et on a aussi ajouté du personnel à une époque : on avait même une section de cuivres. J’aime bien essayer différentes choses. Parfois ça marche et parfois ça ne marche pas. Il y a une super alchimie qui se créé. D’ailleurs Baz et moi, on vit ensemble pendant 10 jours, juste lui et moi : on compose toute la nuit ou tout le jour, on enregistre, on a des idées, on discute et on boit des bières ensemble au pub. Il y a plein de sujets sur lesquels on peut parler, donc c’est cool.

 

– Jet ne joue plus avec vous sur scène, mais il semble toujours présent d’une certaine façon pour le groupe. Quel est son rôle désormais vis-à-vis du groupe ? Donne-t-il son avis sur les créations par exemple ?

Jet est beaucoup plus âgé que nous : il a 79 ans. Et batteur à 79 ans, ce n’est pas évident dans un groupe assez dynamique. Il a essayé de jouer avec nous il y a 4 ans, un ou deux morceaux, et après il était sous oxygène. Il apporte toujours son grain, son opinion, mais il ne joue plus. Jet a été complètement rock’n’roll, sans plus expliquer… Mais il donne son avis sur les compositions ; absolument ! C’est l’éminence grise, si tu veux. Et le meilleur, c’est qu’il soutient Jim qui est avec nous depuis 4 ans : il lui a donné des conseils sur certaines façons de jouer, parce que Jet avait sa propre façon de jouer.

 

– Vous-même avez inventé une manière de jouer de la basse très personnelle qui est devenue un modèle pour des générations de bassistes. D’où est venu ce jeu qui a su donner un rôle de premier plan à cet instrument jusque là souvent cantonné à celui un peu ingrat de base rythmique ?

Apparemment. Je n’ai pas pris de leçon ; je jouais de la guitare classique avant. J’ai grandit en Angleterre dans les années 60, et je voyais plein de choses dans les pubs, Fleetwood Mac devant 30 personnes, avant qu’ils sortent leur premier disque… J’ai eu cette chance d’être là au bon moment. Au début je ne suivais pas de règle. Dans la création, il ne devrait pas y avoir de règle. Donc j’ai créé ma propre façon de faire les choses, et apparemment ça a inspiré beaucoup de gens. La basse était un peu dans l’ombre à l’époque. Et je crois que j’ai sorti cet instrument de l’ombre. C’est un instrument très sexy : je l’ai rendu sexy ! En tous cas, j’aimerais bien le croire.

 

– Vous avez aussi réalisé des projets personnels, que ce soit en tant que compositeur, interprète ou producteur. Vous auriez pu être tenté comme d’autres de partir vers une carrière solo : est-ce que vous vous épanouissez plus à jouer en formation avec d’autres ?

Pour le moment je suis cent pour cent concentré sur les Stranglers. J’ai fait beaucoup de productions dans le passé, et j’ai fait des projets solo, mais pour le moment je suis complètement concentré sur le groupe.

 

– Vous avez souvent par le passé soutenu des groupes ou artistes en aidant à leur permettre de s’exprimer. Il y a des invités sur cette dernière tournée aussi comme Therapy. Est-ce toujours une démarche importante pour vous de soutenir les autres?

Oui, mais ça dépend à quel niveau je suis dans le bain. Parfois j’ai eu le plaisir de découvrir des choses. Il arrive qu’on choisisse des groupes pour faire nos premières parties, mais parfois c’est une surprise complète. J’aime bien être surpris ; si je fais toujours la même démarche, c’est ennuyeux. Parfois c’est le lieu du concert qui décide du groupe, et Baz et moi écoutons, et il y a de belles surprises parfois, et parfois moins. Mais je ne peux pas dire que je suis déçu, parce que je n’attends rien.  Une ou deux fois, il est arrivé que je sois suffisamment bien surpris pour offrir un eu d’aide, un parrainage.

 

– Dernière question puisque la tournée va aborder la France le 22 novembre : le groupe, et vous-mêmes aussi de part vos origines, avez-vous un lien affectif particulier avec notre pays et une histoire avec le public français ?

Oui, absolument. Je suis le plus anglais des Français et le plus français des Anglais ! Je suis né à Londres, de parents normands. Donc j’ai fait toute ma scolarité en Angleterre. Mais maintenant depuis trois ans je vis en France. Je voulais vivre ici, alors j’ai décidé de venir en France, payer mes impôts français, et voilà.

 

 

Lien, clic sur l’affiche ci dessus,

Dates :

22/11 : Annemasse

23/11 : Lyon

25/11 : Paris

27/11 : Le Havre

28/11 : Brest

29/11 : Nantes

30/11 : Tours

02/12 : Bordeaux

03/12 : Blaye

 

Nous remercions Alice Duboé de la salle le Krakatoa à Mérignac pour son aide.

 

Miren Funke

Rencontre avec Cyril Mokaiesh à Bordeaux au Théâtre l’Inox

15 Nov

 

Le 07 octobre dernier le Théâtre l’Inox accueillait à Bordeaux Cyril Mokaiesh pour un concert. Évidemment essentiellement acoustique, l’endroit demeurant localement un des rares lieux de résistance de la Chanson, où celle-ci soit invitée à s’exprimer sur une scène intime, sans autre arme que la poésie du dénuement et la sincérité du coeur. C’est un véritable militantisme de soutien de la Chanson francophone et de ses interprètes qui anime l’association Bordeaux Chanson, organisant des spectacles à l’Inox entre autres depuis maintenant plus d’une décennie. Aussi n’était-ce pas un contre-sens qu’un militant de la cause de la culture et de l’art tel Cyril Mokaiesh, en première partie de qui jouait la chanteuse Eskelina, vienne en remplir la sale d’un moment de partage et de beauté. Parti sur les routes pour amener à la rencontre du public son dernier album « Clôture », dont le premier extrait « La Loi du Marché », en duo avec Bernard Lavilliers, a sans doute plus arpenté les rues de nos villes, « en groupe, en ligue, en procession », avec les manifestants du mouvement social que les ondes radiophoniques -à croire que sa dimension fédératrice et populaire échappe bien moins aux citoyens qu’aux médias-, l’artiste conviait ce soir là un public bordelais tout ouïe à s’inventer une temporalité chaleureuse, humaine et poétique. Quelques heures auparavant il acceptait de nous accorder un entretien pour parler de son travail, et de bien d’autres choses encore.

 

– Bonjour Cyril et merci de nous accorder cet entretien. L’Inox où tu joues ce soir est un des rares et derniers lieux de spectacle à Bordeaux où on peut écouter des concerts de Chanson Française. Constates-tu, en tant qu’interprète, sur le plan national aussi, une raréfaction des lieux où la Chanson est invitée à s’exprimer ?

C’est vrai que j’ai l’impression – et tout cas ce n’est pas la première fois que je me fais la réflexion- qu’à Bordeaux il y a une scène musicale qui est extrêmement large et importante. Et les salles sont habitées de plein de gens. Je suis venu à la Barbey Scholl au mois d’avril ; il y avait eu une belle exposition, avec un article dans Sud Ouest. Alors je ne sais pas à quel point ça peut avoir un impact. Mais je me rends compte effectivement que la Chanson Française -et c’est ce que je fais, même si sur scène il y a une part de Rock et d’énergie, je me considère vraiment comme un chanteur de Chanson- est peut-être une frange de la musique à relancer à Bordeaux ; mais Bordeaux n’est pas la seule ville où se représenter est un peu confidentiel. Je m’aperçois que la Chanson aujourd’hui fait acte de résistance. Je m’entends : ce sont des mots forts pour dire quelque chose de simple. Mais peut-être aujourd’hui les radios n’ont pas forcément envie de passer ce style de musique. Les messages peuvent être considérés parfois comme un peu trop politisés et peuvent gêner certains, voire même parfois avoir un contre-intérêt pour un programmateur de radio, qui n’a pas d’intérêt à ce qu’on entende ce genre de message à l’antenne. Il y a, à mon avis, une somme de choses petites et plus graves qui font qu’aujourd’hui les artistes et les producteurs de spectacle, les gens qui organisent ce genre de concert, doivent se serrer les coudes et le font. Du coup, ça donne quelque chose d’assez inédit à chaque fois : une rencontre très proche avec les gens, un moment d’échange aussi avec les organisateurs avec qui ont vient passer un après-midi, notamment à évoquer ce genre de sujet. On réfléchi ensemble à comment pouvoir palier ce manque, parce que je suis sûr que les gens ne manquent pas d’enthousiasme : il y a un public pour ça. La jeunesse n’est pas forcément tournée vers la Chanson, ou en tous cas l’image de la Chanson ; je ne sais pas si c’est l’image ou la Chanson elle-même qui est à remettre en cause. Mais il y a des choses à imaginer, et puis naturellement ça reviendra. Je ne pense pas qu’on puisse se passer de Chanson Française ; je ne pense pas qu’on puisse se passer de sens, d’engagement, de poésie. Aujourd’hui c’est un petit peu mis de côté, mais il y a encore de l’espoir.

 

– Tu évoques justement les choix de programmation des radios, et à ce propos, ton titre « La loi du Marché » a souffert d’un manque de diffusion radiophonique au niveau national, exception faite de France Inter. Les radios n’ont-elles pas souhaité l’exposer ?

Il n’y en a pas beaucoup. Je ne saurais même pas dire s’il y en a d’autres que France Inter à l’échelle nationale ; je pense que ça a été la seule. Il y a peut-être eu une ou deux émissions qui l’ont joué ponctuellement, mais pas de manière automatique. Je pense qu’en revanche dans les régions, il y a des radios locales, qui, elles, fonctionnent au coup de cœur et se moquent de savoir si c’est un message qui est audible pour les gens ou pas. Je ne pensais pas que cette chanson serait  aussi « clivante » entre guillemets. Je pensais plutôt qu’elle était fédératrice d’une pensée que les gens peuvent avoir  au fond d’eux. Pas mal de gens viennent me voir à la fin des concerts et me disent que je dis tout haut ce que les gens pensent tout bas. C’est plutôt un grand compliment. On se passe très bien des radios aussi quand on est artiste. On fait des concerts. Si j’avais fait ce métier en me disant que je voulais être programmé partout sur les radios, ça aurait été un peu mince comme ambition. L’ambition est peut-être beaucoup plus grande et se joue dans la durée. Il faut laisser le temps au temps et faire confiance à ce qu’on fait. Il ne faut pas perdre confiance sous prétexte qu’il y a dix programmateurs qui décident du sort des artistes. Peut-être qu’un jour ces dix programmateurs là vont partir, et que nous, on sera toujours là.

 

– Proposer de chanter ce titre en duo avec toi à Bernard Lavilliers était-il ta volonté première ou avais-tu envisagé d’autres interprètes pour partager ta chanson ?

Ça a été mon premier choix, bien sûr. C’est un artiste que j’admire beaucoup, que j’ai découvert il y a quelques années, puis redécouvert il n’y a pas très longtemps. Il y avait une partie de son œuvre que je ne connaissais pas. Je trouve qu’avec les années, il devient un personnage dont l’engagement et la révolte sont de plus en plus sages dans le bon sens du terme. On parle d’un grand de la Chanson Française. Heureusement il y a des pères qui nous inspirent et des personnages qui nous donnent envie de continuer. Bernard Lavilliers, c’est quelqu’un qui m’a dit du bien de mon travail, et c’est la plus belle reconnaissance qu’on puisse m’offrir, et le plus bel encouragement surtout, parce qu’aujourd’hui, on a plus besoin d’être encouragé que félicité. Cette rencontre est un joli signe du destin.

 

– Tu parlais plus tôt de la nécessité pour les artistes et organisateurs de concerts de Chanson Française de se serrer les coudes et d’être inventifs. Il est de plus en plus courant que des interprètes partagent un co-plateau pour une soirée, voire une tournée. Y a-t-il des artistes avec qui tu en envisagerais ?

Il faut réfléchir. Ce sont des questions auxquelles je ne peux pas répondre dans la seconde, car mille noms vont me passer par la tête. Bien sur il y a des collaborations et des idées possibles, et je pense qu’aujourd’hui il faut que ça passe par là : des gens qui tendent la main, des ainés qui n’oublient pas leurs fils ; il faut qu’on écoute ce qui se fait ailleurs et qu’on se reconnaisse des alliés.

 

– Parlons de ton album : pourquoi avoir choisi de le nommer pareillement que la chanson sur laquelle il se termine, « Clôture »?

Il y avait cette chanson qui teinte vraiment l’album. C’est la dernière du disque. Et c’est en faisant la photo pour la pochette du disque, avec cette main comme ça sur ma bouche, que je me suis dis que cet album disait des choses, luttait aussi contre un ordre établi qui essaye de nous faire croire que l’avenir n’est pas autrement que le présent qu’on est en train de nous offrir, qu’on ne peut pas envisager un horizon différent, que c’est comme ça et ça ne sera plus autrement. Donc à travers cet album je crois que je rentre en résistance, et qu’il n’est pas toujours bien vu par tout le monde de dire la vérité.

 

– Ton écriture se démarque souvent de celle d’autres artistes engagés, en ce qu’elle entrelace perpétuellement des propos relatifs à ta vie privée, à ton intimité, et du militantisme politique ou social. Est-ce une nécessité chez toi de ne pas cloisonner les deux ?

– J’aime bien les deux : j’aime parler de l’époque avec ferveur et amour même, et puis parler d’amour. Ce n’est pas une forme d’exhibition ou de mise à nue. J’aime bien les artistes qui livrent des choses d’eux-mêmes pour qu’on comprenne leur regard sur le monde. Du coup j’essaye de faire partie de cette tradition de chanteurs là, qui s’engagent personnellement et d’une manière plus globale.

 

– La chanson « Ici en France » résonne comme un appel à la jeunesse, à une prise de conscience, face au danger ou à la tentation de l’extrémisme, des extrémismes d’ailleurs. Quel en est le message exact ?

Cette chanson parle surtout de la montée du front national. C’est une chanson qui voulait évoquer toutes ces peurs qui nous animent, à nous quarantenaires et trentenaires, vivant en France et en Occident et étant abasourdis par tant de causes qu’on ne maitrise pas, quant aux attentats, et du coup à la montée des extrêmes. Cette chanson était surtout un appel à la raison en période d’élection présidentielle : dire que je comprends cette colère et ce sentiment de vouloir créer une forme de révolution, mais qu’il ne faut pas se tromper de révolution ni de révolte. Il y a un bon nombre de gens qui ont plutôt une pensée de gauche et qui ces dernières années ont succombé au jeu du front national, par dépit, et sans doute par envie de mettre un grand coup de pied dans n’importe quoi, en disant : « perdu pour perdu, vous allez voir ce qu’on est capables de faire dans ce pays ».  C’était une chanson pour éviter un carnage qui heureusement n’a pas eu lieu, mais dont la menace est quand même grandissante.

 

– On te sent par ailleurs préoccupé par  la dégradation des conditions d’éducation et d’accès à la culture et à l’art, due aux choix de politiques budgétaires de notre pays. N’y a-t-il pas un lien direct entre l‘un et l’autre ?

Oui, il y a un  lien. C’est sûr que le manque d’éducation, le manque de culture amènent à des pensées qui peuvent aller jusqu’à la barbarie. Si le front national a pris une telle place dans le pays, c’est bien que la question a été mal débattue, mal expliquée, qu’il n’y a pas assez d’éducation et de formation pour qu’on puisse élever notre pensée et la tourner vers d’autres idéaux. Les attentats sont liés à ça. Je ne voudrais pas me lancer dans la philosophie, qui n’est pas mon métier. Mais j’entends des philosophes comme Alain Badiou qui dit qu’aujourd’hui l’économie et la violence des attentats sont extrêmement liées. C’est-à-dire que si on met  des gens sur le côté, à qui on dit qu’ils ne servent à rien, et que s’ils n’étaient pas là, ce serait mieux, parce qu’ils ne comptent pour rien, évidemment dans ce monde ultra médiatisé où tout le monde veut être un peu le héros de sa vie, il y a une brèche ouverte pour ce genre d’idéologie qui consiste à faire croire qu’on va être un héros, passer à la télé, avoir tout un tas de privilèges, des armes, des femmes, des voitures… Tout ça participe à cette pensée mondialisée qui est qu’aujourd’hui le bonheur passe par la consommation, la possession et des choses pas très spirituelles, qui dans l’extrême peuvent mener à des tragédies.   

 

– Ne récolte-t-on pas aussi les fruits amers de décennies de promotion par les médias d’une forme de sous-culture qui n’incite pas vraiment à l’ouverture d’esprit, le désir de savoir et la curiosité envers les autres ?

Tout ça est compliqué. Je suis complètement d’accord. La télévision, pour commencer, je ne la regarde pas. La radio, je l’écoute peu. J’aime bien lire les journaux, mais on sait bien aussi que les journaux sont dirigés par des gens qui ont des intérêts. Donc il faut aller chercher l’information là où on peut aller la chercher, et se concentrer sur les belles œuvres qui existent, les belles associations, les gens qui consacrent leur vie pour que la culture se fasse, d’une manière peut-être plus confidentielle et intime, mais qui existe. Et je pense que si l’espoir doit revenir quelque part, il faut lutter là où on peut lutter et encourager ce qu’on peut encourager. Et là aujourd’hui, on est à l’Inox, dans un théâtre au milieu des beaux quartiers de Bordeaux, et il y a des choses qui se font dans la confidentialité la plus totale -on va être 50 ce soir-, mais peut-être que ça donnera des envies et ça apportera des jolies pensées ou de la poésie et que les gens vont ressortir en se disant qu’ils vont passer une meilleure semaine.

 

– L’Inox se prête particulièrement aux représentations acoustiques. Comment vas-tu interpréter ton répertoire ce soir ?

En acoustique, effectivement. On est tous les deux avec Valentin Montu, qui m’accompagne à la basse d’habitude, quand on joue en groupe.

 

– Tu peux souvent employer un ton désabusé et ironique, dans tes chansons, qui semble parfois frôler la frontière avec le pessimisme, voire le cynisme. Pourtant ces chansons parlent d’espoir et d’amour. Est-ce un équilibre fragile et délicat à maintenir ?

Ce n’est pas facile, mais c’est mon travail. C’est aussi mon humeur au moment où j’écris la chanson. C’est aussi parfois la provocation ; je ne suis pas quelqu’un qui pratique l’humour en chanson, mais parfois le côté un peu désabusé et ironique, l’autodérision. Je me moque tellement du monde dans lequel on vit que si je ne me moquais pas de moi-même, il y aurait un problème quelque part. En revanche, le pessimisme, non. Ce n’est pas parce qu’on parle de sujets douloureux qu’on est pessimiste. J’essaye d’être lucide. Si le constat peut être amer, ce n’est pas pour autant qu’il est pessimiste. Le pessimisme serait de ne pas en parler ou de détourner la tête, ou d’en parler mal et de dire des contre-vérités. Si on essaye de dire les choses avec sa sensibilité, mais avec une forme de recherche de vérité, c’est plutôt un combat qui fait avancer les choses.

 

Te sens-tu incompris, un peu à l’instar de la chanteuse Melissmell, qui nous expliquait récemment comme ses chansons sont aussi, souvent à tort, décryptées comme une vision pessimiste et sombre par un partie de la presse ?

Oui, mais qui le dit ? Les quelques journalistes pour qui le monde aujourd’hui a besoin d’entendre des chansons qui sont très anecdotiques. C’est vrai que l’époque a un côté anecdotique qui fait du bien à certains aussi ; s’il n’y avait que des gens comme moi ou Melissmell, peut-être que les gens se feraient chier, et je les comprendrais. Il faut qu’il y ait un éclectisme évident. Maintenant c’est vrai qu’aujourd’hui, l’heure n’est pas tellement à la chanson réaliste et poétique. C’est dur d’embrasser la Chanson Française aujourd’hui. Mais il y a des gens : on est là tous les deux, et il y a d’autres gens. Néanmoins ça force un peu à l’humilité, car il est sûr que les plateaux télé ne nous appellent pas tous les matins, même si ça peut arriver. Et il arrive de faire des concerts dans les jardins des gens, ou avec des salles à moitié pleines. Et il arrive aussi de très bonnes surprises avec des gens qui nous attendent avec impatience. On est revenus peut-être à une époque où faire carrière, faire son trou, ça ne se fait pas en deux ans, quoi qu’on nous raconte.

 

– La chanson « Blanc Cassé » sur ton disque sonne à mes oreilles comme un pendant au titre « Sur un Trapèze » d’Alain Bashung. Comporte-t-elle un clin d’œil volontaire à ce titre présent sur son dernier album « Bleu Pétrole » ?

Je ne crois pas. C’est marrant, parce qu’elle dit complètement l’inverse. Il n’y avait pas de clin d’œil à Bashung. J’aime bien les clins d’œil, ou le fait de citer ouvertement quelqu’un ; mais là, je ne crois pas. Peut-être musicalement y a-t-il quelque chose ? Elle fait parti des chansons très autobiographiques ou personnelles de ce disque.

 

– J’aimerais revenir sur une de tes anciennes chansons, « Le cèdre du Liban », qui figure sur ton deuxième album « L’Amour qui s’invente ». Elle raconte une histoire et exprime des sentiments très intimes, en utilisant l’image de cet arbre mythique du pays où tu as des origines. La métaphore est très belle. Peux-tu nous raconter l’histoire de sa création ?

C’est une des premières chansons que j’ai écrites, alors que je devais avoir 18 ou 19 ans, et je l’avais dans un coin, dans un tiroir ; je ne l’avais jamais ressortie. Je la chantais à des amis, et c’est une chanson qui avait beaucoup ému mon père, à un moment où je lui avais un peu demandé conseil, pour savoir si je faisais bien d’essayer de faire carrière dans la chanson. Je suis sûr que tous les artistes ont des chansons comme ça, qu’on traine et qu’on met un peu de temps à vouloir enregistrer et proposer au public. Et puis ça a été pour mon album en 2014 ; je voulais terminer cet album par une chanson de mise à nu, qui évoque mes origines. Le Liban, c’est un endroit où je vais régulièrement me ressourcer. Il y a un moment dans sa vie où on a un peu envie de rendre hommage à une partie de sa famille, je crois.

 

– Ton précédent disque « Naufragés » avait choisi de rendre hommage à des auteurs de la Chanson Française souvent méconnus du grand public et injustement négligés par la postérité. Cela te tenait-il tant à cœur et pourquoi ?

Beaucoup. Ce sont des auteurs, comme Allain Leprest, Jacques Debronckart, Philippe Léotard, dont avec Giovanni Mirabassi, le pianiste du disque, on a pris un malin plaisir à aller chercher des perles un peu échouées. C’était une manière de rendre hommage à la chanson poétique, réaliste, engagée, qui sue le sang et le vin rouge. La poésie, c’est quoi ? C’est « le sang des mots » me disait un ami. Ce sont des gens qui ont vécu à fleur de peau, à fleur de mots, et qui ont été aussi, je pense, un peu méprisés, parce qu’ils étaient à contre-courant. Donc il y avait une partie du public qui les adorait, qui en était fan -et heureusement qu’ils ont eu cet amour là-, mais je pense qu’ils ont été un peu victimes du fait qu’on les laisse dans l’ombre, parce qu’ils ouvraient leur gueule et était « fatigants ». Mais en même temps, qu’est-ce que c’est beau ! Et ça me fait plaisir, même si les médias n’en ont pas beaucoup parlé de leur vivant, d’entendre qu’on dit du bien de mon disque, parce qu’on dit, du coup, du bien de ces auteurs que j’aime tant, et que j’ai eu plaisir à chanter sur scène. Ca a été une vraie source d’inspiration pour l’album qui a suivi. Je leur dois « Clôture », mon dernier album : d’avoir baigné dans leurs textes pendant un à deux ans, on n’en ressort pas pareil.

 

– D’un point d’ouïe un peu plus personnel, ton timbre et les intonations de ta voix m’évoquent souvent Nicolas Peyrac. Fait-il partie des chanteurs que tu as écoutés et qui ont pu t’inspirer ?

On me parle souvent de Nicolas Peyrac ; tu n’es pas la première. Je ne connais pas hyper bien le répertoire de Nicolas Peyrac ; j’en connais quelques unes que tout le monde connait, et que j’aime beaucoup aussi. Parfois le timbre de voix nous rappelle quelqu’un. Je suis sensible aux voix des gens. Mais malheureusement je n’ai pas grand-chose à dire là-dessus, car ce n’est pas un répertoire que je connais sur le bout des doigts.

 

 

Liens : site http://www.cyrilmokaiesh.com/

Facebook : https://www.facebook.com/CyrilMokaiesh/

 

Nous remercions les membres de l’association Bordeaux Chanson pour leur accueil chaleureux, ainsi que le photographe Alain Nouaux pour ses photos.

Site de Bordeaux Chanson http://www.bordeaux-chanson.org/index.php/Presentation

Photos : Alain Nouaux (2 ; 3 ; 4 ; 5), Miren Funke (1)

 

Miren Funke

La Roulette Rustre en ballades en Novembre

8 Nov

Romain, Emilie, Florent, Camille, Chris… Photos NGabriel2017

 

Pour démarrer les 16 èmes Ballades en Novembre, la Roulette Rustre a ouvert la scène avec plus de deux heures de folie joyeuse, dans un carrousel éblouissant de mots et de musiques d’une richesse et d’une créativité rares. Ça vous embarque dans une sarabande extravertie, un opéra balagan* , une tarentelle hyper vitaminée qu’un Arlequin rocker aurait métissée avec une rhapsodie de la rue quand la rue se met à chanter le temps des cerises ou le temps des noyaux… On y croise des tableaux à la Prévert, dans une mise en scène dynamique façon  Tex Avery dans ses meilleurs jours, on entre dans une forêt magique et sa chorale fantastique, avec les miaulements complices ou un peu sarcastiques du violon, les feulements ou les caresses des cuivres sensuels, les éclats de lumière des guitares, le grondement bonhomme du soubassophone, et la batterie en cœur battant la chamade ou la charge. Et dans ce cocktail de vie les voix se marient, les instruments s’échangent, autour de Flo Rustre, tout le monde chante, duos, trios, quatuor ou quintuor, du mélancolique au cri rageur, du poétique au rire taquin, ouvre ton cœur et ta fenêtre, gratte la peinture des conventions, et sors des carapaces castratrices.

Ils sont comme ces oiseaux de passage dont l’air qu’ils respirent ferait brûler nos poumons, mais c’est la flamme de la vie. Et elle crée de la lumière, des espoirs peut-être chimériques, mais on ne sait pas tant qu’on n’a pas essayé l’utopie, un chemin inexploré ?

Ils vont, par l’étendue ample, rois de l’espace.
Là-bas, ils trouveront de l’amour, du nouveau.
Là-bas, un bon soleil chauffera leur carcasse
Et fera se gonfler leur cœur et leur cerveau.

Là-bas, c’est le pays de l’étrange et du rêve,
C’est l’horizon perdu par delà les sommets,
C’est le bleu paradis, c’est la lointaine grève..

Ces vers de Jean Richepin leur vont bien, mais les baladins de la Roulette Rustre, c’est ici et maintenant qu’ils nous offrent le pays de l’étrange et du rêve, comme des enfants terriblement résolus à partager les élixirs et les potions à faire danser le monde. Qui en a bien besoin. Poètes tendres et enragés, cracheurs de feu et de sourires, on ne sort pas indemne d’une soirée avec La Roulette Rustre, on tire toujours le bon numéro, celui qui vous fait le cœur battant et le corps léger… Amoureux de tout, même du train qu’on va rater…

Ah oui ? Ça a duré plus de deux heures ? Il n’y a plus de train pour le retour ? M’en fous, je vais bien trouver un banc pour regarder le ciel nuageux et sombre, et même s’il pleut un peu, j’ai assez d’étoiles dans les yeux pour voir des constellations par milliers.

Mais… Mais les fées veillent, l’une d’elle m’embarque dans son carrosse, il reste 6 mn pour le dernier train, et j’ai 3 mn pour regarder mon ciel étoilé devant la gare… La vie est belle comme un concert de la Roulette Rustre.

Vous n’y étiez pas ? Pas grave, leurs albums vous font vivre tout ça, sans les images, mais en voici quelques unes, c’est déjà ça…


Et éventuellement vous pouvez faire une prolongation avec cette chronique bilan de ma première rencontre avec la Roulette, dix ans presque, je n’en retire pas une virgule, dans l’annonce de l’album anniversaire,

Clic sur la Roulette, tous les liens utiles y sont ——>

Merci aux participants à leur insu, de leur plein gré,

  • Marceline Loridan-Ivens pour « La vie balagan » en hébreu, balagan, c’est « désordre, bordélique » mais sa vie a été un beau désordre malgré tout,

  • et Jean Richepin  pour ses oiseaux de passage. (Extrait de la version intégrale)

Norbert Gabriel

Un certain regard…

6 Nov

 

Photo DR

S’il est une image pour illustrer ce qu’est un regard, (et ce qu’il transmet?)  c’est bien celle-là… Lauren Bacall… Mais pourquoi cette question ? Voilà, au hasard d’une balade dans la Galerie des Fresques de la gare de Lyon, j’ai été suivi du regard par quelques personnages photographiés par Brian Sokol,

Quand on passe devant cette photographie, où les personnages sont en dimension réelle, les regards de la jeune femme et de l’enfant assis suivent le passant … C’est gratifiant, comme si ces portraits exposés me parlaient personnellement, comme s’ils s’intéressaient aux bipèdes humanoïdes qui traversent leur périmètre de vie photographique . Juste retour des choses. Brian Sokol les a vus, il nous les présente, et eux aussi nous regardent… Virtuellement. Dans ces regards, il y a tout l’espoir d’une fraternité humaine possible. Je me fiche bien que cette jeune femme semble bâillonnée par son foulard, ses yeux me parlent.

Voilà pourquoi je tiens pour essentiel dans la communication par l’image, pour un spectacle, que la photo de l’artiste me regarde droit dans les yeux, et pas à côté, surtout si à côté de moi il n’y a personne … Et ci-dessous j’ai vraiment la sensation que Pierre Margot ne joue que pour moi.

Si le regard est le reflet de l’âme, à vous de voir ce que dit une photo qui ne vous regarde pas, ou qui regarde de travers, ou qui regarde ailleurs…

Comprend qui veut comprend qui peut, c’est pas Boby qui dira le contraire…

Et pour conclure, une photo que j’aime entre toutes, merci à Martine Gatineau,

Pour en savoir plus sur Brian Sokol,

c’est là, clic sur le kodak  —>

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Norbert Gabriel

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