Archive | octobre, 2017

90 minutes et plus avec Pierre Arditi. En Auvergne…

31 Oct

Photo Vincent Roche

90 minutes et plus avec Pierre Arditi.

 J’ai voulu, le temps de cet entretien, vous faire partager les mots et le regard d’un homme qui a toujours été pour moi quelqu’un de précieux…

Je vais surtout me retrouver face à ce public qui a choisi de passer sa soirée à travers un nouveau concept entre conférence-entretien, entre intermèdes musicaux joués en live avec des musiciens. Une première, une interactivité public-artiste.

90 minutes avec… est né grâce à vous.

C’est ainsi que David Becker, producteur et artiste présente la soirée , j’ai pu y assister grâce à lui, et avec grand plaisir, parmi un public nombreux, intergénérationnel, qui a accueilli Pierre Arditi très chaleureusement.

Le rideau s’ouvre sur un décor salon, canapé rouge, fauteuil gris, devant des panneaux où sont exposées des photos, comme autant de repères dans l’univers de l’artiste, le tout éclairé par deux lustres, et l’orchestre jazz-rock installé sur la droite de la scène accompagne l’entrée de Pierre Arditi, tout de noir vêtu, en toute simplicité, avec Right Off ( A tribute to Jack Johnson 1971) de Miles Davis : Pierre Larrat au vibraphone, François Brunel à la guitare, Régis Pons à la trompette, Franck Pilandon au saxophone, Marc Verne à la batterie, sur des arrangements de Pierre Larrat, et avec Manon Denimal Cubero au chant.

Et ça commence mal ! Pierre s’affale sur le canapé, en face de David, en toussant, et annonce, qu’il y a des jours où l’on a envie de rien faire, et qu’il a la crève !

Photo Vincent Roche

Mais avec celui qui ne se considère pas comme une vedette, préférant se définir acteur populaire : C’est mon titre de gloire, bien vite repris par la passion de parler de son métier, 52 ans d’activés théâtrales, cinématographiques et autres, la voix revient vite.

Et c’est de sa sœur Catherine,  qu’il nous parle tout d’abord : C’est Catherine, qui à 15 ans, a commencé des études de théâtre au cours de la comédienne Tania Balachova. Moi, non, je la regardais avec envie, intimidé, en me disant, pour moi, ça ne marchera pas.

Ce qui paraissait alors le plus important pour ce jeune homme, né dans le 6ème arrondissement de Paris, d’une famille d’intellectuels assez pauvres, c’était de ne rien demander aux autres, qu’il fallait gagner sa vie, et ça ne l’a jamais quitté.

Il commence donc dans les assurances, pour gagner sa vie, en faisant remarquer qu’il y avait des gens de toutes les classes sociales dans son immeuble, qui vivaient en bonne intelligence, qu’ils avaient tous un boulot, que leurs enfants pouvaient faire des études pour un avenir meilleur, alors qu’aujourd’hui, même les ouvriers sont pauvres, et l’on voit à Paris des employés municipaux qui dorment dans leur voiture, parce qu’ils n’ont pas les moyens d’avoir un logement, ça, c’est le Pierre Arditi engagé dans le social et l’humanitaire.

Bien que ne se sentant pas particulièrement destiné à ce métier, poussé par sa sœur, et par son père, il débute au théâtre du Cothurne, dirigé par Marcel Maréchal, à Lyon en 1965. Et c’est le début d’une longue et fructueuse carrière au théâtre, au cinéma, à la télévision : Mon père a fait de moi l’acteur, ma mère a fait l’homme, j’ai été bien élevé. Mon père disait :  un homme qui ne pleure pas n’est pas un homme.  se souvient il.

Anecdotes personnelles et inédites, comme l’histoire de son premier baiser amoureux, à 17 ans, mais il en a gardé une telle honte qu’il nous a fait promettre de ne pas le répéter !

PhotoDR.

Anecdotes de tournages de films, par exemple Mon oncle d’Amérique, en 1979, sous la direction d’Alain Resnais, dont il était l’acteur fétiche, il s’inquiétait des multiples grimaces qu’envoyait le cameraman à Alain Resnais, lequel répondait par des mimiques rassurantes ou agacées. (Et il raconte en reproduisant gestes et grimaces). Pris de panique, se disant je suis mauvais, ça ne va pas, il va parler à Resnais après la séquence, mais non, pas du tout lui répond celui-ci, c’est juste que le cameraman s’inquiétait du lustre placé derrière toi, et qui te fait de jolies boucles d’oreilles !

Et il nous raconte comment il a rencontré Alain Resnais, par l’intermédiaire de Lucienne, une amie, et d’une amie de Lucienne, Florence Malraux, dans un magasin de chaussures où il prenait soin de conseiller leur amie commune, Lucienne, sur le choix d’une paire de souliers. Florence Malraux, qui était l’assistante d’Alain Resnais, a adoré cette attention, et rendez-vous fut pris le lendemain pour un rôle dans Mon oncle d’Amérique. Je te prends à trois conditions, que tu lises le scénario, qu’il te plaise, et que tu te fasses couper les cheveux. Ce à quoi Pierre Arditi, fou de joie, répondit : Je suis prêt à me mettre la boule à zéro pour tourner avec vous !

Il nous parle aussi de ses rôles dans les nombreux téléfilms et séries, comme Le comte de Monte-Cristo, ou Le sang de la vigne, cette dernière série a parfait ma culture oenologique.

Mais c’est le théâtre que Pierre Arditi aime avant tout : Le théâtre raconte une histoire au public, et le public joue avec nous, le théâtre est une réunion, alors que le cinéma est une séparation, plans, coupes, le chef d’orchestre étant le metteur en scène, la camera aime ou pas, et il n’y a pas de retour. Le théâtre, moins technique, a une qualité sentimentale, c’est merveilleux.

Et de citer une phrase de Jean-Louis Barrault, pour marquer la différence entre le théâtre et le cinéma : Je préfère faire l’amour dans mon lit que par correspondance . Et pointant l’index vers la scène, il dit : Et le seul endroit où l’on apprend son métier, c’est là.

Mais le succès ne vient pas en claquant des doigts, on se construit, à force de patience, d’espérance, de solitude, de souffrances, le modèle, c’est la vie, le talent n’est qu’une toute petite donnée.

Mon matériau, c’est moi, je fais partie de l’école stanislavskienne :   Sers-toi de toi pour aller vers un autre dont tu ignores tout et que tu connais pourtant par cœur, puisque c’est toi. .

Et c’est avec beaucoup d’émotion qu’il nous fait le récit d’une expérience personnelle douloureuse, pour nous faire comprendre que le modèle c’est la vie. Un soir, c’était en 1976, ma première épouse, dont j’étais amoureux fou, m’annonce que c’est fini, je n’ai pas supporté, j’étais dévasté, je suis sorti au hasard des rues, j’ai marché, j’ai pleuré, et je me suis dit j’en ai assez, je suis fatigué, et retournant à notre appartement, j’ai pris ce qu’il fallait pour en finir, c’est elle qui m’a sauvé. Quelques années plus tard, j’avais cette réplique au théâtre : « J’en ai assez, je suis fatigué » , et chaque fois que je la répétais, tout revenait dans ma tête, dans mon âme, et j’ai compris que ce personnage que je jouais, c’était moi.

Confidences et récits sont entrecoupés de réflexions sur l’actualité, il ne manque pas de critiquer ceux qui profitent de leur notoriété pour abuser des femmes, et de moments musicaux appréciés de tous, Sweet Gorgia Brown, Your heart is as black as night, Tandem de Gainsbourg.

Après les questions du public, par exemple, d’une spectatrice ayant vu la pièce de Jean-Claude Grumberg l’Etre ou pas, avec Pierre Arditi et Daniel Russo, le 28 octobre dernier, au théâtre de Châtel-Guyon : Votre rôle n’est pas facile dans cette pièce, comment faire pour éviter d’être névrosé quand on est trop dans la tête d’un personnage ? Ce à quoi il répond qu‘en effet c’est un métier pervers, où l’on joue sa vie, et avoue que chaque fois qu’il entre sur scène, il pense à sa mère : En nous les morts ne sont jamais morts.

Enfin, il nous régale de quelques morceaux choisis de  « Je vais passer pour un vieux con« , de Philippe Delerm

Presque deux heures d’entretien et d’échanges, qui ont passé trop vite, avec cet acteur-conteur-comédien qui s’est simplement dévoilé comme un bel humain, un de ceux qu’on aimerait avoir pour ami. Et il a quitté son public auvergnat en promettant de revenir, d’ailleurs il se souvient avoir fait quelques mémorables virées en Auvergne, et en concluant, ouvrant la poche de sa veste : Je vous mets là, dans ma poche, dans les valises de ma mémoire.

Merci à David Becker pour son invitation, ce concept était une première, et je ne suis pas la seule à penser que c’est une réussite, et les prochaines 90 minutes seront avec Thierry Lhermitte, en 2018, à suivre donc.

Liens : Rencontre organisée par Becker’s prod : beckerprod@gmail.com

Crédits photos : ( pour le livret du programme) : Patrick Kovarik-AFP/ Philippe Warin, Jean-Philippe Baltel-Sipa, Gilles de Beauchene/ maxpp/France3.

 

Du 4 au 28 avril 2018,  Pierre Arditi sera au Théâtre du Rond Point  pour : Lit ce qu’il aime, d’après des textes de Jean-Michel Ribes, Yasmina Reza, Philippe Delerm et Michel Onfray.

Pour les réservations , clic sur l’affiche —>

et aux points de vente habituels.

Et c’est un événement Télérama, Paris première et France culture.

Danièle Sala

Le carnaval des pinocchios…

26 Oct
Toute ressemblance avec la scène politique, quelle qu’elle soit, n’est absolument pas fortuite.  C’était le 4 Mars 2017 en première publication, mais comme rien ne change…  
 (ou Le bal des tartuffes…)

pinocchio-et-jiminyDans mes enfances lyonnaises et pierre-bénitaines, l’école publique, le catéchisme, les sains principes de mon grand père Giovanni communiste courant Peppone et anar, (devenu Jean à son arrivée en France), me dessinaient une France aussi belle que la vie dans un film de Disney…

On met du temps à guérir de son enfance, quand on en guérit…

C’était aussi le temps de Guignol et du carnaval avec les grosses têtes. Si vous ne connaissez pas, voilà un aperçu de la chose –>

La grosse tête de carnaval fait un bon tiers de la silhouette. On en avait une à la maison, un Fernandel cowboy avec un Stetson, et pour situer les proportions, quand j’avais 6 ans, elle faisait à peu près ma taille, et une fois dedans j’avais juste les pieds qui dépassaient.

Mais revenons à nos pinocchios. Ceux de 2017. Ayant biberonné mon éducation au son des grands principes  Aimez-vous les uns les autres et Liberté-Egalité Fraternité, je découvre effaré, en 2017, que ce pays qui aurait inventé les Droits de l’Homme, devient une sorte de village rétréci dans un égoïsme rance. Ici, une édile maire d’une ville calaisienne interdit de donner des repas à des réfugiés, là, à Paris, on parsème des blocs de pierre pour empêcher les « campeurs » qui dorment par terre de se tenir chaud les nuits d’hiver… Un type qui a volé du riz et des pâtes, rien d’autre, les moins chers, est condamné à 2 mois ferme… Ailleurs, un SDF qui vole un sandwich est condamné  le jour suivant, mais quelques uns qui ont détourné des centaines de milliers d’euros, crient à l’assassinat quand la justice ose prétendre faire son travail avec diligence… Et diffèrent  leurs convocations judiciaires selon leur bon vouloir. Et là, j’entends clairement un môme de 7 ou 8 ans, 89 rue Voltaire à Pierre-Bénite, dire haut et fort, C’EST PAS JUSTE !

Me voilà donc retombé dans les enfances rêveuses et enthousiastes quand je croyais aux lendemains qui chanteraient des jours meilleurs. Le temps a passé, et j’y crois de moins en moins… Les édiles bafouent allègrement les plus simples principes de solidarité humaine, les candidats, certains candidats, bafouent sans complexe les règles les plus élémentaires de la morale, la simple morale, comme on disait dans nos milieux prolétaires,  ça se fait pas...  par exemple, si tu envisageais de te chicorer avec un camarade parce qu’il a triché aux billes, tu lui demandais de quitter ses lunettes avant de lui mettre un bourre-pif… On a ses valeurs morales… Vous voyez les décalages avec les mœurs actuelles…

Les réfugiés qui fuient les bombes (celle que NOUS vendons à leurs bourreaux) sont rebaptisés migrants, genre: des intrus qui viennent voler la place de nos SDF… ces moins que rien il y a peu, devenus soudain le centre de toutes les pensées de certains nouveaux tartuffes bons samaritains.

Quand la montée des océans va menacer les populations qui vivent juste au dessus du niveau des mers, on va se barricader dans des bastions alpins ? Et si l’Aquitaine est inondée, l’Auvergne va-t-elle se fortifier pour empêcher les invasions de bordelais ?

D’ailleurs, c’est en Mars que ça se passe, à Clermont Ferrand, mais c’est pareil ailleurs, des familles à la rue

...hébergées par le 115 jusqu’à début février et par grand froid, c’est-à-dire à partir de – 5°. Et à la rue depuis le 18 février, avec des enfants, alors que la loi prévoit leur prise en charge par l’Etat.

Pour finir en chanson, j’en ai une, toute nouvelle, et ça peut se passer ici et maintenant, devant chez vous ou devant chez moi, avec enfants ou pas, c’est toujours la même histoire, on regarde ailleurs ? Ou pas ? Et pendant ce temps, le carnaval des pinocchios continue son festival télévisuel, avec des grandes questions existentielles, quel menteur professionnel aura la queue du Mickey? *

Alors quoi ? Y EN A MARRE !

Norbert Gabriel

*La queue du  Mickey, pour les moins de 50 ans qui se seraient égarés par hasard sur ce blog, ça n’a rien d’une cochonceté, c’était dans les manèges de chevaux de bois, un truc pour gagner un tour gratuit, une peluche suspendue au dessus des enfants et celui qui attrapait la queue -détachable- gagnait un tour… Même dans nos innocences enfantines, on voyait assez vite que le Mickey était habilement manipulé par le maître du manège pour que le hasard, ou le talent des chasseurs de queue ne soit pas pas le seul critère… Et  il y eut quand même des gentils forains pour que la petite fille un peu timide et maladroite voie la queue du Mickey tomber opportunément dans ses mains… Voilà pourquoi il me reste une tendresse pour ces compagnons d’enfance, les héros des vogues lyonnaises, et Guignol, Madelon, Gnafron, Toinon, les révoltés de la débine, debout malgré tout.

6 Avril, merci à Sabine Henneton pour ces belles affiches tout-à-fait en situation.

affiches pinocchio

Hexagone d’automne, n° 5

14 Oct

 

Numéro dédié à Barbara Weldens

 

Reçu et lu Hexagone d’automne, 5 sur 5 , un numéro riche des fruits de l’été, et la cueillette est bonne. Et quel plaisir d’être accompagnée, page par page, par la photo de Lili Cros et Thierry Chazelle, en rabat de couverture qui sert de marque-page ! Un rabat qui nous rappelle l’immense succès de leur nouvel album et nouveau spectacle Peau neuve, reprise du spectacle et presse unanime. Ayant vu leur spectacle aux rencontres Marc Robine de Blanzat en juillet dernier, je confirme, «  ça fait du bien ! » .

Mais on ne peut hélas se souvenir de ce 14 juillet 2017, sans penser à la première partie du spectacle, et à l’époustouflante prestation de Barbara Weldens, qui est morte électrocutée au pied de la scène 5 jours plus tard, dans l’église de Gourdon, dans le lot, d’ailleurs ce numéro d’Hexagone lui est dédié.

Edito de David Desreumaux qui rappelle la juste récompense reçue cet été à Barjac, pour l’ensemble de l’action d’Hexagone au service de la chanson, le prix Jacques Douai, partagé avec Entre deux caisses, que l’on peut retrouver dans le n° de printemps, et l’évolution d’Hexagone, après le site internet, la chaîne Youtube, la Blackroom, nous pouvons maintenant écouter la webradio hexagonale, qui illustre musicalement toutes les rencontres d’artistes.

Avec ce n° 5, on se refait tous les festivals d’été, et si on les a ratés, on saura tout en mots et en images, avec 16 pages sur Barjac, entretien avec Jean-Claude Barens, directeur artistique du festival, qui ne craint pas les prises de risques, malgré un public exigeant : «  Après bien sûr qu’il y a des réactions mettant en question tel ou tel choix, mais on peut l’entendre. Je trouve que Mehdi Krüger est l’exemple même de cette situation parce que ce n’est pas quelqu’un qui a une formation chanson, mais il en fait quelque chose de très beau et de très puissant. ».

Pour en savoir plus sur Mehdi Krüger, qui se définit comme Arabtrait, voir le n° 3 d’Hexagone, page 48 à 51 : « Je crois en la poésie de combat, manifeste romantique ou couplet de rap, elle est l’arme des faibles, fragile et insaisissable à la fois... »

Puis 5 pages sur Concèze, Festival Découvrir, où la poésie se marie avec la chanson, un festival qui «  nourrit, hors des supermarchés, et sans jamais la nommer, une forme de militance pour le mot ouvragé. Qu’il en soit ainsi pour longtemps encore. »

Deux pages sur Festiv’Allier à Langogne, où Camille Hardouin a rendu un émouvant hommage à Barbara Weldens qui aurait dû être là.

Et, on trouve en page arrière de couverture le programme du Festival de Marne du 04 au 21 octobre 2017. « Où la musique embrasse les mots. ».

Nous avons dans ce numéro un tour d’horizon des spectacles, passés ces derniers mois, présents et à venir, des albums récents, pas moins de 80 albums chroniqués, et il y en a pour tous les goûts.

Et des coups de projecteur sur certains artistes, comme Lior Shoov que je découvre avec bonheur : «  Frimousse mutine, regard bleu transparent, cheveux en bataille, ukulélé en bandoulière. Lior parcourt le monde en musique. Voguant au rythme de ses pas, l’humanité la hante, les humains l’arriment à ses ports d’attache. »

Babx et son irrésistible « Ascensions », un des joyaux de cet album est la bouleversante trilogie d’Omaya, trilogie inspirée de l’histoire d’Omaya Al-Jbara, une femme irakienne qui a résisté à Daesh, et a mené tout son village dans la résistance, « avec le sourire et une tendresse incroyable. »

Jeanne Rochette nous raconte ses nourritures littéraires et musicales, sa façon de travailler, ses années québécoises,  : « J’aime brouiller les pistes tout en poursuivant mon chemin. »

Victoria Lud, encore une découverte, avec son clip Eldorado, et qui vient d’enregistrer un premier EP de 6 titres : Mon cœur.

Véronique Pestel, « Singulière et discrète a fait paraître en début d’année un nouvel album : Faire autrement qui marque ses Vingt-cinq ans de compagnonnage avec le producteur Jean-Claude Barens. » Elle nous parle de son besoin de véhicule littéraire, de Brassens, de son rapport particulier avec la poésie d’Aragon, que l’on retrouve dans son dernier album, ainsi que des références à Camille Claudel, sur un texte de Philippe Noireaut, ou encore Colette : « J’ai besoin de ce véhicule littéraire : il est protecteur. »

On fait aussi plus ample connaissance avec Liz Van Deuq, sous la plume de Flavie Girbal, Liz qui nous confie : Je suis une musicienne classique ratée mais contente de l’être, car je dispose ainsi d’un tas d’outils.

Regard sur Glad  et son album : Les invisibles chroniqué dans le n° 3 d’Hexagone. Il fut Guillaume Allardi, début 2015, celui qui a réécrit la musique d’une chanson de Leprest : La colère, puis chante ses propres chansons avec son groupe Metamek,  tour à tour poète, philosophe, ou acteur, il se perd, et revient en solo deux ans plus tard sous le nom de Glad .

Photo © David Desreumaux

On retrouve, comme dans les numéros précédents, les dossiers, dont 24 pages consacrées à Askehoug. 10 albums à l’actif de ce rockeur poétique, énigmatique, «  Un hurluberlu apprivoisé » qui se revendique une proximité physique et morale avec Jean Rochefort.

Il nous parle de ses guitares et d’une contrebasse, fabriquées maison, parce qu’il n’avait pas les moyens de s’en acheter : «  Je crois que je suis quelqu’un de  manuel à la base. », ses parents bourgeois, sa grand-mère Marguerite, sa jeunesse bourguignonne, ses influences  qui vont de Prévert à Bashung, en passant par les surréalistes et la Divine comédie,  Bashung que l’on retrouve parmis ses albums  de chevet, aux côtés de Ferré, Lou Reed,  AC/DC, et  quelques autres. Askehoug, pour qui : « La musique est une chose physique, et non intellectuelle ; un truc de rockeur. », pour qui la chanson «  doit donner la sensation de n’être qu’un geste : élégante, rapide, inspirée, couillue, avec une légère tension entre la musique et le texte, qu’elle pose une question d’ordre stylistique... ».

Le regard extérieur de son bassiste Michel-Ange Mérino, regard amical et professionnel qui se termine par ces mots : « Il a le travail comme thérapie, un vrai goût pour l’oeuvre, le goût du façonnage, du risque aussi, et surtout l’envie de transformer en beau, ou en sale. C’est selon…Sans peur…Sans cesse… Askehoug, c’est tout cela, et bien plus…Comme il le dirait. »

Et les paroles,  de  Ma Poésie :

Ma poésie est toute petite 
Elle ne se marie ni ne s’édite 
Ma poésie ne se chante pas, j’évite 

Ma poésie est bien fragile 
Toute la journée elle distille 
Son caractère difficile 

Ma poésie est toute petite
Et les choses, elles ne me facilite 

Quand on l’énerve, elle dégaine 
Met en colère, elle lamine 
Puis elle remonte dans ses collines 

C’est dans le bain qu’elle me visite 
Habile, elle se love dans ma tête 
Sûr qu’elle ne sera pas inscrite 

Quand je m’essuie, elle est partie 
Ma poésie est toute petite
Et prend la fuite 

Quand une fille passe par là 
Elle sait se faire toute belle 
Mais si un détail ne lui plaît pas 
Elle peut des heures rester sans voix 

Ma poésie est toute petite 
Elle discute avec la folie 
Et ça, parfois, moi, je l’oublie 

Ma poésie est toute petite

Elle nage entre peinture et musique 
Parfois elle tripe sur des cantiques 
N’a peur ni des fantômes, ni des critiques 

Y en a qui cherchent le soleil 
Moi je dis qu’elle n’a pas son pareil 
Pour m’éclairer dans l’obscurité 

Ma poésie me fait du bien 
Quand elle écarte ses grandes mains 
Elle me fait aussi rigoler 
Quand il lui manque un ou deux pieds.  .

Paroles  illustrées par un dessin de Piérick.

En partie deux, c’est  tout d’abord Amélie-les-crayons qui se dévoile, répondant aux questions de Michel Gallas. «  Je suis la fille de Bourvil » dit elle, et c’est en travaillant l’interprétation des Crayons de Bourvil, lors d’un stage de théâtre, qu’elle a décidé d’accoler son prénom à cette chanson. «  Bourvil parle de choses graves et profondes, vues sous un angle drôle ou léger, avec des mots tellement simples. ».

Elle raconte ses 15 années de carrière, parle de son nouveau spectacle, et des thèmes abordés dans son quatrième album studio, Mille Ponts, ( chroniqué dans le n° 4 ). Un album à son image, lucide mais optimiste, sur un ton un peu plus grave que les chansons des albums précédents, mais en retenue.

Amélie, très attachée au travail d’équipe : «  Un des fondements, c’est l’humain, l’amour que l’on peut avoir entre nous. On s’aime tous vraiment, ça transpire sur scène. »

Nous arrivons à Gérald Genty, ses chansons courtes mais bonnes, et son Hipopopopo…tame, qui attire des vieilles dames dans ses spectacles, pour acheter l’affiche…Parce qu’elles collectionnent tout ce qui a trait aux hippopotames ! Et elles réclament la chanson, qui n’existe pas.

Regard sur Alcaz : Deux voix, deux guitares. Alcaz qui a peaufiné son sixième opus : Portés par les vents, sorti le 30 septembre dernier, au théâtre de l’oeuvre de Marseille : « Cet album, dans la continuité des précédents, distillera des ondes positives, un vent de liberté, le plaisir d’être et l’envie de se laisser porter. ».

Alcaz suivi de Fransesca Solleville , son regard bleu qui nous transperce, ses convictions, ses emmerdes, la difficulté de vivre de son métier et toujours sa formidable envie de chanter : «  Les sujets changent ; mais la motivation profonde, l’indignation, ne varie pas. ». Elle parle aussi de son dernier album, qu’elle a eu grand plaisir à enregistrer : Dolce vita, avec une chanson de Jérémie Bossone : La page blanche.

Francesca Solleville

Pour ce qui est de l’engagement en chanson, elle y a consacré sa vie, voilà ce qu’elle répond à Dominique A qui dit ne pas aimer la chanson engagée :  C’est idiot ! Pour avoir des convertis, il faut avoir des convaincus ; ils ne le font pas tout seuls. C’est grâce à ce qu’ils lisent, écoutent, voient à la TV, qu’ils prennent leurs idées et choisissent leur camp. Il faut toujours choisir un camp. Notre génération s’est tout tapé : la guerre, la décolonisation…On s’est battu. Maintenant les choses se passent plus loin. Ce n’est plus le fils de l’épicière qui risque sa vie à tel endroit. Mais on peut éclairer ! Je parlais de ces jeunes au premier rang : parfois, tu vois quelque chose qui s’allume dans leur regard. Rien que pour ça… ».

Carmen Maria Vega, elle, s’est engagée dans la recherche de ses racines, découvrant une vérité décevante, mais dit elle : «  J’ai décidé que mon histoire n’était pas une tare mais une force. ». Elle raconte son histoire dans son dernier album Santa Maria, tout au long des douze titres. «  C’est un album de résilience et de témoignage. L’identité, ce n’est pas que les origines, c’est aussi ce que l’on construit : la famille, les amis, la sexualité, le travail…Tout ça mis bout à bout permet de découvrir qui on est. Ça prend une vie. ». Et la sienne de vie est bien remplie, chanteuse, danseuse, comédienne, scénographe, metteur en scène : «  Je me bats tous les jours pour surprendre les gens et me surprendre. »

Claude Fèvre, quant à elle, partage son regard sur Gilles & Auguste, Insolites à deux.

Duo qui vient de la rencontre d’un technicien en électronique violoncelliste amateur et un bibliothécaire défroqué « poète depuis toujours, devenu comédien au prix d’un parcours qui tient de l’épopée. ».

Un article plus long à l’occasion de leur concert au Bijou à Toulouse, et de la sortie de leur album : Sinon toi leur est consacré sur le blog de Claude  chantercestlancerdesballes.fr / gilles-auguste-ont-jete-boussole, en résumé : « C’est beau, tendre et joyeux ! ».

Et à propos d’engagement en chanson, le chassé-croisé de Patrick Engel, avec Pascal Bouaziz, Rémo Gary, Victoria Delarozière. Trois artistes aux parcours différents, mais aux convictions nourries d’une authenticité sans faille,  précise en préambule Patrick Engel.

On a vu ce que Fransesca Solleville en pensait, mais il y a différentes formes d’engagement : «  Chanter une petite chanson d’amour, si c’est une chose de qualité, c’est un engagement. » ( Serge Reggiani).

Rémo Gary

Pour Rémo Gary, dont on connaît l’engagement dans la vie : « On m’a dit que j’étais un chanteur engageant, je ne sais pas si c’est vrai, mais je préfère être engageant qu’engagé. ».

Pour Pascal Bouaziz : « Je n’ai jamais eu que des doutes et j’essaye petitement de les partager le plus possible autour de moi. ».

Victoria Delarozière, elle, pense que: « Chanter, c’est parler, c’est ouvrir sa gueule. Et c’est bien. ».

Un débat intéressant, qui fait la différence entre l’engagement en chanson et l’engagement dans la vie, les deux pouvant parfois se rejoindre.

Que dire encore de ce numéro bien fourni ? Ah oui, la visite du Train théâtre, par David Desreumaux, David qui signe bien d’autres articles de ce numéro d’automne, et de si belles photos !

Le Train théâtre, scène régionale de Portes-lès-Valence, qui dispose d’une salle de quatre cent quarante-cinq places, et qui assure la diffusion, la création et la médiation de la chanson et des arts de la piste depuis de nombreuses années. Un engagement qui va bien au-delà de la Drôme : «  Le Train théâtre et Luc Sotiras sont également très présents dans le réseau professionnel national et francophone, membres et cofondateurs notamment de la Fédération des festivals de chanson francophone. ».

Enfin, n’oublions pas cette rencontre avec René Pagès, un passionné de la chanson francophone qui anime deux émissions hebdomadaires, sur R d’autan, radio associative du Tarn, Bella Ciao, depuis 20 ans, et Se(pt) de cœur. Emissions que je suis en différé, recevant chaque fin de journée le lien, un partage de passions, une véritable bibliothèque radiophonique, et des goûts sûrs, enfin à mon avis. Mais si je cite Julos Beaucarne, Pierre Barouh, Leprest, Brel, Barbara Weldens, entre autres, je sais que mon avis est partagé par tous les lecteurs de ce mook.

Et ce n’est pas fini !

David Desreumaux nous propose un portrait de Jacques Canetti, à l’occasion du 70 ème anniversaire des Trois Baudets, rencontre avec sa fille Françoise, qui gère aujourd’hui les Productions Jacques Canetti.

On suit le parcours de «  cet acteur essentiel et incontournable du spectacle vivant et de la chanson du XX ème siècle. » depuis sa naissance en Bulgarie, en 1009, son enfance, ses frères, sa mère veuve à 28 ans, sa grand-mère  voyageuse, ses études musicales, son immense culture et son oreille absolue, son attirance pour les inconnus, sa passion de découvrir et faire connaître de jeunes artistes, comme Félix Leclerc, moqué de tous au Canada, dans les années 50 qu’il amène en France : «  C’est mon père qui a eu l’audace de l’enregistrer dans un studio à Montréal et de le faire venir en France pour y faire ses débuts. ».

Jacques Canetti qui a ouvert le théâtre des Trois Baudets en 1947, a toujours su recevoir « ce qui est nouveau avec une liberté totale. ». Et c’est là que Françoise, petite fille, a pu voir débuter Brassens, Brel, Boris Vian, Gainsbourg et bien d’autres. «  Les artistes savaient que Canetti n’était pas un homme de cour ! Et qu’auprès de lui, ils auraient un avis sincère. ».

A écouter Jacques Canetti Mes 50 ans de chanson, coffret de 4 CD sorti en 2015.

On termine avec la « fucking chronique » de Mad, et son été meurtrier. En effet, lui qui avait l’intention d’échapper à la mafia hexagonale, «  à la férule du Ceausescu de Clichy qui allait encore lui réclamer sa fucking chronique, avec son corps et mes cris. », a été rattrapé par Mick de Toulouse, et il a dû faire sa part et celle de Mick , distribuer jusqu’au dernier numéro d’Hexagone dans tout le Sud.  ! Une chronique savoureuse qui montre que si les mooksquetaires font un sacré boulot, ils savent aussi ne pas se prendre au sérieux.

Voilà, moi aussi j’ai fait ma part, ma part de lectrice, avec écoutes à l’appui et avec plaisir !

Si ces quelques notes de lecture vous donnent envie d’en savoir beaucoup plus, abonnez-vous, lisez, écoutez, et allez voir, sortez, choisissez  albums et livres dans ce super  marché bien achalandé ! Faites vivre et prospérer cette belle équipe au service de la chanson, et les artistes qui nous enchantent.

Danièle Sala

Photo Barbara Weldens: Martine Fargeix, autres photos archives NGabriel.

 

Et pour savoir comment vous abonner, mademoiselle Flavie vous attend, ici : clic

BARBARA l’Exposition, à la Philharmonie…

13 Oct

Ce vendredi 13, Barbara vous attend dans la belle salle de la Philharmonie dans la Cité de la Musique à La Villette.

Parcours dans les sentiers de sa vie, avec de nombreux extraits vidéo rares, des documents précieux, des messages sur son répondeur…

  • des manuscrits, des cahiers de notes et de chansons qui naissent
  • des photos, portraits d’artistes, posés ou sur le vif,  ou presque

 

 

 

 

 

 des invitations à un moment à Précy-sur-Marne,

 

Photo Vincent Josse

Clémentine Deroudille,  commissaire de l’exposition: C’est l’association Perlimpinpin, créée lors de la vente ­publique de ses affaires qui m’a fourni des costumes, des carnets. Et d’autres qui l’ont connue et aimée, fans, proches, célèbres ou anonymes. Tous lui sont apparus heureux qu’il se passe « enfin quelque chose » autour de Barbara. « Je n’avais jamais ressenti une telle atmosphère d’amour autour d’un projet d’expo! Peut-être parce que Barbara, si gaie, savait aussi se montrer difficile. Il fallait prendre sur soi pour continuer à l’adorer. »

Depuis quelques années Clémentine Deroudille a été à l’origine, conception et réalisation de grandes expositions, autour de Robert Doisneau, de Brassens, et ses expositions sont toujours des œuvres de grande qualité qui donnent au public la possibilité d’entrer un peu dans la vie d’artistes majeurs.

Et cette exposition Barbara est aussi un chef d’oeuvre. Prenez note du programme, et des soirées chansons qui en font partie, ce seront des moments rares.

Tout est d’une classe et d’une élégance exceptionnelles, ces quelques images devraient être une incitation à y courir, et vous y reviendrez sûrement avec des amis à qui vous voulez du bien.

 

Pour les infos, les horaires , le programme, clic sur le piano,

PS:  si vous l’avez raté, allez replayer et podcaster  le grand atelier de Vincent Josse, autour de Barbara, c’est une référence.

Clic sur le micro,

 

Norbert Gabriel

Lettre ouverte à un chanteur égaré

12 Oct

Cette lettre d’actualité publiée le  9 octobre 2017 par Nilda Fernandez pose aussi la question de l’engagement en chanson, à vous de voir…

 

Cher Lluis Llach, ex-collègue et actuel chasseur de vautours,

Je réagis à ton tweet qui qualifie de « vautours » ceux qui ont défilé dimanche à Barcelone pour dire leur attachement à l’Espagne. Il étaient près d’un million de gens normaux, beaucoup moins aisés que toi, moins « éduqués » peut-être, mais qui s’exprimaient pour la première fois. Parmi eux, bien sûr, des nostalgiques du vieux régime fasciste que ta famille a ardemment soutenu, mais pas seulement. Quoi qu’il en soit, Lluis, les artistes populaires que nous sommes ne peuvent pas être si dédaigneux envers leurs semblables. Même quand ceux-ci ne font partie de leur « clientèle ». Et je sais de quelle manière tu soignes la tienne. Je me souviens que tu n’as pas voulu chanter en français quand nous avions mêlé nos répertoires au festival des Francofolies. Tu m’as dit : Je ne pourrai pas. Ceux qui me suivent ne le comprendraient pas. Je chanterai mes chansons, je traduirai un refrain ou une strophe des tiennes en catalan, mais pas plus.  J’avais trouvé ça grotesque, même grossier, puisque j’allais chanter avec toi … et en catalan. Sans parler de cette façon si stupide de défendre une langue.

Le concert fut un triomphe. Les gens applaudissaient, trépignaient, pleuraient d’émotion face à deux artistes se partageant la scène. À la fin, dans un mouvement d’enthousiasme et de reconnaissance, je t’ai saisi le bras et nous avons chanté une « Vie en Rose » d’Edith Piaf improvisée. Cela ne t’a pas plu. Dans les coulisses,  quand le directeur de l’Olympia est venu me dire: C’est l’un des plus beaux concerts de ma vie. L’Olympia est pour vous quand vous le voudrez ,  tu es resté enfermé dans ta loge, amer, sombre, dépourvu de générosité.

Lluis, nous sommes deux artistes populaires, admiratifs l’un de l’autre, tous deux nés en Catalogne, mais de lignées très différentes, presque opposées. Moi, petit-fils de prolétaires andalous émigrés à Barcelone, fils d’émigrants, espagnols et protestants, vers la France. Toi, fils et petit-fils d’une petite bourgeoisie rurale de tradition réactionnaire. Moi, enfant, donnant des coups au directeur d’école, tandis qu’on chantait le Cara al Sol phalangiste. Toi, adolescent, affilié aux groupes de la «catholicité» franquiste. Moi, artiste d’une «Chanson française» tétée depuis l’enfance. Toi, enveloppé dans «La Nova Canço» catalane, que soutenait la maffia bancaire, corrompue et opusdéiste.

Aujourd’hui je t’écris depuis Sants, le quartier ouvrier de mon enfance. Tu es devenu millionnaire et député. Moi, entre Barcelone Paris et Moscou, je continue d’être d’où je suis. Je sors dans la rue, dans les manifestations, bavardant avec tous, lisant la presse de tous bords, découvrant les ruses de ceux qui, de Barcelone à Madrid – en passant par n’importe quelle partie du monde – n’aiment pas leur pays ni ses gens, mais les entraînent derrière leur propre ambition et leurs intérêts déguisés en partis politiques.

Tu nommes « vautours » ceux qui s’abritent sous un autre drapeau que le tien. Malheureusement, Lluis, tous les drapeaux sont sales et personne ne nous protège. Alors, dis ce qu’il en est, s’il te plaît. Va dans la rue. Persuade nos concitoyens de ne pas former des troupeaux menés par des loups. A défaut de le faire, tu seras anéanti par la misanthropie, le mensonge et le ressentiment.

Nilda Fernandez

Le 24 Octobre

Nilda Fernandez persiste et signe

Deux mafias règlent leurs comptes

Quelle triste peine de constater qu’en ce début de XXIe siècle si mal engagé mais si bien informé, il se trouve encore des personnes pour ne pas accepter de voir que la situation désastreuse en Espagne est le fait de deux bandes rivales, deux féodalités attardées : l’une incarnée par Mariano Rajoy, parrain d’un parti corrompu basé à Madrid, et l’autre par Carles Puigdemont, politicard basé à Barcelone ! Grâce au thème de l’indépendance, voulue ou combattue, d’un territoire catalan habité à 60% par des « non-autochtones » (c’est-à-dire les descendants de l’émigration intérieure andalouse, galicienne, castillane…), les turpitudes, les magouilles, des uns et des autres sont reléguées au dernier banc.
Pourquoi donc s’aveugler, s’habiller de naïveté, au point de vouloir s’interposer entre un govern catalan héritier d’un Jordi Pujol corrompu qui a soutenu (contre rémunération, bien sûr) tous les représentants successifs de l’Etat espagnol (Suarez, Gonzalez, Aznar, Zapatero…) et un gobierno espagnol tout autant corrompu, héritier d’un franquisme new look, qui s’est largement servi de la Catalogne pour maintenir la cohésion du pays ?
Sous peine d’en être les complices et les dindons,  de corrompre notre jugement, qu’on les laisse donc continuer la farce et régler leurs comptes, mais qu’on ne blanchisse pas l’un au détriment de l’autre. Tous deux sentent mauvais, tous deux ne servent que leurs intérêts contre leurs peuples auxquels ils doivent tout. Ils sont à combattre également.
Je n’aime pas les nations, fruits de nos guerres et nos xénophobies. J’aime les langues et les habitudes, la culture de ceux qui les parlent. Mais celles-ci n’ont jamais dessiné des frontières qui ont toujours servi à asseoir les pouvoirs, les dominations, et à nous diviser.

Nilda Fernandez

Barbarie Barbara, le noir couleur lumière

12 Oct

Joueuse, joyeuse, malicieuse, sensuelle, grave sans être pesante, légère sans être futile, Barbarie fait vivre Barbara loin des clichés ultra éculés de la chanteuse en noir-minuit.

Ici c’est le noir couleur lumière qui donne aux chansons des couleurs vives et vivantes. Des chansons élues, choisies pour partie parmi les moins connues. On ne va pas chercher à caresser le public dans les sens de la nostalgie avec les incontournables ad libitum. Barbarie a fait le pari de mettre en avant un parcours de femme qui chante, dans lequel elle a découvert a posteriori des correspondances, des échos avec une partie de son propre parcours, géographique, comme un clin d’oeil amical. Qui justifiait pour elle cet essai réussi. Le second. Pour le premier, l’idée d’un spectacle Barbara était en filigrane, mais pourquoi ? Il y avait déjà pas mal de choses, que dire ou faire de plus ? Et puis après avoir vu quelques uns de ces spectacles, avec sa musicienne complice, la question : «  Faut-il faire quelque chose ? » a eu sa réponse, oui.

Dans la déferlante d’hommages qui vont occuper l’automne 2017, et au vu des répertoires retenus, tous plus ou moins copiés-collés sur une même play list, Barbarie offre un regard plus affiné, et Robert Doisneau aurait pu en dire,

Bon sang, mais c’est une radiographie. Vous avez regardé à l’intérieur ce qui n’est pas exposé à l’étalage.

C’est exactement le ressenti, oublions les clichés réducteurs, femme-piano, longue dame brune, que l’image perpétue ad nauseam. On sait maintenant que la vie de Barbara, hors scène, se passait en couleurs dans son jardin de fleurs, sous le soleil de Précy, et pas uniquement dans les soirs de piano au coin du feu. Et quand Barbara évoque le noir, c’est le noir couleur lumière.. Ce que montre Barbarie, les jours follement bigarrés d’une amoureuse de la vie, battante, dansante en voltes et virevoltes, comme une tarentelle cette danse thérapeutique du Sud de l’Italie…

Mention personnelle spéciale à la Lettre à Jacques Brel, et à  La fleur la Source et l’Amour , à vous de découvrir le reste.

Et en sortant de ce spectacle, ce n’est pas au cimetière qu’on a envie d’aller, mais au bal, dans le petit bois de St Amand

NB, le poids des images.

Barbara est apparue à la télé dans des années où il n’y avait qu’une chaine, en N&B, et pour la génération des premiers admirateurs, c’est cette image qui reste en sur impression, la chanteuse de minuit toute de noir vêtue. Et puis les décodages ultérieurs de quelques chansons sensibles ont perpétué, voire aggravé le préjugé. Beaucoup sont restés à la surface, à l’étalage.

Paradoxe inattendu, après ce spectacle remarquablement éclairé, ce sont les photos traitées en N&B qui sont les plus lumineuses, à vous de voir…

 

En bonus final, la photo de la belle équipe, avec la pianiste, trop loin derrière  son piano pendant le spectacle,

Les belles lumières du spectacle sont l’oeuvre du maître Stéphane Dutoict, un grand merci.

Norbert Gabriel

Et l’album est disponible dans la petite boutique des merveilles, voyez avec le chat, il vous guidera.

Anne Sylvestre 6 Octobre

9 Oct

Merci à Jihel pour cette image qui résume tout.

On a fait une grande et belle ballade, sur ses chemins de mots où les plus anciens retrouvent des traces familières, et les plus jeunes s’y reconnaissent assez bien si on en juge par un public très intergénérationnel. (Mes deux voisines avaient bien 60 ans à elles deux)

C’était le 6 Octobre, la première des 4 soirées à guichets fermés dans cette belle et grande salle le 13 ème art, place d’Italie

Une ballade qu’Anne Sylvestre fait dans ses carnets de notes, pour ses 60 ans (et quelques mois) de scène, elle a débuté en 1956, et elle chante toujours avec les mêmes convictions passionnées et rebelles.

Tous les éloges ont été dits, avec parfois les poncifs les plus éculés, elle est une dame, elle est grande, elle fait des chansons et hop, c’est parti pour … N’en jetons plus. Les jupons sont pleins.  Artiste majeure de la chanson, son œuvre sera bientôt disponible en intégrale chez EPM. Avant Noël.

Ce 6 Octobre dans ce grand théâtre, et vu du fond, il m’a semblé que les chansons d’Anne Sylvestre prenaient une dimension nouvelle, magnifiées par l’espace, tout comme la large scène lui donnait un décor grandiose et sobre, superbement éclairé par Rouveyrolis, montrant dans ce panorama cinémascope son trio de musiciennes, le piano de Nathalie Miravette, côté jardin, et le duo Isabelle Vuarnesson et Chloé Hammond côté cour. Un écrin musical parfait, avec violoncelle et clarinettes pour quelques diamants éternels..

©David Desreumaux2017

Cette photo a été empruntée à l’excellent David Desreumaux, ne lui répétez pas – que je lui ai piqué sa photo- mais vous pouvez lui en faire compliment.

Rien d’autre à ajouter, mais  il y aura peut-être une autre soirée pour celles et ceux qui ont manqué ces 4 jours, le dernier étant le mardi 10 octobre.

 

Le FB de Jihel, c’est là, la visite est savoureuse ——–>

 

 

Norbert Gabriel

Le noir couleur lumière, Barbarie, Barbara…

4 Oct

Dernière heure !

 

Il est peut-être encore temps pour avoir quelques places pour le spectacle…  Mais, il y a un album, et dans la déferlante de spectacles-hommages-albums, celui-ci tient une place particulière, par la finesse de l’interprétation, par un choix dans lequel on a l’impression de découvrir des inédits de Barbara, avec quelques chansons peu connues, et largement ignorées par la majorité des artistes qui « reprisent » et s’il n’en faut qu’un ce serait celui-là. Mention particulière à Gauguin, et L’enfant laboureur.

L’album est disponible entre autres chez MistiMusicShop, qui est à la chanson ce que Fauchon est à Lidl… (Lettre à Elise..)

 

Et rendez-vous lundi à l’Européen…  ou mardi ici même pour les échos.

Norbert Gabriel

La photo et le spectacle

2 Oct

En préambule, voici ce que dit Doisneau :

Suggérer, c’est créer. Décrire, c’est détruire.*

Et en application concrète, cette photographie de Carolyn Caro, qui donne une furieuse envie de s’intéresser à Charlie Winston,

Le spectacle vivant, en général, c’est Son&Lumière, la chanson, c’est Parole&Musique, et quand on a des vélléités de trouver l’image qui reflète ce qu’a été le spectacle, ce qu’exprime l’artiste en scène, il faut aussi la complicité créative des éclairagistes ; selon un principe qu’applique Stéphane Dutoict, un des maîtres du genre «  Eclaire bien les artistes que j’entende bien les paroles » Une évidence que personne ne remet en cause au théâtre ou à l’opéra, mais souvent moins bien comprise dans la chanson, où des choix de lumières crépusculaires handicapent parfois gravement le spectacle. Mais miracle de la technique photographique, avec les boitiers performants, on peut faire une belle image d’une scène que le spectateur en salle n’a pas vue, ou si peu… Là il y a une sorte de trahison, la vitrine montre ce qu’on ne verra pas à l’intérieur. Et dans cette même ligne, les performances du matériel, il est assez aisé de faire des images techniquement parfaites, qui vont ravir les photographes aimant davantage leurs photos que les sujets qu’ils immortalisent. Ou assassinent en toute bonne conscience. Souvenir douloureux d’une photo d’Allain Leprest – techniquement parfaite- dans laquelle un lecteur non averti verra une sorte de tueur psychopathe halluciné plus qu’un auteur chanteur humaniste. Ce n’est pas ce genre de photo qui peut inciter les amateurs à découvrir Leprest. Quand à ceux qui l’ont connu, dans l’ensemble, ils ont été horrifiés.

Autre image de Carolyn Caro qui fait revivre un moment de spectacle, peut-être plus suggestif avec le N&B, qui laisse au lecteur une part d’imagination personnelle, en y mettant ses couleurs, j’entends déjà le son de Léopold Tellier et ses cuivres lumineux.

 

 

 

Et pour rester avec la famille Tellier un portrait qui renvoie bien ce  qu’exprime le chanteur, Helmut Tellier, ou qui donne envie d’aller les voir en scène, en ayant la quasi certitude qu’on retrouvera ce que dit la photo, « si la photo est bonne, qu’on m’amène ce jeune homme » chantait Barbara… Quoique dans ce cas.. mais c’est une autre histoire.

 

 

 

Autre image, Asaf Avidan, entendez-vous sa voix ?

Et Didier Wampas, dans ses œuvres…

Pour terminer, ou ouvrir d’autres pages sur le sujet quelques points de vue de photographes en complément de celui de Robert Doisneau, chacun étant une des règles de vie qui me semblent essentielles, j’ai bien dit « qui ME semblent.… »

John Stuart Mill :« La photographie est une brève complicité entre la prévoyance et le hasard. »

Richard Avedon :« Un portrait n’est pas une ressemblance. Dès lors qu’une émotion ou qu’un fait est traduit en photo, il cesse d’être un fait pour devenir une opinion. L’inexactitude n’existe pas en photographie. Toutes les photos sont exactes. Aucune d’elles n’est la vérité. »

Roland Topor : « On reconnaît facilement le photographe professionnel au milieu d’un troupeau de touristes : c’est celui qui cache son appareil. »

Et pour quelques images de plus de Carolyn, c’est dans l’oeil ——>

 

 

*Suggérer, c’est créer. Décrire, c’est détruire… Proposition particulièrement pertinente quand l’extrême définition de certains portraits donne plus à voir de la photo médicolégale  qu’artistique. Il y eût un temps où les portraits faits à la chambre 30×40 étaient adoucis par un tulle posé devant l’objectif…

Norbert Gabriel

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