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De l’art de la critique

9 Oct

 

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Dans la presse chanson, vous trouvez des chroniques de spectacles, d’albums, parfois critiques. D’où la question, comment aborder l’exercice de la critique ? Voici deux points de vue qui abordent le sujet avec des angles différents et opposés. En lice, Jean-Jacques Goldman et Yves Simon, dans une table ronde publiée dans le premier Chorus en 1992. Sur le chapitre de la critique, voici ce qu’ils disaient :

Jean-Jacques Goldman : « Moi la seule chose que j’attends d’un article sur la musique, comme d’un article sur la Bosnie-Hertzégovine ou la coupe du monde de foot-ball, ce sont des in-for-ma-tions, rien d’autre. (…) Essentiellement des informations, c’est-à-dire savoir ce qu’il y a dans ce disque, s’il y a des chansons lentes, des rapides, comment est l’orchestration, de quoi parlent les textes, qui a fait quoi, même sans aller trop loin dans le technique, mais des informations. Ensuite si le critique veut ajouter quatre lignes de son propre goût – dont je n’ai absolument rien à foutre – bon, libre à lui si ça le défoule, il peut dire qu’il aime, qu’il n’aime pas, qu’il adore ou qu’il exècre, mais ça n’est pas très important ce que pense X ou Y, ce dont on a besoin, nous, c’est d’informations, ensuite on achètera le disque on est assez grands pour avoir notre propre opinion sans chercher à l’imposer aux autres. »

Yves Simon : « C’est pas la critique, ça ! Il y a une critique qui juge les romans, les pièces de théâtre, les films, pourquoi pas les chansons ? La critique, c’est pas ce que tu dis, c’est pas juste de l’information, c’est quelqu’un qui a fidélisé des lecteurs et qui donne son avis personnel, que ce ne soit pas très important, d’accord, mais c’est autre chose… »

Voici donc les deux pôles opposés, la suite de l’entretien nuance les propos, les élargit, mais c’est une bonne base de débat, pour que les lecteurs s’expriment sur le sujet : point de vue personnel, ou analyse clinique ?

Pour re-situer le point de vue de Jean-Jacques Goldman, il faut rappeler que dans les années qui ont précédé, la plupart des journaux l’ont délibérément ignoré, ou systématiquement flingué, alors qu’il était une des plus grosses vedettes du moment. Ce qui l’a conduit à acheter une pleine page de Libé avec toutes les critiques négatives, et en remerciant le public « Merci d’avoir jugé par vous-même. » (le 20 décembre 1985). On peut comprendre qu’il ait eu un ressentiment légitime envers certains « critiques » concevant leur métier plus comme un défouloir que comme un avis argumenté.

Dans les deux options proposées, ça suppose que l’album a été écouté, que le livret, quand il y a livret, doit être lu. Et sur ce point, avec la mode de la musique dématérialisée, pour le livret, c’est rapé. Enfin je suppose, peut-être qu’il y a un site où on va aller voir sur le web, imprimer son propre livret, le relier, le mettre dans un boitier, tout ça en moins bien… mais ceci est une autre histoire.

critique-litteraire-comme-recit-voyage-l-g9vffbEt deux approches à prendre en compte: « Ce qu’on te reproche, cultive-le, c’est toi. » (Cocteau)

et aussi,  C’est quelquefois la critique d’un critique que nous n’aimons pas qui nous fait aimer le livre critiqué.”   Jules Renard / Journal 1887-1892

Un autre point de vue est celui de Moustaki «  La critique, ce serait bien si c’était un poème sur un poème. » Et ce sera ma conclusion. Reste à savoir si on trempe sa plume dans le miel ou dans le fiel pour poétiser sur cette ligne.

Norbert Gabriel

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