Giant Sand, trio comprenant à l’origine Howe Gelb (chant), John Convertino et Joey Burns (co-fondateurs de Calexico en 1998). Groupe protéiforme né dans les années 70, méconnu du grand public mais admiré par toute la scène alternative, Giant Sand est une référence pour PJ Harvey, Will Oldham, Grandaddy ou Ron Sexsmith. Les membres de Giant Sand ont souvent changé de noms pour se mettre à la tête de divers projets, notamment OP8 (1997) où ils se sont associés à Lisa Germano pour un album salué par les critiques. Howe Gelb, leader incontournable souvent comparé à Neil Young, parvient à créer des atmosphères sombres mais féeriques grâce à l’éclectisme des styles musicaux qu’il emprunte : rock, jazz, folk ou blues. Les mélodies sont limpides, les arrangements somptueux, la voix de Gelb profonde et ravageuse… Giant Sand a tracé une oeuvre dense et éclectique qui est certainement l’une des plus fascinantes de la musique américaine contemporaine.
Ils reviennent à Paris avec Jason Lytle (leader de Grandaddy) pour un tout dernier concert le 19 avril au Trabendo.
Quand vous passez la porte de Choisy, vous êtes dans les terrains plus ou moins vagues au delà des fortifs. Là où les « migrants » de l’époque plantaient cabanes, ou garaient la verdine . Il y naissait des musiques manouches, et pas très loin, vers les bords de Marne les guinguettes faisaient guincher gigolettes et marlous, Pierrot et Colombine, Gabin et Arletty, Gavroche et Cosette.. Et ça tournait sur les valses swing, de Gus et Tony, Viseur et Murena, les frères Carrara, ou Louis Ferrari, les guitares de Django, le banjo-mandoline de Rico Crolla… Ce sont ces musiques qu’on a retrouvées ce dimanche après midi, au Forum Léo Ferré, à l’heure des vêpres ou du thé, selon votre religion, au pied du moulin d’Yvry, avec le quatuor CCFV, Colin-Cravic-Febrer- Viret, Daniel, Dominique, Mathilde et Jean-Philippe. Pour une sorte de conférence très musicale sur le swing musette, et deux de ses icônes, Gus Viseur et Tony Murena. Deux étoiles prestigieuses de l’accordéon jazz. Avec démonstrations, et mises en situation par Prof Cravic, pour vérifier que ces musiques à tourner la tête en valses enivrantes sont des musiques de virtuoses. Celles qui nous furent présentées sont réunies sur un album à venir, produit par un japonais amoureux de la France, un récidiviste qui a déjà réalisé des albums avec cette même dream team , que Martin Scorcèse a choisie pour son film Hugo Cabret quand on y entend une valse de Paris des années 30.
Dans ce concert mémoire aux grands anciens, le quartet a ajouté quelques compositions personnelles, plus fraîchement jazz, et aussi trois musiques de Django, Douce Ambiance, Nuages, et un formidable Swing 42, autant de morceaux de bravoure où chaque musicien donne sa pleine mesure, avec un magnifique chorus guitare, tout en accords, d’une rare finesse, et il m’a bien semblé voir passer la silhouette d’Enrico, le môme Crolla qui fit ses enfances Porte de Choisy, plus tard les beaux jours du Club St Germain renaissant.
On a pu vérifier cet après midi ce que disait Emmanuel Soudieux pour le jazz dit manouche, quatre bons musiciens, pas la peine d’avoir deux guitaristes pour la pompe, à l’époque il pensait au quartet Crolla-Grappelli-Soudieux-MacKac Reilles, ici nous avons l’excellent Daniel Colin à l’accordéon, la fougueuse Mathilde Febrer au violon, la contrebasse souple et puissante de Jean-Philippe Viret, la guitare élégante de Dominique Cravic, pour un swing impeccable. Loin des solos mitraillettes des néo-Django, ceux dont Sarane Ferret disait déjà en 1945, « C’est bien toutes ces notes, mais on n’a pas le temps de voir le paysage » quand il découvrait les speedés mettant le turbo au médiator.
Ce dimanche après midi on a vu les paysages, le charme des valses corps à corps qu’on peut préférer aux pogotages à un mètre du partenaire. La danse, c’est mieux à deux. Et le swing musette est un bon prélude aux rapprochements humains.
Claire Elzière a fait une apparition chantée, deux danseuses ont tourné dans l’ombre de la salle, et tout le monde s’est dit qu’on reprendrait volontiers quelques tournées de cette musique ludique.
Un autre écho s’est glissé entre les tables, quand Georges disait au vieux Léon,
Et le p’tit bleu/ Est-c’que ça n’le/Rend pas meilleur/ D’être servi/Au sein des vignes du Seigneur
Et si l’bon Dieu/Aim’ tant soit peu/L’accordéon/Au firmament/Tu t’plais sûr’ment/Mon vieux Léon
La cuvée spéciale Forum vaut aussi le détour, et remettez nous ça, en musique bien sûr. Pour patienter, un extrait de l’excellent « Voyage de Django » où on retrouve ce quartet augmenté de quelques belles pointures du genre.. Album recommandé par la maison. (Toutes infos ICI.)
et pour quelques notes de ce voyage,
Latcho drom, et que ça swingue… Norbert Gabriel
Si vous avez été un peu intrigués par Rico Crolla, et que vous souhaitiez en savoir un peu plus, voilà son enfance dans la zone, et quelques infos de plus… L’enfance de l’art de Crolla, c’est là.