Entretien avec Valérian Renault pour le financement participatif du nouvel album des Vendeurs d’Enclumes

10 Mai

Capture d’écran 2024-05-09 135223

Reformé en 2022, après presque une décennie d’absence, les Vendeurs d’Enclumes, ayant tourné une série de concerts avec leurs anciens titres depuis la fin du confinement, se sont remis à la composition de nouveaux morceaux, qui écrivent une nouvelle page, une seconde vie, de leur groupe. La formation orléanaise fédérée autour de Valérian Renault, dont la plume fine et ciselée et l’interprétation si bouleversante bousculent, réveillent et attisent le feu des émotions, et torpillent la conscience, dans une effervescence musicale où l’inventivité du Jazz et l’instinct du Rock traversent la Chanson française avec originalité et caractère, a donc récemment arrangé et enregistré un nouvel album, et, évoluant désormais en autoproduction, lancé une appel à financement participatif via la plateforme helloasso, financement prolongé jusqu’au 30 mai, afin de l’aider à payer les étapes suivantes de mixage et mastering, ici : https://www.helloasso.com/associations/loges-production/collectes/nouvel-album-vendeurs-d-enclumes

Il y a quelques jours Valérian Renault nous accordait un entretien pour en parler.

– Valérian, bonjour et merci de cet entretien. Voilà plus de dix ans que les Vendeurs d’Enclumes s’étaient séparés. Comment vous êtes-vous amenés à souhaiter rejouer ensemble ?

Je te refais un peu l’historique : on s’était créés en 2000, et on a tourné ensemble comme des fous jusqu’en 2013. Après une dernière tournée au Québec, on a décidé de se séparer à ce moment là, et de faire nos chemins, chacun de son côté. Et puis beaucoup plus tard, vers la fin du confinement, on a eu envie de se reformer, au départ juste pour un « oneshot », une petite série de concerts juste pour le plaisir. On a fait quelques résidences et remis le groupe sur pieds, sur la base d’un florilèges de quelques unes de nos meilleures chansons. Et, en fait, on y a pris goût : on a fait de très beaux concerts, et devant le plaisir qu’on y prenait et l’accueil du public, on a décidé de faire un nouvel album pour officialiser le retour dans le « game ». C’est aussi pour nous ouvrir un peu plus les portes de tournées, vis à vis des programmateurs, qui ont souvent besoin d’un album, d’une actualité, pour envisager une programmation. C’était donc dans cette optique là. Par contre contrairement à l’époque où on avait toute une machinerie derrière de producteurs, diffuseurs, etc, on n’a plus rien de tout ça ; on bosse avec une petite asso que j’ai créée, en autoproduction complète. C’est pour ça qu’on a eu cette idée de lancer une campagne de financement participatif, pour nous aider, et ma foi, ça marche plutôt pas mal. On a déjà les fonds pour se payer une semaine de studio, et on prolonge encore un petit peu pour trouver de quoi payer le mixage, le mastering et la fabrication. Les titres sont tous déjà enregistrés ; la prise de son est faite. Il reste à mixer et masteriser.

– Opter pour l’autoproduction résulte-t-il d’une nécessité de fait ou d’un choix lié à une volonté de liberté artistique ?

Les deux. Par voie de conséquence, puisque, n’existant plus, quand on a décidé de se reformer, on repartait à zéro. On a eu une proposition d’un tourneur qui voulait travailler avec nous ; d’ailleurs on a essayer quelques mois. Et par ailleurs, on avait eu quelques déboires, par rapport au fait qu’avant, on n’était pas producteurs de nos albums, et ça a été un véritable parcours du combattant, qui d’ailleurs n’est pas terminé, pour essayer de récupérer les masters des albums pour pouvoir les refabriquer. Ça a été très compliqué. Donc on s’est dit qu’on n’allait pas rechercher toute une équipe de gens comme ça, et qu’on allait s’autoproduire. On aurait sans doute moins de budget pour l’album ; mais par contre on aurait une totale liberté, et quand l’album serait fait, on en aurait l’usufruit complètement. C’est moi qui organise le travail de tourneur. Alors c’est vrai que je n’ai pas le temps de faire cela à plein temps, aussi bien et autant que je le voudrais. Mais c’est toujours mieux que rien, et ça permet d’avoir une petite équipe, un spectacle qui coûte moins cher, et avec lequel on est plus libres. C’est très difficile de trouver des indépendants qui peuvent faire ce métier -tourneur- correctement, parce que ça représente une énorme masse de travail pour une toute petite rémunération. Je m’en sors, car je suis à la fois l’artiste et le tourneur, et au final je fais deux métiers pour une rémunération. Mais embaucher un tourneur qui se paye à la commission et peut travailler dans ces conditions pour faire tourner un groupe comme le notre, c’est compliqué.

– Avec quels membres anciens et peut-être nouveaux as-tu reformé le groupe ?

De toute façon, c’est difficile de parler des membres d’origine, parce que déjà sur les treize premières années d’existence, le groupe a changé énormément de formation. Là il y a encore deux musiciens qui changent par rapport à la dernière mouture. Des anciens membres, on a gardé le batteur, le bassiste, le saxophoniste soprano/alto ; et on a un nouveau guitariste et un nouveau saxophoniste baryton/tenor.

– Et la formation se sent-elle enrichie, aguerrie, ou étoffée de ce qu’y rapporte chaque membre, fort de son parcours individuel ?

Complètement ! Chacun a développé et précisé les goûts et les compétences qu’on avait, chacun, dans notre domaine. Tourner en solo guitare/voix pendant des années m’a permis de développer un tout autre rapport à la scène et au public. Et chacun des musiciens, individuellement, en ayant plus de temps pour monter son propre projet et s’épanouir dans les musiques qui sont les siennes, peut rapporter ces choses. Du fait de se réunir comme ça, on sent que plein de choses se sont épanouies qu’on rapporte dans le groupe ; donc le groupe prend encore plus de points qu’avant.

– Avez-vous senti, une avidité du public pour l’évènementiel, accrue par la privation due au confinement, ou plutôt qui peinait à revenir ?

On a fait le premier concert début 2022. Sur ce spectacle là, mais aussi tous les spectacles sur lesquels on travaille, quand on a pu retourner sur scène, même juste après le confinement, dans cette période un petit peu étrange où il fallait respecter les distances et consignes de sécurités, les gens étaient quand même au rendez-vous, ce qui prouve bien qu’il y avait une vraie attente. Il faut essayer de voir le positif et se dire que ça va revenir comme avant.

– De ton point de vue, écris-tu différemment pour les Vendeurs d’Enclumes pour que pour tes albums solo ?

Oui, sans doute. C’est difficile à dire, parce que c’est toujours plus ou moins le même point de départ. Mais de par le travail qu’on fait de mise en musique et d’importance qu’on donne à la musique dans le groupe, ça m’oblige à changer mes critères. Il y a des textes que j’aime, mais que je ne sélectionne pas pour les Vendeurs, parce que je sens que, musicalement, il n’y aurait pas forcément la place d’être inventifs, et d’y faire ce qu’on voudrait. Et, inversement, il y a des textes que je n’aurais pas forcément sélectionnés pour un guitare/voix, et qui vont avoir toute leur place au milieu de l’orchestration du groupe. Donc ce n’est pas radicalement différent : ça reste des chansons écrites et composées par moi. Mais il y a des choses un peu différentes dans la démarche. Et puis surtout, sur ce nouvel album, on a essayé quelque chose d’un peu différent : sur les précédents albums, c’était à 100 % moi qui écrivais et à 95 % moi qui composais ; et sur cet album j’ai composé à peine une moitié des musiques, et j’ai demandé aux musiciens de composer les musiques de certaines chansons, en partant directement du texte. Ça permet d’ouvrir des horizons musicaux ; il y a de nouvelles couleurs qui apparaissent dans notre répertoire, et c’est vachement chouette. C’est surtout le bassiste, Nicolas, et le saxophoniste, David, qui ont composé pas mal. Je leur envoie les textes, et quand un des musiciens est inspiré, il compose, et puis on travaille ensuite ensemble pour les arrangements.

Miren Funke

Liens : financement : https://www.helloasso.com/associations/loges-production/collectes/nouvel-album-vendeurs-d-enclumes

Site et facebooks :

https://loges-production.com/spectacle/vendeurs-denclumes/

https://www.facebook.com/profile.php?id=100074283711360

https://www.facebook.com/valerian.renault

Regards de spectacles…

6 Mai
 
1-Romain joconde AAA réduit 3982x3250 3982x3250 3982x3250Regards croisés, des chanteurs et chanteuses sur la scène de la vie qui ont des choses à dire, et aussi à montrer… sous le regard tendre et complice du photographe Norbert Gabriel.
 
Le Printemps de la chanson à la bibliothèque Valeyre, c’est aussi :
– un concert de Laura Flane le 4 mai
– un atelier d’écriture de chansons animé par Claude Lemesle les 15 et 28 mai
– Aznavour, à nos amours : du 21 au 25 mai, une sélection thématique à l’occasion du 100e anniversaire de la naissance du chanteur- un petit déjeuner musical autour des chansons de Claude Lemesle le 25 mai
– La Fille polaire : concert-spectacle de Camille Feist le 25 mai.
 
L’expo réunit 24 tirages  et un patchwork .. 
 
Note d’intention :   J’observe, j’essaie de divertir, mais je cherche avant tout des photos qui ont une émotion. (Elliott Erwitt)La photo de spectacle est tributaire des lumières de la salle… Et un spectacle mal éclairé, perd un peu de son intérêt … « Eclaire bien la chanteuse que j’entende bien les paroles. » (un créateur de lumières à son élève) Il faut parfois faire des choix, chercher la perfection technique, ou chercher l’image qui va provoquer une émotion.

Ou on soigne trop son ouvrage
ou on ne le soigne pas assez,
on trouve rarement l’entre deux qui boite avec grâce
(Une leçon de Cocteau pratiquée par Pierre Barouh)

Ces regards de spectacle sont les regards de l’artiste vers le public, les yeux dans les yeux, ou les regards échangés dans des instants complices. Et au final, trouver l’image qui montre ce qui reste dans l’esprit du public après le spectacle… 

Capter un regard n’est pas toujours facile dans les situations de scène, le plus souvent très mouvantes. La révélation, en quelque sorte, ce fut avec Annick Roux, que je voyais pour la première fois dans un spectacle collectif, elle terminait sa chanson « le général à vendre » par le regard émerveillé et ému de l’enfant qui voit dans le ciel les étoiles de son général aux aventures abracadabrantesques joyeusement chantées par Annick Roux, qui retourne la situation magistralement vers une fin poétique et sensible.. Et coup de chance la photo me montrait ça… Subjectivement peut-être ..

Ensuite j’ai continué à chercher avec une autre comédienne chanteuse, Valérie Mischler, dont l’expressivité et la faculté de passer du burlesque à la tendresse excellaient dans ses chansons et son spectacle Dimey. Je l’ai beaucoup suivie pour affiner cette recherche, et sur d’autres scènes, il y a eu de beaux regards croisés. L’un de mes préférés est l’échange de regards entre Romain Didier et Francis Lemarque, un instant saisi presque instinctivement… ça se joue au 100 è/sec..

Dans cet exercice, merci à Lili Cros et Thierry Chazelle dont les regards amoureux peuvent nourrir avec bonheur un agenda de 365 jours… Ou 366 le cas échéant.

Avant Elliott Erwitt, il y a Robert Doisneau Suggérer, c’est créer, décrire, c’est détruire.

Annick Roux, a-roux- 300 dpi 16-mai-sepia-3-aaa-1584x1706-16-05-2011-21-09-50-743x800_4l6uysL1Théâtre de la Reine Blanche 2008

 

Montage final 2 Expo valeyre red

Norbert Gabriel

Rencontre avec le groupe Tíatío, en première partie d’Yves Jamait

3 Mai

Capture d’écran 2024-04-27 145107

Jeudi 4 avril dernier au Rocher de Palmer à Cenon (33) Yves Jamait nous offrit la joie d’avoir amené jusqu’à nous le groupe Tíatío, qui avait précédemment joué plusieurs fois en première partie de concerts de sa tournée « Plancha Tour », pour allumer la soirée. Dès les premiers accords, le dépaysement musical immédiat annonçait quelques unes des couleurs de la palette des horizons, dont allait nous proposer un aperçu le trio dijonnais, qui, en l’espace de cinq chansons nous téléporta d’un point du globe terrestre à l’autre. Un voyage éclair au grand large de continents lointains, dont langues, rythmes et mélodies se trouvaient réunies au creux de trois paires de bras et dans le souffle de trois voix, pour enchanter le public.

Le voyage, c’est précisément l’envie de nous y inviter qui insuffle son essence au groupe, fédérant les répertoires et influences respectives de trois auteurs-compositeurs-interprètes, liés de longue date par des collaborations, et surtout une proximité humaine : Daniel Fernandez, amoureux de musiques hispaniques et latines cuivrées, Chloé Bosc aux chansons francophones acoustiques épurées, mais néanmoins nourries d’histoires et de rythmes étrangers, et Mansour, passeur de musiques africaines. Si Tíatío s’est constitué un premier répertoire en prenant plaisir à réarranger et interpréter ensemble des chansons de chacun de ces trois artistes, de ce mélange aux milles saveurs sonores issues de vagabondages et de rencontres, et y retournant, naît et se sculpte une identité à cohérence croissante, à l’esprit unifié pour devenir unique, qui créé à présent ses chansons propres, et invente sont propre voyage polyéthnique, mi-inspiré de cultures musicales séculaires, mi-rêvé, sur les ailes duquel il a su nous envoler, avant de nous redéposer délicatement, sur ces places assises dans la salle de concert, un peu étourdis, et encore émerveillés, par ces décalages horaires restés dans le cœur.

Alors que la sortie d’un premier album s’annonce pour le courant de l’année, le groupe, en résidence pour peaufiner et préparer sa propre tournée acceptait de nous accorder un entretien, dans les jours qui suivirent.

Capture d’écran 2024-04-27 145130– Bonjour et merci de nous accorder un entretien. On vous a, pour notre part, découverts en première partie d’Yves Jamait lors du concert du « Plancha Tour », et ce fut une première partie saisissante et palpitante, qui nous fit entendre du pays, des pays. Comment est né votre groupe ?

– Daniel : En plein covid, avec Mansour, on est partis jouer dans le Morvan pour un concert clandestin. Chloé habitait encore dans le Morvan. Donc j’ai proposé de l’appeler pour jouer deux ou trois chansons. Et finalement on a joué pendant trois heures. Les gens étaient ravis. Chloé est ma nièce ; avec Mansour, on a joué longtemps ensemble. Enfin bref, c’est une famille, tout ça.Jouer un concert clandestin dans un lieu magique comme ça a ravi les gens. Le lendemain, on a reçu plein de messages demandant comment on s’appelait, et quand on rejouerait. En fait on ne s’appelait pas, parce qu’on n’existait pas. Et donc à partir de là, on a décidé de monter ce groupe, Tíatío : trois auteurs-compositeurs qui s’accompagnent mutuellement. Dans cette soirée là, on a joué des chansons respectives de chacun de nous ; on a bricolé. On a décidé de jouer nos morceaux déjà existants et de les habiller, en mettant chacun sa patte pour les arranger. Donc pour le moment nous jouons ensemble les morceaux de nos répertoires respectifs, et puis, petit à petit, il y a de nouveaux morceaux. Le prochain album, ce sera vraiment des compositions collectives du groupe.

– Chloé : Le premier album est déjà enregistré ; il est en mixage. Il sortira dans quelques mois, dans le deuxième semestre de l’année. On annoncera la sortie sur les réseaux sociaux, avec les liens pour le commander.

Capture d’écran 2024-04-27 145147– Vous répertoires respectifs sont très différents, tant des influences qui les nourrissent que des choix d’instrumentalisation, entre la chanson guitare-voix dépouillées de l’album « Silence » de Chloé, les musiques cubaines, riches de percussions et de cuivres du « Yuma » de Daniel, et les inspirations plutôt africaines de « Ici là bas » de Mansour. La cohésion et l’harmonisation était-elle une évidence entre vous ?

– Mansour : Mes influences sont au Sénégal, plus particulièrement. Je n’y ai pas à proprement vécu, mais c’est ma deuxième patrie, ma deuxième famille, puisque j’ai été marié avec une Sénégalaise et nous avons eu quatre enfants ; je suis parrain d’une association qui s’appelle « Grandir au Sénégal » [https://www.facebook.com/people/Grandir-Au-S%C3%A9n%C3%A9gal/100071527531685/] qui finance la construction de bâtiments scolaires, des sanitaires, une cantine. Et puis j’ai joué avec plein de musiciens du Sénégal. J’adore la rencontre, le partage des influences. J’ai beaucoup appris du Sénégal. Et j’aborde la langue wolof par la chanson.

– Chloé : Ça fait partie des ingrédients de Tíatío et de ce qui nous a rapprochés, au-delà de notre amitié : on est trois voyageurs. Je me suis retrouvée à partir au Bénin quand j’avais dix sept ans, et je suis tombée amoureuse de ce pays. J’y suis revenue plein de fois. Je suis partie en Turquie, au Maroc, et chaque fois j’ai fait des rencontres musicales. J’ai ramené des choses ; par exemple de la Turquie, j’ai ramené le sept temps, du Maghreb, le père de mon fils.

– Daniel : J’ai aussi voyagé dans plein de pays quand j’étais plus jeune. Mon album, je l’ai fait à Cuba avec mes musiciens. On a chacun notre histoire, en fait. Mansour aussi a son groupe, et Chloé a ses histoires aussi. Et chaque fois j’ai ramené des chansons de mes voyages. C’était donc facile pour nous de jouer ensemble : chacun ramène un bout de ses voyages ; on mélange, on arrive à marier ce que chacun ramène dans ses bagages.

– Chloé : Je le dis parfois sur scène : y a des gens qui, quand ils voyagent, ramènent des tapis, des photos, des objets, des souvenirs. Nous, on voyage avec notre instrument. On a chacun une guitare de voyage qu’on embarque. On rencontre beaucoup de gens par la musique, et du coup, on ramène des portraits, des ambiances, des bouts de mélodie, des rythmes, des sujets dont on a envie de parler et qu’on a ramené dans nos valises. Et comme on a tous les trois ce goût là, c’est fondateur dans notre façon de faire de la musique. On se retrouve, et c’est un peu comme si chacun avait ramené un ingrédient : Daniel met du chorizo, Mansour du mafé, moi un peu de piment et de cumin, et on tambouille tout ça, et on en fait quelque chose qui devient nos morceaux personnels, mais sauce Tíatío. Pour le moment on a seize titres, dont douze sont sur l’album à venir.

– Comment chacun de vous s’est-il formé à la pratique musicale ?

– Daniel : J’ai fait une école de musique à Nancy, un peu plus moderne qu’un conservatoire. Mansour a appris différemment.

– Chloé : Quant à moi, j’ai appris en jouant avec des musiciens. Je voulais chanter et jouer. J’ai appris beaucoup de rythmes dans mes voyages ; j’ai toujours aimé la percussion. C’est très accessible quand on n’a pas de solfège. Et après j’ai travaillé avec des musiciens de Jazz, donc j’écoutais beaucoup ; je chopais des conseils à droite, à gauche.

– Mansour : Je suis un peu comme Chloé, totalement autodidacte : à mon adolescence, j’ai repris pas mal de morceaux de Rock et de Blues, à l’oreille, avec la guitare. Et puis en fréquentant des musiciens, automatiquement, on apprend plein de choses. Par la force des choses, on apprend aussi la théorie et le solfège.

– Chloé : La musique est un langage facile. C’est à dire que ce n’est pas compliqué de se rencontrer en musique. Si tu construis un mur entre deux musiciens, la musique passera par dessus le mur. Donc quand tu es autodidacte, c’est assez naturel de trouver des astuces pour se retrouver.

Capture d’écran 2024-04-27 145216– Et comment s’est décidé cette tournée en première partie d’Yves Jamait ?

Chloé : Simplement. Il nous a invité à faire sa première partie à Quétigny (21), il y a deux ans de ça, pour des enfants malades. On est venus par amitié. En fait il voulait nous voir et voir ce qu’on faisait. Et quand on est descendus de scène, il a dit qu’il adorait, et nous proposait une première partie sur plusieurs dates de cette tournée, le Zénith de Dijon entre autres. On est tous dijonnais, donc on se connaît, en fait, on est amis. Mansour a chanté et joué de la guitare sur le dernier album d’Yves. Moi, j’ai partagé la scène avec Yves plusieurs fois à l’époque où j’avais un autre groupe de chansons françaises, y a longtemps. Daniel connaît Yves depuis vingt cinq ans. C’est un cercle d’amis avec une estime musicale réciproque. Donc on est contents de se retrouver dans les loges, partager la scène, se marrer. Yves est parrain d’une association à Dijon qui s’appelle Association Grand Dire [https://www.facebook.com/asso.granddire/?locale=fr_FR ], pour des enfants malades, lourdement handicapés, et tous les ans il organise un concert au profit de cette asso. Et donc il invite les copains et les groupes locaux. Cette année, on était trois chanteuses, avec en plus Simon Goldin, à partager la scène avec lui. C’est dans ce cadre là que j’ai été appelée à jouer plusieurs fois avec lui. Daniel, lui, a joué avec Yves sur 250 dates. Et Mansour, pareil.

– Daniel : Avec Yves, on a joué pendant dix ans ensemble ; on a fait beaucoup de bénévolat. Il apparaît dans mes clips, moi dans les siens.

– Mansour : Si tu suis Jamait depuis longtemps, je suis sur un de ces albums ; je chante et joue sur la chanson « Nous nous reverrons ». On a donc travaillé cinq, six, morceaux à jouer en première partie d’Yves. Mais en ce moment on travaille un répertoire de deux heures pour vraiment jouer un concert de Tia Tio.

– Daniel mentionnait une forte adhésion du public à votre musique dès le départ. En constatez-vous la récurrence ?

– Chloé : Non, ils sont très déçus en général! Non, en fait c’est ce que te racontait Daniel : ça fonctionne chaque fois, les gens sont ravis. Même des fois quand nous mêmes ne sommes pas très contents de ce qu’on a fait, parce qu’on était pas très en place, les gens sortent de nos concerts, joyeux. Du coup on reçoit beaucoup de joie et ça nous motive.

– Mansour : La phrase principale qui ressort après nos concert, c’est : « on a vraiment voyagé avec vous ». Les gens ont l’impression que ça passe trop vite ; et même nous, on a l’impression que deux heures passent en dix minutes.

Capture d’écran 2024-04-27 145235

Miren Funke

Photos : Carolyn Caro

Liens : Tia Tio : https://www.facebook.com/profile.php?id=100067791408431&locale=fr_FR

Daniel Fernandez : https://www.facebook.com/daniel.fernandez.180410?locale=fr_FR

Chloé Bosc : https://www.facebook.com/chloe.bosc.946?locale=fr_FR

Mansour : https://www.facebook.com/profile.php?id=100063651579062&locale=fr_FR

Claudia Meyer et La Negra…

28 Avr

Claudia Meyer réduitClaudia Meyer a exploré avec bonheur divers genres musicaux et c’est avec La Negra qu’elle a trouvé son chef d’oeuvre, le spectacle abouti et nourri de tous les chants des humains en marche vers une vie moins rugueuse.

Mercedes Sosa , la Negra, chantait les douleurs et l’espérance des peuples silencieux, les gens de rien, avec des musiques métissées de toutes les douleurs, des chants de coeur battant, de cicatrices ouvertes jamais guéries , blues negro ou rouge flamenco, lamento tzigane, c’est toujours le canto jondo des opprimés ou des déracinés.

Claudia Meyer et Marc Benabou (Marquito) ont élaboré une rhapsodie sud américaine qui résonne partout dans le monde, tous les folklores se retrouvent quand il s’agit du chant des hommes et des femmes dans leur lutte permanente pour la liberté et la dignité.

Sur le plan musical, le duo guitare percussions ouvre des espaces insoupçonnés, les tambours de Marquito allient la subtilité et la force sans effets tonitruants , comme une houle puissante qui embarque tout, il y a quelques notes de flûte de Pan, de charango, la présence du bombo, dont le nom suggère le son, profond et doux, accordé sur l’infini, il évoque aussi le son des tambours des indiens des plaines dans leurs danses chamaniques… Et c’est un danseuse qui le fait entrer en scène, après une apparition d’elfe aux doigts de lumière. C’est le message de la vie qui danse et renaît chaque matin…Claudia M danseuse

Je suis un souvenir qui marche et j’ai l’âme tatouée d’un chemin destiné à n’arriver jamais. *

L’important ce n’est pas le bout de la route, mais la route. Une route que Claudia Meyer et Marc Benabou tracent en compagnie de Mercedes Sosa.

C’était le 25 Mars, au Café de la Danse, à Paris. 

Le site de Claudia Meyer, c’est ici —>   https://www.claudia-meyer.fr/

Et pour quelques photos de plus …

MONTAGE cm lddlo

  • *Federico Garcia Lorca

Norbert Gabriel

Nawel Dombromsky, I.n.c.a r.n.é.e

26 Avr

Nawele Ldlo réduitSur son berceau, bébée Nawel a eu quelques marraines plus ou moins fées, ou sorcières de bonne compagnie, l’une lui a offert les écrits d’Olympe de Gouges et Louise Michel, l’autre les lettres de Calamity Jane, et la troisième, la biographie de Shéhérazade par Wolinski en lui disant : «  tu seras la Shéhérazade des années 2000. » Mi-Angela Davis, mi-Joséphine Baker, mi-Athéna… Il faut ce qu’il faut !

On dit aussi que des sortes de rois mages Balthazar Melchior et Yanowski avaient apporté une batterie de cuisine pour bien exploiter les recettes (d)étonnantes de Yanowski… C’est possible …

Aujourd’hui cette Shéhérazade est la femme dans tous ses états, surtout l’état d’insurrection. Vous y croiserez une collectionneuse de p’tits vieux à Deauville, une femme fatale maladroite, des en manque d’amour et des donneuses d’amour, des femmes activistes, vingt-cinq chat-narchistes, une statuette de la vierge posée dans un hôtel à Pigalle, une chanteuse mexicaine et même Stromae…  Et une possible présidente,  par les temps qui courent, Nana Présidente serait bien la meilleure chose pouvant nous arriver.

Avec ses deux complices talentueux multi instrumentistes, Nolwenn Tanet et Louis Ouvrard-Arnaud,  Nawel Dombromsky offre une fantasia extravertie,  c’est tonique, c’est aussi joyeux, même si c’est le chant et les larmes de beaucoup de femmes dans le monde, ici et maintenant, et elle passera un jour ou l’autre dans votre périmètre de vie, vous pouvez aussi aller au Festival d’Avignon en Juillet. Voyez ici le tourniquet de sa vie d’artiste –> https://www.facebook.com/nana.dombrowsky

La mise en scène et la création lumière sont de Xavier Lacouture !  1-XavierLacouture Par-fait!! AAA 2 3530x2461 04-01-2016 21-08-11

Et pour quelques photos de plus ..

Montage Nawell Incarnée

Les femmes à la cuisine c’était ça :

https://leblogdudoigtdansloeil.wordpress.com/2022/12/23/les-femmes-a-la-cuisine/

Norbert Gabriel

Entretien avec Yves Jamait à l’occasion du concert du « Plancha Tour » au Rocher de Palmer de Cenon (33)

22 Avr

Capture d’écran 2024-04-19 193844

S’il y a bien une constante qui s’invite avec récurrence lors des concerts d’Yves Jamait, en dépit de la singularité des répertoires d’albums qu’il interprète, d’une tournée à l’autre, c’est la recharge de sérotonine que le moment nous apporte et dont il nous emplis. Le phénomène est d’autant plus accentué durant les tours de chant, où le chanteur ramène à nous les titres populaires de ses anciens albums, en compagnie de ses musiciens et complices comiques, comme ce fut le cas avec les deux tournées « Parenthèse I » et « II », et c’est actuellement le cas avec la présente tournée « Plancha Tour », sans Didier Grebot sur scène cette fois, mais toujours avec Mario Cimenti (batterie/percussions), Samuel Garcia (accordéon) et Jérôme Broyer (guitare). Preuve en est le répondant du public acquis à l’artiste, toujours au rendez-vous, qui, pour l’occasion, s’autorise à interagir d’autant plus joyeusement, et devenir, le temps d’un concert, le cinquième membre d’un groupe qui improvise ensemble ces moments chaleureux et exaltants de fous rires, par des échanges aussi spontanés que tendres et drôles, parfois pittoresques et incongrus.

Drôles et tendres, en écho à ce que l’artiste communique à travers ses chansons, même lorsqu’en jaillissent des pensées graves (« Je passais par hasard ») et des sentiments profonds, car la poésie d’Yves Jamait, même mélancolique (« Vierzon », « Même sans toi ») sait n’être jamais dramaturgique, du moins, sait porter en elle plus de tendresse que de tragédie. C’est que la justesse du regard qui en éclaire la vie, infiniment humain, raconte beaucoup de l’humilité de notre sensibilité, parfois impuissante, en même temps que de la grandeur d’âme des cœurs qui remuent, se blessent, s’indignent ou s’émerveillent, s’enivrent ou s’alarment, et aiment. Il en va de même pour la nostalgie du temps passé (« Gare au train »), thème dont l’emprunte marque l’œuvre de l’artiste, qui, en évitant, avec élégance, les relents réactionnaires de pessimisme et de morosité, nous parvient et nous revient toujours pour partager la douceur de souvenirs d’un temps, d’une époque, d’une enfance, d’une mémoire gravée dans une chanson.

Quand certaines tournées d’autres artistes interprétant leurs anciens succès, entre deux actualités, peuvent parfois relever d’un spectacle plus mort que vivant, celles d’Yves Jamait ont toujours su enjouer le public, qui montre un immense plaisir à l’entendre incarner ses personnages, lui raconter ses histoires, l’embarquer dans d’autres vies, qui peut-être ressemblent aux nôtres, ou, le cas échéant, peut-être précisément parce qu’elles ne leur ressemblent pas, nous révèlent quelque chose de nous-mêmes, en nous faisant aimer un autre, si lointain et différent, et pourtant tellement proche et semblable. Gageons que si nous n’avons pas tous mis les pieds au bar de l’univers, chacun de nous pourrait être un autre accoudé au comptoir d’un autre Jean Louis ; chacun de nous pourrait être un autre homme, une autre femme, qui passe par hasard chez un couple d’amis en apparence idéal pour y découvrir, sidéré(e), l’horreur conjugale ; chacun de nous pourrait devoir faire le deuil d’un autre amour perdu à côté d’un autre carrousel, ou, un jour, vouloir prendre la route, coûte que coûte...

Capture d’écran 2024-04-19 193730Le concert qui eu lieu jeudi 4 avril au Rocher de Palmer de Cenon (33) signa un moment fabuleusement attendrissant et drôle, tonique et nitescent, à la veine irriguée par l’énergie complice et cocasse qui circule entre Yves Jamait et ses musiciens tout au long du spectacle, et rejaillit dans la salle, entre les gens, où des histoires, des émotions, pourtant déjà mille fois chantées et entendues, venaient encore bousculer, renverser, atteindre l’émoi et piquer les yeux. Et le moment fut d’autant plus engageant que le concert de l’artiste y fût précédé par une première partie assurée par le trio dijonnais Tia Tio (bientôt en entretien), qui, en cinq chansons, nous amena voyager, nous téléportant d’un point à l’autre du globe terrestre, surpris de déjà nous trouver si loin en si peu de temps.

Auparavant Yves Jamait acceptait de nous accorder un entretien.

Capture d’écran 2024-04-19 193821

– Yves bonjour et merci pour ce nouvel entretien. Nous nous étions vus précédemment pour la tournée « Parenthèse II », et, entre temps, tu as promené le répertoire de ton dernier album « L’autre » sur les routes et dans les villes de France. Te revoilà parti à la rencontre du public avec une autre tournée visitant les répertoires de tes anciens albums, « Plancha Tour ». Qu’est-ce qui a motivé l’envie de reproposer un tour de chant avec des anciens titres ?

La dernière fois qu’on s’était vus, c’était pour la tournée « Parenthèse II » avec Didier et Samuel. Entre temps, on a fait un spectacle à la sortie de l’album « L’autre » qui s’appelle « Le tour de l’autre », avec un décor assez conséquent, ce qui fait qu’on ne pouvait pas aller partout, parce que techniquement, il fallait qu’on puisse placer ce décor. Donc on a malheureusement fait peu de dates, peut-être trente cinq. Habituellement j’en fais plutôt quatre vingt. Pourtant tous les professionnels qui ont vu le spectacle ont dit que c’était probablement mon meilleur. On venait aussi de changer de tourneur. Et dans ce spectacle, à un moment, on ne chantait, avec Samuel, que tous les deux. Et en déconnant je disais à Samuel qu’on était bien, pas besoin de déployer tout ce matériel : j’imaginais une plancha, et on rappelait les deux autres, se mettait autour d’un micro commun, et on visitait les anciennes chansons en acoustique. C’était le moment « plancha ». Et puis voyant qu’on avait moins de dates, et que c’était à la fois une question de prix et une question d’adaptation du spectacle, on a eu l’idée de poursuivre avec ce « Plancha Tour ». On est dans le plus simple appareil ; ça ressemble plutôt à la tournée « Parenthèse », sauf qu’on est les quatre habituels, sans Didier sur scène. On ramène tout à la base, et on s’éclate, parce que, comme pour la « Parenthèse », ça part dans tous les sens. C’est assez drôle ; on se marre tout le temps. C’est parti comme ça et ça va tourner au moins jusqu’au mois de juin 2025. J’ai d’autres projets bien sûr, mais ça va tourner.

– Peut-être ce genre de tournée répond-il aussi à un désir ou besoin de festivité du public, après les confinements et temps morts dans l’événementiel ?

Je ne fais pas de sociologie. Je ne pense pas comme ça ; je pense en spectacle, en chansons. C’est surtout que j’aime tourner tout le temps. Donc à partir du moment où je voyais que le spectacle précédent, qui pourtant a super bien marché chaque fois qu’on l’a joué, ne se vendait pas beaucoup, et posait des difficultés au tourneur, je me suis dis : « faisons un spectacle passe-partout, moins cher, qui aura besoin de moins de technique ». On ramène juste notre sonorisateur ; les lumières sont faites par le technicien de la salle. Effectivement on est dans un truc qui relève plus de la proximité avec les gens, et en général les gens aiment bien ça avec moi. Malgré tout, le « Tour de l’Autre » était de toute beauté. On a eu des trous de quatre mois sans le jouer, et c’était compliqué de retrouver les repères après ces périodes sans jouer. Donc il restait une ou deux dates de ce spectacle qu’on a changées en dates de « Plancha tour », et on a continué. Les dates partout sont pleines, ou alors il manque cinq ou dix pour cent de la salle. Déjà quand on a tourné avec « Parenthèse » juste après le covid, on a fait cent vingt dates. J’ai cette chance que les gens adhèrent aux chansons, et adhèrent aux personnages aussi, parce que les musiciens sont devenus des personnages à part entière. On est une équipe bien soudée ; on se marre bien, et c’est des fou-rires tout le temps. C’est vraiment très agréable. Je vis une belle fin de vie.

Capture d’écran 2024-04-19 193948– On a vu récemment des artistes tels Damien Saez et Hubert-Félix Thiéfaine, qui depuis des décennies continuent de remplir de lieux de spectacle de grande capacité d’accueil, sans aucune promotion médiatique et en ayant disparu des radars radiophoniques et télévisuels depuis longtemps. Tu fais parti de ces chanteurs artisanaux, qui, en marge de l’industrie du disque et des influents de la profession, et sans soutien des médias de masse, ont acquis et conservent la fidélité d’un public et une popularité nationale conséquente. Quels regrets ou quelle fierté ressent-on d’un tel parcours ?

– Je fais de l’artisanal par constat. Je ne le fais pas par militantisme. Longtemps on a cru que Thiéfaine le faisait, car il préférait être dans le côté sombre, ce qui n’est pas vrai. Il aurait tout à fait accepté d’avoir le statut d’un Renaud ou d’un Lavilliers. Je pense que Damien Saez va plutôt dans une autre politique de ce côté là, plutôt rebelle. Mais à un moment il faut regarder ce qui est vrai : les radios ne me passent pas ; la profession ne m’encense pas. Et puis il y a la volonté de pouvoir faire ce qu’on veut quand on veut. On s’est toujours arrangés pour ne pas être coincés et avoir une liberté de mouvement. Et ce n’est pas dans le sens rebelle de la chose. Si j’ai envie de faire un spectacle sur Maxime Le Forestier, je vais l’appeler et le faire, sans m’occuper de savoir si ça va se vendre, si ça fait bien, si, stratégiquement, ça passe. La maison de disque est le seul lien qu’on a avec un extérieur, et la maison de disque nous connaît : ils ont dit « oui », et ils savent que de toute façon, s’ils avaient dit « non », on s’en branle. Mais ça fait vingt ans qu’on travaille ensemble ; on se connaît. J’ai deux spectacle en projet, l’un sur Maxime Le Forestier, et l’autre de mes chansons avec deux accordéons. On ferait ça en attendant le prochain album. Avec Samuel et son comparse, Fred Langlais, avec qui il fait un duo d’accordéons ; ce sont deux bêtes à l’accordéon. Ça me permet de faire un pied de nez à tous les gens qui disent : « ah c’est ça, Jamait ; y a encore de l’accordéon ? ».

– Et une casquette ?

– « Y a la caquette ? Et encore de l’accordéon ? ». Oui ! Et y a encore de la guitare, et y a encore du clavier. C’est la raison pour laquelle j’ai fait cette chanson « Accordéon », et je sketch là dessus sur scène ; j’en plaisante. Et où est le problème ? Donc l’idée est non seulement d’assumer l’accordéon, mais en plus de faire un truc que à l’accordéon. Et le spectacle sur Le Forestier, j’aimerais le faire avec Jérôme, mon guitariste, et avec un guitariste qui a joué longtemps avec Le Forestier qui s’appelle Michel Aumont. Le Forestier avait écrit un bouquin qui s’appelle « Brassens et moi », et l’idée était de faire « Maxime et moi », et de raconter le parcours de fan que j’ai eu avant, à travers ses chansons, et pas forcément les plus connues. Je connais absolument tout de Maxime. Je pense que ça tournera de septembre 2025 à février ; l’idée est de faire quelque chose sur trois ou quatre mois, pas plus long. J’ai aussi un album à faire et une exposition de peintures à finir, un peu beaucoup de choses.

Capture d’écran 2024-04-19 194005– Tu disais précédemment que la Chanson, des chansons, t’avaient éduqué. Est-il question de quelque chose comme une reconnaissance éternelle à cette forme d’expression artistique qui t’a permis de devenir l’artiste que tu es ?

– Complètement ! Je dois tout à la Chanson. Le peu d’instruction et le peu de culture que j’ai sont passés par la Chanson d’abord. Ça ne fait pas sérieux… Ce n’est pas un diplôme. Mais c’est en écoutant les chanteurs que j’ai appris des choses, et que j’ai cherché à creuser. Les premiers temps où j’écoute Maxime Le Forestier, j’ai quinze ans, à l’école je suis plus que médiocre, je l’entends chanter « Entre 14 et 40 ans » sans savoir de quoi il parle, ou « Parachutiste » sans comprendre pourquoi on peut leur en vouloir. Il dit le mot « fasciste », et je ne sais même pas ce que ça veut dire, pour te dire d’où je viens. Quand on me dit que mes chansons sont magnifiques, je reviens de loin ; je suis vraiment parti de zéro. La première fois que j’écris et commence à vouloir poser un texte, c’est vraiment à chier : il n’y a pas une petite lumière de quelque chose où on peut voir du talent. C’était vraiment très mauvais. J’ai respiré, vécu, ressenti, « Chanson » pendant des années ; ça a été ma béquille, ma bouée de sauvetage, face à la vie. C’est de là que j’ai tout puisé. Et après j’ai écarté sur d’autres : Moustaki, des gens qui m’ont fait voyager, la culture, la peinture. Je suis passé par là pour apprendre des choses. Donc assez brouillon. Et puis par une culture de gauche qui t’accueille bien, avant de t’enculer, mais qui t’accueille. J’ai ce parcours là. La gauche était la gauche. Maintenant j’ai plus de recul : je me sens homme de gauche, mais « la gauche », politiquement parlant, ça ne me parle plus. Je me sens de gauche par l’aspect social, alors que je n’ai pas spécialement envie de décapiter un roi, personnellement, même si historiquement ça vient de là : au parlement étaient à gauche ceux qui voulaient décapiter le roi, et à droite ceux qui ne voulaient pas. La bien-pensance sociale de gauche m’a attiré ; maintenant j’ai beaucoup plus de recul là dessus. Je suis plutôt heureux d’avoir élevé mes enfants dans un esprit un peu comme ça, tout en leur disant que ce n’est pas la panacée. Mais c’est ce qui m’a cultivé, donc je ne peux pas non plus le rejeter. Je ne le rejetterais pas, car je me sens profondément de gauche. Mais politiquement je ne me reconnais dans aucun parti, et je pense qu’on a été beaucoup utilisés, les gens comme moi, par un parti dit « socialiste » qui ne me fait que douter maintenant. La droite ne m’a jamais trahi : elle n’a fait que ce que je n’avais pas envie qu’elle fasse. Alors que la gauche a toujours dit qu’elle allait faire des choses qu’elle n’a pas fait, tout en rappelant qu’il y a eu l’abolition de la peine de mort et les congés payés. Merci ! Vingt cinq ans pour ça, on va peut-être arriver à faire autre chose, un peu. Mais on n’apprend que par l’expérience, et maintenant on va dire que j’ai l’expérience de m’en foutre.

– Tu dis que la Chanson t’a éduqué et instruit. Et tes propres chansons ne sont pas dépourvus de texte, souvent très poétique, et fourmillant d’idées. Néanmoins tu as souvent eu une parole critique envers la Chanson dite « Chanson à texte », qui, pourtant est précisément à même, par sa qualité littéraire, de pouvoir éduquer et instruire, et enrichir le vocabulaire de ceux qui en possèdent moins -et je dis cela sans condescendance, car les chansons de Thiéfaine ont enrichi le mien dès une préadolescence où je maîtrisais très mal le Français, qui n’était pas ma langue maternelle-. Est-ce à cause d’un certain élitisme faisant du peu d’accessibilité et d’intelligibilité un critère de bon goût, logique qui peut s’apparenter à une forme de mépris du populaire ?

– Ce n’est pas que je n’aime pas les chansons « à texte » ; je trouve prétentieux de dire que je fais de la « Chanson à texte ». Une chanson comme « La mémoire et la mer » de Ferré est une vraie chanson à texte. Mais Patrick Sébastien, c’est aussi de la chanson à texte : il va faire rire, chanter, danser autour d’un mariage ou d’une fiesta, et si tu mets à ce moment là « La mémoire et la mer », tu vas te faire jeter, alors que c’est un des plus beaux textes qui aient été faits. Mais dire qu’on fait de la « Chanson à texte » a un côté prétentieux ; en général c’est un truc qui se pose et dit : « je ne fais pas n’importe quoi ». Pour moi la Chanson, c’est d’abord un truc populaire. Alors après on essaye de soigner, de faire des choses bien tournées, qui chantent un peu. J’aime beaucoup l’écriture du XIXème siècle. C’est un peu rétrograde ; mais enfin Brassens allait chercher dans le Moyen Age. Mais Brassens avait quand même vocation à être populaire. Il ne voulait pas chanter pour une niche ou une élite. D’ailleurs maintenant ceux qui font de la chanson pour des niches ou des élites écrivent assez simplement, parce que ça fait mieux d’écrire simplement. Il y a une espèce de posture. Dire qu’on fait de la « Chanson à texte » est une posture qui m’emmerde. J’ai eu une marraine, qui m’a élevé, qui était complètement analphabète : j’aime l’idée de penser que mes chansons auraient pu la séduire. Ça me ferait chier qu’elle ait pu écouter ça en se disant : « je ne sais même pas de quoi il parle ». Maxime Le Forestier était accessible. Il m’a fait sortir le dico, comprendre des choses ; je trouvais ses syntaxes et tournures de phrases poétiques, avant même de trouver un côté politique dedans. C’est ça qui m’intéressait. « Y en a qui », qui est une chanson que j’ai écrite pour mon premier album, et qui marche beaucoup, est une chanson vindicative, de colère. Mais aujourd’hui, je ne l’écrirais plus. D’abord je ne la trouve pas très bien écrite ; et puis je me sentirais racoleur et démagogue. Bon, je l’ai écrite, je l’assume ; je peux la chanter, car j’incarne des personnages quand je chante. Mais je ne l’écrirais plus aujourd’hui. Je suis un petit bourgeois aujourd’hui : je vis bien de ce que je fais, et je n’ai pas la vie que j’avais quand je l’ai écrite. J’ai acheté ma maison à crédit il y a deux ans ; je n’avais jamais fait ça de ma vie. Donc je me considère bourgeois. Je fais encore des choses, comme tout mec qui n’a jamais rien eu avant et tout d’un coup a la sensation d’être choyé par la vie. Je suis un fan de boxe, et Tyson allait en banlieue d’où il venait et distribuait ses tunes partout, parce que l’injustice était insupportable pour lui : on reste un peu comme ça. Donc les Emmaüs m’ont contacté, et j’ai été jouer pour eux ; je parraine une asso. Il y a des choses qui me mettent en colère, qui peuvent m’énerver, qui peuvent m’agacer. Mais je ne me permettrais pas de dire « allez, soutenez-moi ». Je connais des chanteurs qui sont comme ça, et des fois ils en ont marre, parce qu’on ne les attend que là. Et ils sont emprisonnés dans ça. Maxime, ça a été son cas : il m’a dit un jour qu’à un moment, tout le monde le prenait pour le chanteur hippie par excellence, qui représentait ce mouvement. Dans sa jeunesse il y était, parce qu’il y avait des choses inadmissibles pour lui ; mais il n’était ni plus ni moins que le témoin d’une société, pas forcément le porte-parole d’un mouvement. C’est pour ça que je me suis vite défendu de ça, après « Y en a qui », parce que je ne voulais pas devenir le porte-parole de quoi que ce soit. J’aime la « Chanson à texte », mais je suis venu par la variété. J’ai dans la chanson « Les poings de mon frère » d’ailleurs revendiqué Johnny Halliday. Un coup, avec Linda Lemay, on a fait un concours à celui qui connaîtrait la chanson de Johnny que l’autre ne connaîtrait pas. Alors qu’on est deux chanteurs dits de « Chanson à texte ». J’écoute beaucoup « La mémoire et la mer » ces temps-ci ; je ne sais toujours pas ce qui m’émeut, mais je la trouve d’une beauté et d’une liberté d’écriture rares. Mais la Chanson, c’est un truc qui accompagne la coiffeuse, le banquier, le routier, la boulangère, le mécanicien, des cadres. Je fais de la Chanson française, ce qui n’est absolument pas un genre, parce que la Chanson française, ça va de Stromae à Patrick Sébastien, en passant par tout ce que tu veux, et moi je suis là dedans. La question de la posture m’évoque ces vieux chanteurs qui font de la Chanson et disent qu’ils font du Rock, parce qu’ils doivent penser que ça fait rester jeune. Je n’ai pas envie de rester jeune ; je n’ai aucun problème à être vieux. Ça fait partie de la vie. J’ai soixante deux ans, je ne suis pas un gamin, et je ne vais pas faire du jeunisme. La jeunesse n’est pas quelque chose vers quoi je veux aller ; et je ne voudrais surtout pas y retourner ! J’étais tellement mal dans ma peau, étant jeune. Je suis mieux dans ma peau de vieux que dans ma peau de jeune.

Capture d’écran 2024-04-19 193906

– Et, toi qui te montres peu indulgent avec la qualité littéraire de tes anciens textes, à quel moment, ou par quel déclic es-tu venu au goût de l’écriture poétique ?

– Je n’ai jamais fait un concours de ma vie, ni passé d’examen à part des examens sanguins. Je n’aurais pas osé. Simplement j’écoute, je lis, les autres et quand je vois une belle tournure de phrase, qui est bien pensé, j’essaye de trouver des formules. J’avais un copain qui écrivait très bien, qui n’est pas devenu chanteur, mais donne des cours de guitare, et je regardait ce qu’il écrivait, et petit à petit, de temps en temps, j’arrivais à trouver une formule dont j’étais content. Entre ma première chanson, je devais avoir quinze ans, et le moment où j’ai commencé à oser montrer mes texte, j’avais fait un concert à la vingtaine avec un groupe qui s’appelait l’Adam de Sagesse -d’ailleurs je chantais les chansons de ce copain qui écrivait pas trop mal-, j’avais trente sept ans quand j’ai sorti ma première. Donc il s’est passé vingt deux ans, assez douloureux : je n’osais pas me lancer, parce que je trouvais que ce que je faisais était à chier ; j’en avais une envie folle. Et à trente sept ans, quand je suis monté sur scène, je me suis dis qu’incontestablement j’étais là chez moi. C’est l’endroit où je suis le mieux au monde. Il n’y a aucun autre endroit dans la vie où je me sens mieux que sur scène. L’envie venait de là ; j’avais surtout envie de faire le pitre. Après, écrire des chansons était très compliqué. De mes quinze a mes trente ans, j’ai pris une cuite qui en gros a duré quinze ans, avec des problèmes à régler, l’absence d’un père, qui fait que la confiance en soi est problématique. Mais de temps en temps il m’arrivait de m’enfermer dans une piaule pour me hurler dessus ; j’en chialais de ne pas écrire bien. Et j’y retournais, avec, de temps en temps, une petite réussite. Et je jouais le soir pour mes potes bourrés et tout le monde trouvait ça bien. Parce que quoi qu’il en soit, une fois que j’étais parti à chanter une chanson, je l’incarnais vite et j’envoyais. Mais de là me lancer dans quoi que ce soit… Quand je discute avec Joyet, qui, lui, a un vrai parcours littéraire depuis très jeune, moi, je suis parti vraiment de rien. Une barque qui rame, mais sans eau dessous. Donc tu avances comment quand c’est comme ça ? Tu pousses ta barque jusqu’à trouver un point d’eau. Quand j’ai écrit le premier album, j’ai été en panique à l’idée de devoir en écrire un autre ; j’avais l’impression d’y avoir tout mis. Et puis ça a été exponentiel. Ce que j’ai appris à faire, c’est noter absolument toutes les idées, le moindre mot, la moindre tournure de phrase, la moindre mélodie. Et quand j’ai besoin d’écrire un album, je me plonge dans la relecture, je tire des phrases, parfois je ne sais même pas ce que je vais écrire, mais je tricote, tire le fil. Ce qui fait que je n’écris pas en partant de thèmes, ou rarement. Sur le dernier album, il y a « A marrée basse » que j’ai écrit sur commande. C’était une commande de l’université de Besançon sur le temps qui passe, alors que je ne fais que ça, des chansons, sur le temps. Et puis je leur ai envoyée ; trois mois après toujours pas de retour, et puis on a fini par me dire que ce ne serait pas pour cette année, donc je l’ai reprise. Pour le coup c’était très écrit. Mais sinon je fais des chansons, pas de la littérature ; je n’ai pas envie de faire de la littérature chantée. Pour « Toi », par exemple, c’est encore une autre façon de faire, qui est plus à l’américaine, car je n’avais que « toi » et un air qui tournait, sans savoir ce que j’allais écrire d’autre. Alors il fallait chercher avec les sonorités. Un qui excelle là dedans, c’est Philippe Lafontaine, qui fait vraiment sonner et claquer le Français. Il a des chansons absolument merveilleuses ; je suis un gros fan de ce mec. L’écriture a évoluée avec moi. D’abord j’ai réussit à ne plus avoir un regard critique assassin sur moi. Pour les trois premiers albums, je me jugeais vachement. Maintenant je suis plus apaisé pour écrire. Ce qui est bien dans le fait d’avoir pu continuer, c’est la sensation de se réaliser. Chose à laquelle je ne pensais pas pouvoir accéder un jour. Vivre de ce que tu aimes, je ne pensais pas non plus pouvoir faire cela un jour dans ma vie.

– Le fait d’avoir entamé une carrière musicale et rencontré l’amour du public tardivement, à un âge déjà serein, ou en tous cas, expérimenté et conscient des réalités et de la valeur des choses, en comparaison d’artistes qui ont explosé avec un premier succès populaire dès le départ et très jeunes, a-t-il eu l’avantage de te protéger de certains périls contre lesquels, jeune, on manque de méfiance et d’accompagnement psychologique ?

– Moi ça me serait arrivé jeune, je serais mort. Ce qui est arrivé à d’autres à vingt ans m’est arrivé à quarante. Et je n’ai pas eu une reconnaissance du métier, des « professionnels de la profession » comme disait Godard. J’ai rencontré des tas de gens, des artistes que j’aimais, mais surtout le public est venu. Je n’aurais jamais bougé mon cul si le public n’était pas venu. Et je ne me suis jamais dit qu’il fallait que j’explose. Je n’avais pas besoin de ça. A partir du moment où je pouvais gagner un smic en chantant, pour moi, ça marchait. Avant je bossais à l’usine, alors gagner un smic en chantant des chansons, super. Je n’étais pas avide de reconnaissance. Maintenant j’ai derrière moi deux Olympia, je ne sais combien de Cigale ; j’ai été jouer en Belgique, au Québec, en Russie ; j’ai chanté partout en France, moi qui ne voyageais pas et serais resté sédentaire, si je n’avais pas fait ce métier. Ça fait vingt ans que je fais ça ; les gens sont contents quand ils me voient : il y a pire à vivre, quand même! Et je ne suis plus énervé. Pour certains chanteur, partir en tournée est une source d’angoisse. Pour moi c’est un vrai plaisir, partir sur les routes. On est une belle équipe ; on se parle bien. Quand tu dois supporter un chanteur qui n’est pas bien dans sa peau, qui vit mal d’être chanteur, c’est compliqué. Si c’est comme ça, il vaut mieux faire comme Gérard Manset : lui n’a jamais fait de scène, car il n’aimait pas ça.

– As-tu prévu des festivals ce été ?

– Les festivals, j’aime bien, car on rencontre d’autres artistes et c’est plutôt cool pour ça. Mais après c’est toujours frustrant, car tu ne joues qu’une heure. Et puis, nous aimerions bien en faire ; notre spectacle marche plutôt bien avec les publics. Mais en général, ce sont les petits festivals artisanaux qui m’accueillent, et il faut bien reconnaître, qu’eux ont du mal à survivre. Je vais aller faire le festival des fromages de chèvres pour Paco, et peut-être quelques autres. Mais pour cet été il n’y a pas de grand festival prévu. Jouer une heure et devoir s’arrêter, alors qu’on vient juste de rentrer sur scène, ça frustre les musiciens aussi qui doivent arrêter quand ils commencent à être dedans. En plus tu joues devant un public debout ; il n’y a pas la même attention. C’est pour ça que j’aime bien que le public soit assis. Je profite. Le dernier concert, on a joué deux heures et demi, et ça me paraît rien.

– Et les « Bars à Jamait » ?

– Quand on nous en demandera. C’est un truc qu’on n’a jamais fermé. Bien sûr il n’y aura plus Anne Sylvestre, qui était u des piliers. Les deux derniers que j’ai fait se passaient en Suisse, donc il n’y avait pas les piliers, mais des chanteurs suisses ou transfrontaliers, et Nicolas Jules. C’est toujours ouvert : on s’est toujours dit que s’il y avait une demande, on sortirait les téléphones et on rappellerait les copains. Et maintenant il y a plein de jeunes que j’inviterais bien. Le noyau ne sera plus le noyau dur, puisqu’on en avait fait vingt sept avec Anne. Il y avait Agnès Bihl, Nathalie Miravette, Bernard Joyet, Gérard Morel et moi. La parité, en plus ; je ne m’en étais jamais rendu compte! Mais le départ d’Anne a fait que ce ne sera plus jamais la même chose. On commence tous à se faire vieux. Mais c’est bien aussi quand on peut inviter des jeunes.

Lien : https://www.jamait.fr/

Capture d’écran 2024-04-19 194036

Miren Funke

Photos:Carolyn C

Concert de sortie de l’album « Rendu les armes » de Julie Lagarrigue à Cenon

21 Mar

IMG_5483

Dimanche 10 mars avait lieu, au Rocher de Palmer de Cenon en Gironde, le concert de sortie de l’album « Rendu les armes » de Julie Lagarrigue, album doublé d’un second disque « Julie chante Nicolas Jules », mais dont un seul titre, « Celui qui n’a rien » fut joué lors du rappel, la chanteuse se consacrant principalement à présenter au public ses nouvelles chansons.

Capture d’écran 2024-03-06 135416La soirée célébrait aussi la clôture des quatre journées du festival « Drôles de Piafs », né à l’initiative de l’artiste, et soutenue par Cyrille Cholbi (structure Cholbiz), qui a offert, aux étudiants de Licence de Musicologie de l’université Bordeaux III Michel de Montaigne, l’opportunité de partager des scènes avec des artistes alternatifs de chanson francophone (Doclaine, Dimone, Tiou, Jur et Boule). On peut saluer le courage de l’engagement des différents acteurs impliqués dans le projet, pour faire vivre la Chanson et permettre à de jeunes auteurs-compositeurs-interprètes de rencontrer artistes aguerris et publics, avec qui ils ont partagé des moments intenses, comme l’an passé, lors de la première édition, et la beauté du geste de résistance que constitue leur investissement, tant personnel que financier (à pertes) dans cette aventure, l’aventure de la richesse des rencontres et des partages qui créent la poésie d’un moment et esquisse celles d’horizons à venir. A en juger par l’adhésion du public, nul doute que demeure et se ravive la conscience de combien il est précieux, par ces temps sinistres et artistiquement appauvris, que se dressent de tels partisans du soutien à la créativité, et des chemins de traverse possibles, aussi jonchés de ronces soient-ils, contre l’idée que l’industrie classique du disque et le show-business ultra-médiatisé sont les seules voies possibles pour que des artistes puissent partager ce qu’ils ont à offrir.

IMG_5449Aussi c’est par deux de ses élèves que fut assurée la première partie de Julie Lagarrigue, Mathilde Chatin et Andoni Martiquet, qui choisirent, après avoir interprété chacun certaines de leurs propres chansons, de reprendre ensemble son titre « La mer est immense ». L’artiste, émue de cette reprise, la chanta à son tour lors de son tour de chant.

« Dis, c’est quand, avec ton piano noir, que tu nous amènes ? » aurait-on pu osé, tant la salle comble attendait avec impatience les nouvelles compositions de Julie Lagarrigue. L’entrée en matière au cœur des morceaux de l’album n’allait pas tarder. Et pour ce faire, l’artiste, tantôt au piano, tantôt à la guitare, avec ou sans harmonica, avait choisit d’être accompagnée des musiciens Thomas Labadens à la guitare et batterie, Edouard Lhoumeau au doudouk, et Marc Mouches en saxophone additionnel pour un final en fanfare avec « La plume », Franck Leymeregie, percussionniste du précédent album, « La mue du serpent blanc », venu rallier la troupe pour l’occasion de ce concert, ainsi que d’Amrit Douqué, vocaliste, mime et danseuse, pour un spectacle musical et visuel auquel l’audace de cette originalité donnait un dynamisme accrocheur.

IMG_5465Une mise en scène imaginée avec goût, cet intrépide et avide goût de l’étrange qui pigmente et pimente de façon intrigante la sobriété, la mélancolie, l’humour ou la tendresse de l’œuvre de Julie Lagarrigue depuis ses débuts. L’artiste avança donc les morceaux de « Rendu les armes » à travers un espace temporel à envahir, bouleverser, et ensemencer d’émotions, dans lequel les notes et les mots semblaient si fertiles et pertinents qu’on sentait à peine glisser les minutes de ces deux heures suspendues comme un éphémère devenu éternité, avant de nous rendre à la réalité d’un éphémère déjà trop vite passé.

IMG_5412Seuls trois anciens titres osèrent s’immiscer dans le tour de chant tout neuf, « Le tango des squelettes », « La mer est immense », et « Léon qui gronde » en rappel, en l’honneur du vigneron artisan Norbert Depaire, dont la cuvée Léon qui Gronde, est l’objet de l’ode composée par Julie Lagarrigue, et qui était venu pour l’occasion, offrir aux auditeurs, après le concert, une dégustation de ses vins. L’initiation de la jeunesse à la Chanson connut un écho particulièrement émouvant au creux même du concert de la chanteuse, dont la jeune fille, vint rejoindre sur scène sa maman pour interpréter, avec timidité, mais courage, la chanson qu’elle même a écrite, « C’est la vie qui coûte cher ».

Le ravissement du public découvrant les chansons de l’album avec cette atypique et cocasse mise en scène visuelle le laissa conquis, et incapable de se hâter à quitter les lieux, la dégustation vigneronne offrant l’occasion de se prolonger, autour d’un verre et avec des échanges d’impressions, « la joie ou le chagrin que ce genre de frisson procure », encore dans ce moment, dont aucun ne souhaitait s’arracher à l’atmosphère chaleureuse, presque familiale. Et on se dit qu’il serait parfait qu’il en soit toujours ainsi avec la Chanson. On mentirait, si on n’le disait pas…

Les dates à venir sont indiquées ici : https://julielagarrigue.com/agenda/

Liens : site : https://julielagarrigue.com/

Facebook : https://www.facebook.com/julielagarrigueofficiel

Miren Funke

Les funambules de la résistance chanson, le PIC et Michèle Bernard

11 Mar

 

Ils sont de la tribu des saltimbanques, pas toujours dans la lumière, la tribu des horticulteurs de la fine fleur de la chanson, des orpailleurs résolus, dans la lignée de La Colombe, l’Echelle de Jacob, des Trois Baudets, du Cheval d’Or, de l’Ecluse, de la Fontaine des 4 Saisons, et quelques autres, on les retrouve au PIC* qui a succédé au FLF** et 30 ans de programmations affinées comme ces vins de vignerons exigeants et discrets..

Michèle Bernard PIC reduitDans ses programmations inventives le Petit Ivry Cabaret a invité pour deux soirées Michèle Bernard, une artiste qui a exercé son art dans presque tous les domaines de la scène francophone, spectacles en duo, en solo, avec des choeurs de femmes – et un petit orchestre forain- des tours de piste avec cirque et spectacles jeune public; la carte de visite de Michèle Bernard c’est la déclinaison d’une vie de saltimbanque tout terrains, le kaléïdoscope de ses chansons c’est l’inventaire de tous les désordres et toutes les tendresses pour supporter ces désordres. Dans cette nouvelle tournée « Miettes » Michèle Bernard est accompagnée par Pascal Berne, Nico Frache et David Venitucci.

Et c’était en harmonie avec ce que propose l’équipe du PIC, menée avec brio par Sélina Casati et Patrice Mercier et leurs compagnons de route dans cette nouvelle aventure. Si vous ne connaissez pas le PIC, je n’ose y croire c’est par là → https://petitivrycabaret.fr/

Michèle Bernard est une chroniqueuse de la vie, drôle, tragique, caustique, engagée selon ce que disait Camus il y a plus de 60 ans, «  l’artiste, qu’il le veuille ou non, est embarqué. Embarqué me paraît ici plus juste qu’engagé.. » Et dans la bourlingue de la vie, on navigue parfois à contre courant pour créer envers et contre tout, car seuls les poissons morts suivent le courant . Proverbe séminole.

Si vous ne connaissez pas bien Michèle Bernard suivez le guide → https://leblogdudoigtdansloeil.wordpress.com/2023/10/12/michele-bernard-quand-vous-me-rendrez-visite/

* PIC = Petit Ivry Cabaret

** Forum Léo Ferré

Norbert Gabriel

Concerts « Drôles de piafs » en Gironde du 07 au 10 : Julie Lagarrigue, Doclaine, Boule, Tiou, Dimoné, et les étudiants de Licence « Musiques actuelles, Jazz,et Chanson »

6 Mar

Capture d’écran 2024-03-06 135416

Cette fin de semaine, du 7 au 10 mars, quelques scènes bordelaises auront la chance de découvrir les concerts « Drôles de piafs », organisés à l’initiative de Julie Lagarrigue, avec le concours d’autres artistes de chanson francophone, notamment Nicolas Jules, et, cette année, Boule, Tiou, Jur, Dimoné et Doclaine [ici], et des étudiants de Licence « Musiques actuelles, Jazz et Chanson » du département de musicologie de l’université Michel de Montaigne Bordeaux III, seule Licence de Chanson en France, avant que la semaine se clôture par le concert de sortie du dernier double album de la chanteuse « Rendu les armes/ Julie chante Nicolas Jules » au Rocher de Palmer, dimanche 10 mars [https://leblogdudoigtdansloeil.wordpress.com/2024/02/13/entretien-avec-julie-lagarrigue-pour-la-sortie-du-double-album-rendu-les-armes-jules-chante-nicolas-jules/%5D.

« Drôles de piafs » qui a pour propos l’organisation de rencontres entre étudiants en musicologie et artistes indépendants du métier, pour ouvrir des perspectives en marge du système industriel de la musique, réitère donc l’expérience de l’an passé, en conviant le public à venir découvrir des artistes d’ailleurs et encourager des échanges générationnels, en dépit de obstacles et des périls, tant s’impliquer pour promouvoir l’expression artistique alternative et soutenir des auteurs-compositeurs-interprètes peu connus ou encore anonymes est un engagement auquel peu, de moins en moins, y compris dans les réseaux associatifs alternatifs, se risquent. L’existence de ces initiatives, pourtant indispensables au frémissement de la créativité et à la survie de la Chanson, qui embellissent les moments de partage et enrichissent la vie culturelle, mais qui se raréfient, principalement pour raison budgétaire, puisque souvent ceux qui les portent y perdent beaucoup pour n’y gagner rien d’autre que la satisfaction d’avoir contribué à propager de la poésie, étant grandement menacée, leurs organisateurs et participants comptent sur la curiosité et le sens citoyen du public pour venir massivement soutenir les concerts.

Les billets sont en pré-vente via la plateforme Halloasso de Julie Lagarrigue/Le vélo qui pleure ici : https://www.helloasso.com/associations/le-velo-qui-pleure/evenements/droles-de-piafs-2024

Et l’artiste a tenu à nous en parler un peu il y a peu de temps.

– Julie, bonjour et merci de cet entretien. Peux-tu expliquer en quoi consiste les programmes que tu réalises avec ces étudiants ?

Avec le temps, je me suis dit que ce serait bien de montrer aux étudiants ce que c’est que le véritable métier de terrain, en pratique, et leur montrer aussi qu’on peut être musicien, sans rentrer dans le show-biz, que ça existe d’être intermittent du spectacle et de bosser, sans être reconnu, comme font plein qu’on connaît. Ce n’est plus la même époque ; on est largués, nous : les étudiants musiciens qui ont vingt ans sortent des EP, font beaucoup de productions, se servent des outils modernes. Donc l’année dernière, je les ai faits venir pour un mini-festival, et je leur ai fait travailler des reprises de Nicolas Jules, Nicolas Moreau et Boule, puisqu’on travaillait sur l’interprétation. Ils ne comprenaient pas très bien à quoi servait de faire toutes ces reprises. Après j’ai fait venir les artistes, et on a délocalisé les cours au Cerisier. Chaque jour, les artistes venaient, ils avaient carte blanche, et on a fait un master-classe rencontre. Et le soir les étudiants jouaient en première partie des artistes, avec les reprises des artistes en question. Le tourneur Cyrille Cholbi (Cholbiz Production) a investi financièrement pour assurer le salaire des artistes. Et puis c’est intéressant de faire connaitre l’association Rock et Chansons de Talence aux étudiants, car elle propose des lieux de répétition et studio d’enregistrement accessibles.

– Comment les étudiants ont-ils appréhendé ce travail ?

Les étudiants y sont allés à reculons, car ils ne savaient pas du tout ce qui les attendait. Mais ils ont pleuré à chaudes larmes en sortant du spectacle de Boule. Ils m’ont dit au final qu’ils avaient compris qu’être artiste, c’est beaucoup de travail. Donc je me suis dit que ce n’était pas si mal déjà. Car je n’ai invité que des artistes indépendants, qui leur ont raconté comment ils faisaient, y compris leur com, leurs pochettes d’album. Donc ils ont compris que c’était beaucoup de travail, et aussi que c’était quand même superbe de voir des artistes sur scène, car c’est une génération, qui, avec le covid, n’est pas beaucoup sortie voir des spectacles. Financièrement évidemment, ce n’est pas du tout rentable de faire cela, mais comme les étudiants étaient si enjoués, et que là, ils sont en dernière année, j’ai proposé de recommencer cette année, mais pour qu’ils chantent leurs propres compositions. On a donc fait une collaboration avec Rock et Chanson, à Talence. Boule revient en trio, et en première partie il y aura Doclaine, et Tiou, et Dimoné. Ce sera le 8 mars. Il faut vraiment qu’on arrive à remplir la jauge, car c’est le seul moyen de rentrer un peu de finances. Et je clôturerai la fin de la semaine, dimanche 10, avec ma sortie d’album au Rocher de Palmer, et deux ou trois étudiants que je vais choisir, avec Norbert, le vigneron que tu connais, qui viendra offrir un verre de ses vins de Château Courtney pour dégustation.

– Donc, l’ode que tu avais composé, en hommage à son vin, « Léon qui gronde » sera-t-elle de mise ?

Oui. Il faut qu’on bosse « Léon qui gronde ».

– Plus globalement quelles autres conséquences bénéfiques ont ces rencontres à tes yeux ?

Les jeunes composent et produisent beaucoup, mais il est vrai qu’ils n’écoutent pas tant que ça de références, dans le patrimoine de la Chanson. C’est pour cela que j’ai voulu leur faire travailler l’interprétation, parce que je trouve qu’avant d’écrire une chanson, c’est bien d’apprendre à interpréter une chanson comme elle a été écrite : tu ne poses pas trop des questions d’auteur, tu ne remets pas en cause le texte, tu ne doutes pas. Tu apprends la chanson, et après, tu la mets à ta sauce. J’adore ce travail. Les faire travailler sur leurs propres compositions est très délicat, car tu ne peux pas leur faire retoucher leur texte. Souvent ils parlent de choses qui leur sont très intimes ; donc c’est difficile de suggérer des changements. Mathilde Châtin par exemple que j’ai choisi pour ma première partie veut travailler ma chanson « La mer est immense ». Et je pense que c’est très encourageant aussi pour les artistes qui viennent, d’être découverts, chantés et repris par des étudiants. Ils en étaient super touchés. Et puis faire venir des artistes dans la région est une manière d’amorcer des échanges et faire découvrir à des gens qui viennent de loin des chanteurs d’ici et vice versa.

– C’est une prise de risque que très peu, de moins en moins même, d’associations consacrant pourtant leurs efforts à permettre à des artistes alternatifs de s’exprimer, osent. Elles font pourtant un travail dévoué et nécessaire, et la scène locale serait bien morose sans cela ; mais concrètement l’évolution des dernières années laissent le sentiment que de plus en plus, même chez les alternatifs, ce sont toujours les mêmes qui passent et repassent, que les réseaux sont hermétiques, et hélas les prises de risque se raréfient.

En même temps tu comprends vite qu’à l’heure actuelle, il n’y a pas trop moyen de prendre des risques. Nous avons à L’Inconnu, soixante places assises. Pour un concert solo, il faut compter trois cent euros par tête de technicien, donc déjà six cent euros la soirée, sans avoir payé le tourneur, l’hôtel, ni personne, sans compter les frais de la Sacem à régler. Cela fait que si tu fais une entrée à dix euros, en remplissant les soixante places, tu es forcément perdant. On ne peut pas organiser autre chose que des concerts solo. C’est très problématique. Cholbiz a investi à perte l’an passé là dedans. Je n’ai rien à y gagner ; je vais même y perdre. C’est vraiment pour promouvoir l’expression des artistes qu’on fait cela. Donc je comprends que les associations de spectacle ne prennent pas de risque. C’est déjà bien qu’elles arrivent à continuer et survivre. Le seul moyen qu’on s’en sorte à peu près bien, c’est d’arriver à relayer un maximum de com, pour remplir la salle.

Capture d’écran 2024-03-06 135513

Miren Funke

Lien : https://www.helloasso.com/associations/le-velo-qui-pleure/evenements/droles-de-piafs-2024

Nouvel album de Nicolas Jules, La reine du secourisme

18 Fév

NJULES

C’est le soir, l’heure de la résignation au banal. Je m’apprête à y céder, par habitude.
Mais sur le canapé, il y a le nouvel album de Nicolas Jules. La pochette est grande ouverte, et je me dis : entrons !

Au plafond tout à coup s’allume un lampion qui n’était pas là deux secondes plus tôt.Le genre rond, en papier plié, rouge-orangé mais ça, c’est juste parce que c’est mon goût. Je retiens mon souffle et respire mieux tout à la fois : la résignation et le banal attendront.

A grands coups de pieds de biche, le casse du siècle bouleverse mon intérieur et la civilisation en prend pour son grade. C’est mérité : elle est assez peu fréquentable. Restent les steppes, les oasis et les bistrots, ces points d’eau précaires où l’urgence rend la rencontre possible. Rare, éphémère, risquée, mais possible. Il me vient alors à moi aussi l’envie de me battre contre les moulins à vent ou de zigouiller les averses, enfin, n’importe quoi d’inutile et donc hors-de-prix. Le lampion est d’accord.

La réalité rechigne et cherche à reprendre le dessus. « Ecoute-bien « , siffle-t-elle « tu l’entends la boîte à rythme ? ». La réalité n’est pas très maligne. Qu’elle cherche à s’approcher de cette boîte et nul doute qu’un diable en sortira, qui la mettra KO une fois de plus. Peut-être même qu’il s’appellera Robert.

L’album s’achève. Je ferme les volets, le banal piaffe à la porte. Je suis prête à la bagarre car j’ai ma trousse de premiers secours.

Will Ferris

La reine du secourisme
Disponible sur www.nicolasjules.com
Paroles et musique : Nicolas Jules
Roland Bourbon : batterie, marimba, balais
Frédéric Jouhannet : violon
Nicolas Jules : voix, guitare, basse
Photos : Thibaut Derien
Mastering : Mathieu Pion
Graphisme : Audrey Lehembre